Putain de Boss 2

Chapitre 63

Nous sommes donc rentrés de lune de miel le mardi 10 juillet, et dès le lendemain, nous étions sur le pont avec une montagne de travail à rattraper. Alex croule littéralement sous les dossiers en retard. Même si Rémi et son père ont plutôt bien géré, il y a des choses qu'ils ne pouvaient pas faire et qui s'accumulent avec le travail habituel. Résultat, il a dormi au travail mercredi et jeudi et j'ai fait beaucoup d'heures sup' bénévoles en soutien (finir à 18h30 au lieu de 17h, c'est pas la mort non plus). J'avoue que ça m'arrange un peu d'un côté car du coup, il n'est pas très entreprenant physiquement parlant, et je vous rappelle que jusqu'à reprise de ma pilule et fin de mes règles, ce sera ceinture. Enfin, il faudrait déjà qu'elles commencent ...

Je n'ai toujours pas pu voir mes colocs mais nous corrigerons ça dès ce soir pas un traditionnel apéro du vendredi ! Il me tarde. Le retard est maintenant plutôt bien rattrapé, Alex pourra donc se dégager sa soirée.

Je suis tellement contente de retrouver mes amis. Ils sont tous là ! Enfin tous les parisiens, Ben, Sophie (en même temps on fait ça chez eux !), Emma et Julien et Marie et Rémi. La soirée se passe bien, comme d'habitude, ambiance bon enfant du début à la fin. Le seul petit truc, c'est que j'ai préféré éviter de boire au cas où ... je ne sais même pas ce qu'il me prend. Je suis sûre que mes règles vont finir par arriver. Sauf que bien sûr, mon verre vide d'alcool a fait beaucoup parler, ce n'est clairement pas dans mes habitudes. Mais je pense qu'ils ont gobé ma double excuse avançant un trop plein d'alcool au Cap Vert et un petit virus probablement attrapé dans l'avion (on n'en parle pas assez de l'air climatisé dans les avions !) me rendant maladoune. Au risque de me répéter, je suis sûre que mes règles vont arriver ! J'ai toujours un peu mal au bide, je sens que ça travaille là-dedans, depuis 7 jours ... Mais c'est normal, c'est juste qu'après des années de pilules sans les avoir, mon corps n'a plus l'habitude. Elles vont arriver !

6 jours post lune de miel : toujours rien. Ça travaille toujours, elles vont arriver c'est sûr !

10 jours post lune de miel : toujours rien. Bon c'est quand elles veulent là ! Je veux bien rester positive mais il faudrait quand-même que ça commence. Je me raccroche à l'espoir simple qu'un cycle c'est 28 jours. J'ai commencé à oublier ma pilule le jour de mon arrivée en Bretagne, donc le mercredi 20 juin, on est aujourd'hui le samedi 24 juillet, 31 jours se sont donc écoulés. Ça fait un cycle long, mais bon, ça reste possible, c'est sûr, aujourd'hui ou demain ça va saigner ! Je ne sais même pas pourquoi je fais une telle fixette. Si ça se trouve, je suis juste ménopausée avant l'heure ! Ça serait cool, aucun risque de tomber enceinte, jamais, et plus besoin de contraception !

12 jours post lune de miel : toujours rien. Je ne veux pas en parler. Mon excuse du cycle long ne tient visiblement pas la route. Pourtant il doit bien y avoir une réponse. Non, je vous vois venir, « elle est enceinte », je parle d'une réponse autre que celle-ci. Le problème c'est que moi non plus je n'en vois pas. Je craque donc et fais un crochet par la pharmacie avant de me rendre au travail. Evidemment, je suis maintenant en retard puisque la pharmacie ouvre à 9 heures et ma fiche de poste indique que je dois servir le café au responsable de mon retard à 8h30. En plus, je m'arrête aux toilettes en arrivant au travail, à ce stade je ne suis pas à 5 minutes près.

Ma relation avec Alex n'est évidemment pas au top en ce moment, il est beaucoup accaparé par son travail et quand il essaye de se dégager du temps pour nous, je l'évite. C'est plus fort que moi. Mais ça va aller, le test va dire « pas enceinte » et tout ira mieux, je recommencerai ma pilule dès ce soir, tant pis si je n'ai pas eu mes règles, et dans trois jours on n'en parlera plus.

Sauf que ce satané test met vraiment longtemps à donner sa réponse ... ou alors c'est moi qui suis impatiente ?! Bon dans tous les cas, je n'y tiens plus, je décide donc de le fourrer dans mon sac et d'aller préparer son café à Alex, je regarderai une fois là-haut. Je pose donc la tasse sur mon pupitre, normalement le résultat doit s'être affiché maintenant. Ah ça pour être affiché, il est affiché, et ça n'est pas du tout ce à quoi je m'attendais. Il est marqué « enceinte ». Enceinte. L'écran doit forcément être cassé au niveau du « pas ». Comme j'avais été prévoyante, j'avais acheté deux tests, des fois que le premier soit défectueux. Je sors donc le deuxième, sur lequel j'ai également fait pipi tout à l'heure. Je ne vous raconte pas la galère, un petit jet pour commencer dans la cuvette, puis un jet sur le premier, un jet sur le deuxième, puis on finit le pipi et ensuite on recapuchonne tout ça et on va bien se laver les mains car évidemment, on s'est pissé dessus au passage. Mais vous vous en foutez, vous voulez juste savoir ce qui est indiqué sur ce deuxième test. Deux barres ... voyons voir la notice ... deux barres ... enceinte.

Mes jambes ne me portent plus et je manque de tomber, entrainant par contre la tasse de café vers le sol. Je ne peux pas être enceinte. Enfin surtout, je ne VEUX PAS être enceinte. Je déteste les enfants, sauf Gabychou et la nièce et le neveu d'Alex. Quoi ?! Si j'en connais d'autres ? Non ! Mais je n'ai pas besoin d'en connaître pour savoir que je les déteste. C'est sale, bruyant, chiant, ça prive de sommeil et de liberté ... Il vous faut d'autres arguments ? Ça pleure pour un rien, ça empêche de partir en vacances, je peux encore vous en donner plein ! Alex sort de son bureau, probablement attiré par le bruit.

- Eh alors Madame Miller, on est en retard et en plus on renverse le café ? J'espère que vous avez une bonne excuse ! D'autant que je sais pertinemment que ce matin, votre mari n'est pas en cause !

- ...

- Ma puce ça va ?

Mais non ça ne va pas. J'ai un parasite qui grandit en moi, me pompe ma vie, et s'il est là c'est à cause de toi. Comment ça pourrait aller ? Je ... je ...

J'attrape mon sac et fourre les tests dedans et je pars, le plantant là, sans aucune explication. Je fonce à notre appartement. Alex n'arrête pas de m'appeler. Je ne supporte plus cette vibration incessante et j'éteins mon téléphone. J'attrape ma valise et fourre un maximum de mes affaires dedans puis je pars.

J'erre dans les rues parisiennes, traînant ma valise comme un boulet, et finis par atterrir à la coloc. J'entre dans l'appart, décidée à me terrer là jusqu'à ... je ne sais même pas jusqu'à quand. Ben et Sophie me regardent avec de grands yeux, et c'en est trop, je n'arrive plus à respirer, j'ai besoin d'air, mes jambes me lâchent cette fois complètement et je tombe. C'est alors que les larmes et les cris que je retiens depuis si longtemps passent mes barricades, je suis complètement effondrée. Je sens les bras de Ben m'entourer, et je suis soulevée et portée jusque dans mon lit.

- Nono, je suis là, dis-moi ce qu'il se passe.

Mais je n'arrive qu'à pousser un cri horrible.

- Chut, respire, je suis là. Prends ton temps.

Je mets une éternité à me calmer, je veux lui raconter, mais je n'y arrive pas. Je ne peux pas le dire. Tant que je ne le dis pas, ça n'est pas réel. Pourtant il va bien falloir que je m'y fasse. Je vais avoir un enfant. Bordel de merde. Est-ce qu'on peut détester ses propres enfants ? Il reste bien la solution de l'avortement, mais je ne l'envisage même pas. Pas que je sois contre l'avortement, loin de là, mais pas pour moi, pas dans cette situation ...

- Avec Alex ... on ... il ...

Et j'éclate de plus belle.

Un petit tour dans la tête de Ben

Je confie Noémie à Sophie, ce mec, je vais me le faire. Il l'a trompée. Ça fait à peine un mois qu'ils sont mariés et il a été fourrer sa queue ailleurs. C'est sûr, pourquoi Noémie serait-elle dans un tel état sinon ? Pourquoi aurait-elle pris une si grosse valise ?

Comment peut-on faire ça à Noémie ? Enfin, faire ça tout court, mais encore plus à Noémie ... Quand je pense que je l'ai poussée dans ses bras. Ma Nono ... Je vais la lui couper sa petite bite de mes deux, fini la belle vie. Et je vais lui crever ses pneus. Et surtout, je vais lui démonter sa sale face de mec parfait.

Mon téléphone sonne et je vous le donne en mille, c'est le connard. En plus il a le culot de m'appeler ?!