2. La serre

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2.

J'ai pris le temps de défaire mon sac, plaçant mes quelques vêtements dans la commode dont chaque ouverture de tiroir est une épreuve. Et après avoir fait plusieurs fois le tour en devant me rendre à l'évidence, je vais retrouver Martha dans la salle à manger, timidement.

-Déjà fini ?, dit-elle en versant le thé brûlant dans les tasses.

-Je n'avais pas grand-chose...

Winston soupire, et voyant que nous sommes installées, se dirige vers la porte.

-Bien, je vous laisse alors si tout va bien !

-Merci encore du fond du cœur pour votre aide, lui dis-je les yeux emplis de reconnaissance.

-Il n'a que ça à faire, de toute façon, grommelle mon hôte aigrie.

Winston soupire et me fait signe de la tête qu'il ne faut pas se formaliser du caractère de la vieille dame avant de passer la porte.

La femme s'installe face à moi, et après avoir attendu vainement son invitation qui ne vient pas, j'en fais autant.

-Si j'ai accepté votre venue, c'est juste pour avoir un petit coup de main à la maison quelques jours, dit-elle sans me regarder.

-Bien sûr, avec plaisir...

Et me voilà transformée en l'esclave d'une vieille femme ronchonne.

-Et comme je vous ai dis, ce n'est pas pour une éternité hein...

-Ne vous en faites pas, je n'en ai pas pour longtemps...

Elle ne relève pas, et fixe toujours le vide devant elle. M'a-t-elle seulement regardé une seule fois ? J'en doute... Je fais de mon mieux pour ne pas me formaliser, et trempe à mon tour les lèvres dans le liquide brûlant.

Un long moment, un silence gênant règne entre nous jusqu'à ce qu'enfin, elle daigne le briser.

-Alors vous êtes venu faire quoi ici ?, demande-t-elle enfin.

-Je... Me reposer... Simplement me reposer un peu...

-Et bien, vous ne pouvez faire que ça ici, de toute façon.

Elle se lève dans un effort, et retourne à la cuisine.

-Vous pouvez faire comme chez vous, mais pas de bordel, hein. Vous ferez vos propres courses, et vous pouvez aller dans la cuisine, le salon et votre chambre, mais c'est tout, dit-il depuis la pièce voisine.

Je me mets à songer qu'il ne semblerait pas y avoir beaucoup d'autres pièces quoiqu'il en soit, à part peut-être sa chambre à elle.

-Bien sûr, me contentais-je de répondre.

-Vous pourrez passer le balai et la serpière pendant votre séjour.

Bah voyons... Me voilà reconvertit en Cendrillon. Je me contente de secouer la tête en levant les yeux au ciel.

-Et ne cherchez pas à me faire la conversation, je n'en ai pas besoin.

-Pas de souci, murmurais-je.

J'entends seulement la porte grincer en guise de réponse. Fronçant les sourcils, je me lève et viens voir ce qu'il en est. Par le filtre adoucissant de la moustiquaire, je l'aperçois sous le patio, installée dans son fauteuil, et fermant les yeux dans un soupir.

Un instant, je m'en veux de me dire qu'il ne manquerait plus qu'elle ne passe de vie à trépas pendant mon séjour ici. Mais je me contente de soupirer, comprenant bien que ce n'est pas aujourd'hui que je pourrai poser quelques questions ou même simplement passer une première soirée agréable.

A côté du papillonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant