6. A côté du papillon

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6.

J'ouvre un œil, puis un autre, mais les referme aussitôt. La lumière dans la chambre et vive et se reflète sur chaque mur, chaque meuble clair. Et malgré la bulle cotonneuse qui m'arrache un sourire, mes yeux mettent encore quelques minutes à s'habituer au jour.

Lorsque je comprends où je suis, je suis à nouveau apaisée. Cette chambre est juste géniale, un écrin de douceur. Et j'aimerai bien y rester toute la journée.

-Petit-déjeuner !, dit une voix lointaine que je reconnais immédiatement.

-J'arrive !

Je saute du lit, trop contente de commencer cette nouvelle journée et les suivantes avec quelqu'un pour qui je suis la bienvenue.

J'attrape un pull et un short et dévale les escaliers, sentant déjà la bonne odeur de café.

-Tu n'es pas allergiques aux croissants ?, dit le vieil homme en peaufinant la table de la salle à manger. C'est Robert qui les fait, ils sont à se damner.

-Les allergies sont un peu votre obsession non ?, m'amusais-je en m'installant à table.

-Je ne voudrai pas empoissonner la seule invitée que j'ai eue ici depuis des années !

Il me verse le café brûlant dans la tasse déjà devant moi, et je m'empresse de me jeter sur un croissant dans la panière au milieu de la table.

-Je vous préviendrai avant de faire un choc anaphylactique.

-Un quoi ?

Je le regarde, fronçant les sourcils, et comprends que parfois, mes reflexes prennent le dessus.

-Une réaction, ou quoique ce soit..., me surpris-je à sourire.

Je mords avec envie dans le croissant et manque de tomber à la renverse. Je regrette aussitôt de n'avoir pas plus tôt céder à l'envie de goûter les délices de Robert.

-C'est...

-N'est-ce pas, hein ? Je me force à aller les chercher tous les matins. Ils m'ont bien proposé de me livrer à la maison, mais ça m'oblige à sortir et à voir du monde...

-Vous avez bien raison, vous êtes jeune et vaillant, profitez-en !

Il retient un rire dans son café, et je remarque qu'il est déjà bien habillé et frais comme un gardon.

-Quelle heure est-il ?, demandais-je alors.

-Quelque chose comme onze heures je crois.

-Onze heures ? Et vous déjeuner toujours aussi tard ?

-Non. Mais tu dormais paisiblement et tu semblais bien avoir besoin de repos...

-Et vous m'avez attendu ?!

Il hausse les épaules comme un enfant pris sur le fait. Je me contente de sourire et secouer la tête, flattée qu'on puisse ainsi prendre soin de moi.

-Alors, tu vas aller chez David ? dit-il en esquivant mon regard et reprenant un croissant.

-Vous écoutez aux portes ?...

-Je suis la mémoire de la ville, rappelle-toi..., tente-t-il de se justifier dans un clin d'œil.

-Humhum...

-Alors, tu y vas quand ?...

-Je... Je pensais plutôt aller visiter un peu les champs de Tom, histoire de ne pas arriver demain comme une débutante...

-Et ne pas aller voir David ?

-...Et ne pas aller voir David, oui.

-Pourquoi ?

A côté du papillonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant