Ô sweet sweet fucking karma

17/ Quand le gibier se rebiffe

La fête battait son plein. Jack faisait le pied de grue sur le côté en filmant. De temps à autre, elle dansait seule sur une musique qu'elle aimait bien. Mais elle ne pouvait éviter de remarquer qu'aucun garçon ne restait près d'elle très longtemps dans la foule. Quand ils ne lui tournaient pas carrément le dos, ils s'éclipsaient aussi vite que possible. C'était insupportable. Elle était triste et en colère en même temps. Ça n'était pas juste !

Tout était de la faute de Hunter Stafford.

Hunter qui dansait près de sa cavalière, parce qu'on ne pouvait pas dire qu'il dansait avec, tant elle se trémoussait de manière étrange et peu synchrone. Toutefois, Cherry brillait de mille feux. Et c'était peu de le dire. Elle aurait même éclipsé la lune si on lui en avait donné l'occasion. Sa robe en lamé argent moulait son corps de manière très subjective, miroitante. Envoûtante. Elle était effectivement stupéfiante.

Non loin d'elle, mais pas trop près, Selena, portait un fourreau noir en satin, agrémenté d'une seule touche de rouge au niveau de l'encolure très, très, très décolletée. Ce qui n'était pas pour déplaire à Quinto qui louchait sur ses seins de manière peu discrète. En fait, tous les garçons aux alentours louchaient sur ses seins.

Jack se mit à filmer les deux filles avec délectation. Car elles avaient beau avoir de magnifiques atours, elles n'étaient pas encore des femmes. Elles n'en avaient ni l'assurance, ni l'aplomb. Cherry se trémoussait de façon plus vulgaire que sexy, et Selena tentait de ne pas laisser échapper ses seins à chaque fois qu'elle faisait un mouvement brusque.

˗ Et bien jeune fille ? Je ne t'ai pas vu danser ? Où sont donc passés tes amis ?

Genna se trouvait près d'elle, deux verres de soda à la main. Elle lui en tendit un, tout en buvant une gorgée du sien. Sa mère avait déduit que son cavalier faisait partie du club. Or, elle avait vu tous les garçons avec d'autres filles que la sienne. Elle était donc curieuse de voir le jeune homme que sa fille ne lui avait pas encore présentée. Se demandant aussi pourquoi elle ne l'avait pas fait.

˗ C'est-à-dire que... il danse avec quelqu'un d'autre pour le moment parce que je filme.

˗ Et bien cesse de filmer, veux-tu ! Je pense que Martha n'a pas besoin de voir l'intégralité du bal ! Amuse-toi ! Ma chérie ! Tu as gagné des olympiades, tes résultats sont plus qu'excellents... Qu'attends-tu pour enfin relâcher la pression ! Amuse-toi ! En plus, cette robe est faite pour danser... Tu te souviens ?

Elle se souvenait parfaitement.

Sa mère avait raison. Mais comment trouver un cavalier qui n'aurait pas peur de se faire refaire le nez ou les dents par Hunter Stafford ? À moins que... Après tout, ce ne serait que justice... Sans compter que Martha serait contente d'elle. Surtout si elle se débrouillait pour abandonner son cavalier quelques notes après la fin de la danse...

C'est à ce moment-là que le groupe de pop s'arrêta de jouer pour faire une pause. L'animatrice de la soirée annonça une valse en laissant un peu de temps aux danseurs pour se choisir des cavalières et des cavaliers. Hunter se trouvait à quelques mètres en train de parler avec Christopher. Cherry n'était pas en vue. C'était le moment.

Jack inspira à fond, donna caméra et soda à sa mère et avança avec détermination vers le garçon.

Christopher la vit avant Hunter. Le grand gaillard toussota et s'inventa une excuse pour s'éclipser. Hunter se tourna vers elle tout sourire.

˗ Bonsoir Mlle Wilson, s'empressa-t-il de dire avec un ton amusé. Vous êtes stupéfiante, ce soir.

˗ C'est ça, oui. Pour ce que ça sert, hein ? Bon. Puisque grâce à toi, je fais la potiche depuis le début de la soirée, il va falloir que tu donnes de ta personne, dit-elle toujours aussi déterminée et refusant d'entrer dans son jeu de politesse guindée.

˗ Pardon ? Donner de ma personne ? Serait-ce une proposition malhonnête, Mlle Wilson ? dit-il avec son demi-sourire de tombeur.

˗ C'est ça, continue de faire le malin ! Ma mère est derrière. Elle pense que j'ai un cavalier pour ce bal. Je me voyais mal lui raconter ton acharnement à m'empêcher de vivre une vie amoureuse épanouie et sereine. Donc, maintenant, il faut que je danse avec un garçon fissa pour éviter un drame. Remarque, je pourrais peut-être tout lui raconter. Là, maintenant. Je suis sûre que tu adorerais faire ton numéro de charme à ma mère... Mais je te préviens, elle n'est pas du genre à se laisser embobiner !

˗ Comme sa fille.

˗ C'est ça. Tu as tout compris. Tu connais la valse ?

˗ Si je connais la valse ? se contenta-t-il de dire en lui donnant son bras pour l'entraîner vers la piste.

Les première notes résonnèrent dans la salle, et les couples se mirent à danser. Hunter se révéla être un cavalier exemplaire. Elle se laissa donc conduire avec un plaisir grandissant, sans remarquer que la piste s'était clairsemée, et que le couple qu'elle formait avec Stafford attirait l'attention.

Elle savourait le sourire de sa mère aperçut le temps d'un tour. Elle savourait le plaisir de la danse. Elle savourait le moment.

Pour un peu, elle aurait presque oublié avec qui elle dansait et pourquoi, précisément, Hunter Stafford était son cavalier.

Et puis, la valse s'acheva. Les couples se séparèrent en discutant, en riant. Hunter la tenait toujours fermement. Il la fixait de ce regard intense et cet air sérieux qui à chaque fois manquait de la faire chavirer.

Heureusement pour elle, parmi la foule qui vint bientôt envahir la piste et dissimuler le couple, il y avait Cherry et sa robe étincelante. Et on pouvait compter sur la vampire pour casser l'ambiance. La blonde, furieuse et prête à mordre, sépara les deux danseurs avec une certaine force. Elle allait ouvrir la bouche pour insulter Jack quand cette dernière la fit taire d'un geste. Genre parle à ma main.

˗ Je te le laisse ! De toute façon, il a rempli sa part. Je n'ai plus besoin de lui.

Et elle les planta là, sans plus de cérémonie.

Elle ne vit pas l'air furieux de Cherry.

L'air curieux de Hunter.