𝐶ℎ𝑎𝑝𝑖𝑡𝑟𝑒 18

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THALION

"Attends, tu l'as réellement suivi dans la forêt parce que tu avais peur pour elle? Thalion mais qu'est-ce qui est en train de t'arriver?" ricane Kolker à mes côtés, me tapant l'épaule.

Je grogne faiblement, resserrant mon emprise sur le manche de mon épée. Nous marchons en troupe en direction du cri que nous avons entendu après nous être fait poursuivre. Seulement, nous ne ressentons aucune aura malsaine, et il n'y a encore moins d'odeurs nauséabondes.

"Je n'ai pas eu peur. C'est surtout pour Björn que je suis allé dedans." je lui réponds, regardant autour de moi. "Et puis d'ailleurs, j'ai fait mon rôle de protecteur jusqu'au bout."

"Tu insinues quoi? Que je suis un mauvais protecteur?"

"Tu as laissé le fils de Garik se noyer." je lui dis, haussant les sourcils.

"Il avait craché sur mon visage, c'était légitime!"

"Et alors? J'ai arrêté de compter le nombre de fois où Avela a essayé de me frapper ou de me tuer."

"C'est différent."

"En quoi?"

"C'est comme un jeu pour vous." m'explique-t-il. "Tu aimes la provocation et les problèmes. Avela n'est qu'une distraction pour toi de tes vraies occupations. Si elle n'était pas là, tu t'ennuierais."

Je grogne faiblement, tournant la tête vers l'arrière. Björn marche silencieusement, complètement rongé par l'inquiétude. Je le comprends mais je ne veux pas avoir de la peine pour lui; il a littéralement giflé Avela sans aucune gêne devant de nombreux soldats. Jamais je ne l'ai vu agir avec autant de violence envers sa famille. Lui qui est pourtant un général semble agir avec des gestes bien trop étranges.

"Tu crois vraiment qu'une fille s'est faite dévorée?" me demande Tennox, s'arrêtant à nos côtés. "Il n'y a rien. Ce n'est que de l'herbe et rien d'autre. Et si c'était une allusion auditive?"

"Donc quoi, les elfes gris nous ont manipulé en utilisant des bruits terrifiants afin de nous distraire? Je ne pense pas que les démons leur ont donné de tels pouvoirs." je lui réponds.  "Je suis certain qu'une jeune fille s'est aussi fait attaquer."

"Thalion."

"C'est le solstice. Nous n'étions pas seuls dans cette forêt."

"C'est toi qui le dit." soupire Kolker. "Mais en attendant, on rate une fête extraordinaire."

Nous continuons d'avancer, nos mains restant sur la garde de nos épées. Le fait de ne pas entendre les arbres battre autour de nous augmente considérablement mon inquiétude. Je n'ai pas l'impression d'être chez moi ici. 

Sur les terres des enchanteurs, à Fellicallit, les arbres chantent constamment. Ils servent de berceuses aux enfants et permettent aux sages de méditer. Mais ici, je n'ai pas l'impression qu'ils soient en communion avec les elfes. La preuve en est qu'à quelques mètres seulement, ils meurent.

"Il y a quelque chose là-bas!"

Je relève subitement la tête vers deux guerriers de la Grande Armée en train de courir, des torches dans les mains. Je resserre mon emprise sur mon épée et les suit en courant, Björn restant en retrait. Nous courons dans les hautes herbes, effleurons les petits ruisseaux de nos bottes avant de nous arrêter devant une masse allongée au sol.

Seulement, ce n'est qu'une vision cauchemardesque se trouvant ici.

Je déglutis en regardant ce corps, décapité. La tête de la jeune femme est à quelques centimètres seulement, la bouche grande ouverte et le sang s'échappant de ses lèvres. Il lui manque des parties de corps, certaines se trouvant complètement déchiquetées. Je sens mon cœur battre de plus en plus rapidement et sans que je ne puisse m'en empêcher, je me penche sur le côté pour vomir. Toutes mes tripes sortent, libérant l'angoisse et l'horreur bloquée en moi.

Nos âmes destinéesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant