En quelques jours seulement, la plantation dans les bois était devenu viable et l'eau n'était plus un problème maintenant que j'arrivais à la filtrer et à l'acheminer jusqu'à chez moi. Je m'étais trouvé un petit rythme quotidien qui ressemblait énormément à la vie de fermier d'après mes souvenirs vagues des livres pour enfants que papa me lisait étant petite. Hormis évidemment les apparitions fréquentes autour de mon territoire de bestioles avec beaucoup trop d'yeux ou de pattes pour que j'aie le courage de les compter, et aussi la nourriture presque avariée qui apparaissait chaque soir devant ma porte. Après ma première "visite", je ne m'étais pas risqué à manger davantage de ces petits cadeaux que je recevais, me méfiant de leur potentiel poison ou que savais-je encore. Il fallait se méfier de tout et je ne comptais pas laisser la faim me rendre vulnérable au danger. Je n'avais pas la moindre idée de qui ou quoi était à l'origine de ces offrandes et surtout je n'arrivais pas à comprendre quelle pouvait être la motivation des auteurs de cette mascarade. En revanche, je ne comptais pas laisser ce potentiel se gâcher dans la nature. Grâce aux carcasses dont j'extirpais soigneusement la chair qui s'en détachait facilement, je m'étais façonné un petit couteau de poche que j'utilisais régulièrement pour tout et n'importe quoi. Mais surtout, je pouvais maintenant tailler des pointes dans les os des diverses bestioles pour pouvoir me munir de quelques flèches et m'équiper en projectiles. Selon la créature, les os étaient plus ou moins tendres, solides ou poreux, et je devais adapter la taille des munitions en conséquences. L'étape d'après était bien sûr de me façonner un arc, mais je n'en étais pas encore là. J'étais bien consciente que ma bombe d'aérosol était presque vide et que je manquerais bientôt d'armements, et ce n'était pas les quelques bouts de chair avariés que je dissimulais ci et là dans la forêt pour éloigner les charognards qui allaient me tenir protégée très longtemps. Si l'une de ces choses en avait assez de la viande périmée et se décidait à tailler un croc dans une proie plus fraîche, je devais me tenir prête à me défendre. En parlant de nourriture, en plus du potager qui commençait à peine à prendre, les mûres des bois et autres champignons s'étaient avérés d'une grande aide pour caler ma faim en plus d'apporter un peu de saveur à mes plats. Je voyais passer bien d'autres fruits à ma portée mais n'ayant pas la moindre culture en botanique je ne pouvais pas me risquer à goûter ce que je ne connaissais pas, d'autant plus que certaines baies à l'aspect plus qu'appétissant semblaient lorsqu'on les regardait de plus près contenir comme de petits ambrions grossissant dans la chair gélatineuse. Lorsque je m'en étais aperçu la première fois, un frisson d'horreur était remonté tout au long de ma colonne vertébrale en imaginant quel genre de bestiole pouvait pondre de telles immondices. Ou bien étais-ce un arbre à monstres? Est-ce que c'était possible? Après tout les baies pendaient à des filaments les reliant aux branchages alors peut-être étais-ce un nouveau genre de ponte, ou bien cette variété de buisson produisait réellement des machines à tuer en devenir. Rien ne m'étonnerait plus dans ce monde dévasté de toutes façons. Quoi qu'il en soit, je ne comptais tout de même pas me rabattre définitivement sur cette alternative car d'après les dernières températures et le raccourcissement des jours j'en déduisais facilement que la saison des champignons et des fruits ne durerait pas encore bien longtemps, cette option allait bientôt s'avérer complètement obsolète. L'arrivée de l'hiver me terrifiait, je ne savais absolument pas comment je comptais lutter contre le froid ni comment maintenir mon potager à flots si les légumes gelaient dans le sol. C'était pourquoi il fallait le plus vite possible commencer à m'organiser et faire des réserves, mais cela ne serait pas possible si les pousses tardaient trop à grandir. Je me demandais aussi si la chasse pouvait s'avérer être une bonne alternative à la saison froide, d'où la nécessité de me fabriquer un arc et des flèches, en espérant que les créatures alentours ne soient pas toutes sujettes à l'hibernation. Un rire ironique chatouilla ma gorge en pensant que j'envisageais pour survivre de manger des bestioles dont la nourriture favorite était justement l'être humain. Quelque pars, je me sentais rebutée à l'idée d'ingérer une viande par laquelle était probablement passé certains congénères, mais avais-je d'autres choix devant moi? Je ne pensais pas.
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LA FAUCHEUSE ROUSSE
Fiksi IlmiahCamille LAMY est une jeune fille dont l'enfance va être écourtée suite à une monstrapocalypse qui va toucher la planète entière. Elle va se retrouver à devoir lutter pour sa vie auprès des quelques survivants l'accompagnant, laissant petit à petit d...