15 - Verdict

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Les délibérations de Farouk et du comité de juges durèrent toute la journée du lendemain. Ophélie ne pouvait s'empêcher de faire les cent pas dans le salon où ils s'étaient tous rassemblés pour attendre, son écharpe claquant dans l'air, atteinte par l'inquiétude de sa maîtresse. Thorn, debout contre un mur, paraissait, à son habitude, impassible et plongé dans ses réflexions intérieures. Berenilde essayait de cacher son anxiété en dessinant avec Victoire et Roseline louvoyait entre les sièges pour proposer de remplir les tasses de thé. Archibald était fidèle à lui-même et jouait négligemment avec son gibus, couché sur un canapé avec les pieds posés sur la table basse. Même le chat Andouille paraissait ressentir la tension ambiante et ne parvenait pas à dormir.

Quand à un énième passage dans la pièce Ophélie se prit les pieds dans le tapis et trébucha en emportant une partie du service à thé, elle ne put s'empêcher d'exprimer ses doutes à haute voix.

- Mais enfin, ça ne devrait pas leur prendre autant de temps pour arriver à une décision! La situation est claire!

Tous les regards se tournèrent vers elle, seul Archibald osa lui répondre.

- Le sablier de la justice s'écoule lentement. Ne vous inquiétez pas, nous serons prévenus au moindre changement.

Les avocats de Berenilde étaient en effet restés à la cour pour suivre l'évolution des débats.
Thorn s'approcha d'Ophélie qui était restée immobile au milieu des débris de tasses. Sa voix s'éleva soudainement.

- 12 heures et 45 minutes.

Ophélie le fixa en fronçant les sourcils, attendant une explication.

- C'est le temps moyen des délibérations pour un procès de ce type. Rien d'anormal.

- Notre ex-intendant et son amour des chiffres. Tout un poème ! Pouffa Archibald.

- Les chiffres au moins sont fiables, eux, répondit durement Thorn.

Ophélie dévisageât d'un regard sévère tour à tour les deux hommes.

- Vous êtes aussi intenables l'un que l'autre!

Thorn parut vexé d'être comparé à l'ancien ambassadeur, qui de son côté riait à en perdre haleine. Berenilde essaya de calmer la situation.

- Nous sommes tous inquiets et impatients de connaître le verdict. Et si nous trompions l'attente en faisant une partie de cartes?

La tension retomba sur la pièce, alors que le téléphone de l'entrée se mettait à sonner. Un valet entra dans le salon et leur transmit le message qui venait d'arriver. Ils étaient attendus dans les étages de la Citacielle.

Une heure plus tard, toute la compagnie se trouvait à nouveau sur la Jetée-promenade. Ils furent introduits dans la salle de la Roulette, où régnait un silence absolu. Farouk, entouré du ministre de la justice et d'une poignée de juges, fit signe à Thorn de s'approcher. L'esprit de famille prit un document qu'il lut avant d'annoncer de sa voix molle.

- Au vu des témoignages fournis pendant le procès, pour les charges de meurtre, de trahison et d'évasion pesant contre le demi-dragon-chroniqueur Thorn, nous sommes parvenus à un verdict non coupable.

Ophélie, qui avait sans s'en rendre compte retenu sa respiration depuis l'entrée dans la salle, expira de soulagement.

- Pour votre situation plus personnelle, je vous accorde la reconnaissance de votre droit de naissance au sein du clan des Dragons, dont vous êtes désormais le dernier héritier mâle.

Berenilde ne put retenir une exclamation de joie et de surprise. Farouk tendit le compte rendu à son aide mémoire, et ajouta :

- Vous pouvez nous laisser maintenant.

La passe-miroir : conclusion (alternative)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant