𝐶ℎ𝑎𝑝𝑖𝑡𝑟𝑒 8

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AVELA

Nous n'avons pas prononcé le moindre mot lorsque nous sommes retournées en fin d'après-midi au manoir. Björn est heureusement absent et n'a pas encore prit connaissance de tout ce qui s'est passé au salon de thé. Mais je suis certaine que les rumeurs vont rapidement se propager et quand il rentrera à la maison je vais profondément subir sa colère.

Et je suis certaine qu'elle sera dévastatrice.

Lorsque nous poussons la porte de la maison, nous n'avons le temps que d'apercevoir notre tante se ruant vers nous. Dans ses yeux, une profonde inquiétude prend place et la main plaquée sur sa bouche, elle nous détaille de haut en bas; s'attardant sur nos robes tachées de sucre et de sang, sur les bouts de verre enfoncés dans mes paumes, et nos mines épuisées. En s'avançant, elle prend mon avant-bras droit où se trouve encore la marque du fouet. Elle continue de me brûler mais je fais semblant de ne pas ressentir cette douleur.

"Rosamund, allez chercher des feuilles d'Anthelios, une grande bassine d'eau chaude et des bandages." ordonne-t-elle, la voix tremblante.

Je relève légèrement la tête pour regarder la fée dans l'entrée du salon qui nous détaille, le visage impassible.

"Oui Madame."

Lorsqu'elle nous tourne le dos, j'imagine sa réaction intérieure; je suis certaine qu'elle doit être profondément blessée et vexée de la manière dont j'ai agi cette après-midi. Elle doit forcément le savoir, les fées s'échangent des mots bien trop rapidement.

Tisha prend nos mains et nous guide dans le salon. Nous nous asseyons sur l'un des canapés, écoutant attentivement les pas rapides des fées complètement paniquées. Belia s'assoit un peu plus loin que moi alors je m'installe à son opposé en tailleur, attendant les remarques que nous devrions avoir face à mon attitude de l'après-midi. Tisha, tremblante, s'assoit sur ses talons en face de nous, nettoyant nerveusement le dessous de ses ongles.

"Les gens parlent..."murmure-t-elle.

Je détourne aussitôt la tête vers l'un des murs de la pièce afin d'essayer de trouver une nouvelle distraction.

"Je ne sais pas ce qui s'est passé et je ne veux pas le savoir car je sais que tu t'énerves vraiment en cas de nécessité, mais je vous demande à toutes les deux de réfléchir à vos actes."

"Je n'ai rien fait."réplique aussitôt Belia. "C'est Avela qui s'est jetée sur elle comme une..."

"Belia, tu arrêtes. À ce que je sache je t'avais demandé de ne pas l'emmener dans ce café et tu as recommencé. Tu es autant fautive de ce qui s'est passé."coupe froidement ma tante.

Je regarde rapidement du coin de l'œil ma cousine qui fronce désormais les sourcils. Elle croise les bras, s'enfonçant un peu plus dans le canapé. Tisha ne dit plus un mot car la fée revient rapidement auprès de nous, une grande bassine d'eau bouillante dans ses mains, des torchons sur ses avant-bras ainsi que des bandages, puis posés dessus, des feuilles d'Anthelios.

Elle s'installe à côté de ma tante, se plaçant à genoux devant Belia tandis que ma tante se met devant moi, prenant soigneusement l'une de mes mains.

Elle touche du bout des doigts les morceaux de verre. Aussitôt la douleur devient horrible et j'essaye de me retirer de son emprise mais elle m'attrape le poignet de sa main palmée. Ses yeux blancs se relèvent vers les miens. Autrefois, il me terrifiait.

"Excuse-moi." je lui murmure.

"C'est une réaction normale." me répond-elle, baissant la tête vers ma paume.

"Je ne parle pas de ça."

"Je sais, moi aussi. Si une personne venait à m'insulter et à dénigrer ma race, j'en viendrais moi aussi aux mains. Je ne t'en veux pas. Avela."

Nos âmes destinéesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant