Chapitre 32 : Marlon

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Je l'aidais à s'allonger, une fois, sa quinte de toux passée. Il n'était plus possible pour moi d'ignorer son besoin de voir un médecin. Elle devait retourner à l'hôpital. Cela était impératif. Elle a bien essayé de me dissimuler le mouchoir mais j'avais eu le temps d'entrapercevoir le sang. Ne se rendait-elle pas compte à quel point cela était alarmant ?

Je la couvrais jusqu'au cou et sortais de sa chambre. J'allais m'installer sur le canapé de la suite que je nous avais réservé sur le chemin, afin de lui offrir un peu plus de confort et appeler la réception.

- Bonjour, que puis-je faire pour vous ?

- Faites venir un médecin à notre chambre.

- Est-ce urgent, Monsieur ?

- Si je vous demande un médecin, c'est que c'est urgent, grognais-je entre mes dents.

Le silence m'accueillit.

- Tout de suite, gueulais-je avant de raccrocher.

Je reposais le combiner et me passais une main sur le visage. J'essayais de relativiser, de ne pas laisser la colère, provoquer par la panique, prendre le contrôle de moi mais cela était difficile. Je n'avais jamais expérimenté la peur de perdre l'un des miens. Cela était commun d'enterrer les nôtres. Cependant, la situation était différente. Il ne s'agissait pas d'un de mes hommes. J'avais une boule dans l'estomac, très désagréable. J'étais clairement très inquiet pour elle. Il ne fallait pas qu'elle disparaisse. Je me maudirais presque d'être l'instigateur de tout ceci.

Je savais ce qui me fallait faire. J'aurais dû l'endormir et l'emmener à l'hôpital. Seulement, elle aurait pu m'en vouloir et fuir l'établissement sans en avertir qui que ce soit. C'était un risque que je ne pouvais me permettre. Elle était tellement butée à vouloir finir ce voyage, qu'elle en oubliait sa faiblesse. Son esprit la trompait sur ses capacités. Aussi, je comptais sur le doc pour la convaincre que son état ne lui permettait plus de poursuivre dans cette direction.

Après dix minutes, je ne tenais plus. J'allais reprendre le combiner pour presser le personnel afin qu'ils rappellent leur médecin mais mon téléphone personnel retentit avant que je n'aie pu tendre le bras.

- Ouais ?

- Ça va ?

Je soupirais. Je devais me douter que ma sœur ne pourrait pas tenir jusqu'à mon retour.

- Qu'est-ce que tu veux ?

- Savoir comment vont mon grand frère et sa copine, joua-t-elle d'une voix extrêmement énervante.

- Je vais bien, ce qui n'est pas le cas de Kasia.

- Pourquoi ? Qu'est-ce qu'elle a ?

- Son état s'aggrave. J'attends un doc pour qu'il la convainc de retourner à l'hôpital.

- Elle y est préparée, Marlon. Elle avait connaissance des conséquences.

- Ce n'est pas une raison pour la laisser faire quand les choses se compliquent.

- Je sais, soupira-t-elle, mais c'est son choix, Marlon. Elle a le droit de quitter cette vie de la façon qu'elle a choisie.

- Il en est hors de question, gueulais-je.

- Raisonne-toi. C'était ce que je craignais. Tu t'es trop attachée à elle. Je t'avais dit de faire attention à toi.

Des coups retentirent à la porte de la suite me coupant dans une réplique bien sentie, contrant ses paroles perturbantes.

- Il faut que je te laisse, prévins-je en raccrochant.

Je me levais précipitamment et ouvris la porte pour tomber sur un homme d'une trentaine d'années, portant une mallette.

- Docteur Muller, se présenta-t-il d'un air guindé.

- Elle est dans la chambre, le laissais-je entrer.

Il se dirigea vers la porte fermée que je lui avais indiquée et entrai sans plus de cérémonie. Il resta, un instant, immobile, les yeux rivés sur elle avant porter un regard interrogateur sur moi.

- Elle a une déformation cardiaque. Elle ne va pas bien mais refuse de retourner à l'hôpital, me dédouanais-je.

Le médecin souffla, exaspéré, puis s'avança jusqu'à elle. Il repoussa, doucement, les draps pour attraper son poignet.

- Son pouls est stable, quoi que légèrement faible.

Il ouvrit sa sacoche et en sortit un stéthoscope. Il fronça les sourcils après quelques secondes de sonde.

- Tout va bien ?

Il continua à écouter sans me répondre, ce qui eut le don de m'énerver.

- Je vous parle !

- Elle a besoin d'être prise en charge, dit-il en sortant son téléphone portable.

- Je le savais déjà ça.

- Pourtant, vous n'en aviez rien fait, m'accusa-t-il.

- À quoi bon ? Vous ne la connaissez pas.

- Mais je connais mon métier.

- Que se passe-t-il ? nous interpela une voix endormie.

Je quittais du regard cet effoiré de médecin pour me concentrer sur la jeune femme qui se réveillait doucement. Je m'approchais d'elle, en repoussant le doc.

- J'ai fait venir un médecin.

Cela eut bon de la réveillée complètement.

- Pourquoi as-tu fait ça ? s'énerva-t-elle.

Muller en profita pour prendre sa tension alors qu'elle tenta de se débattre pour enlever le bracelet qu'il lui avait enfilé.

- Sortez-moi ça de là !

- Laissez-vous faire, jeune fille. Vous avez besoin de soin.

- Je n'ai besoin de rien du tout, répondit-elle de mauvaise foi. Quant à toi, je pensais pouvoir te faire confiance.

- Tu m'as promis de faire attention à toi. Tu as menti. Tu t'affaiblis, Kasia. Ton cœur n'est plus suffisamment en forme pour le reste du voyage.

- Je refuse de retourner à l'hôpital, tonna-t-elle de sa faible voix.

Je lançais un regard goguenard au médecin qui nous écoutait sans intervenir. Ainsi, il pouvait comprendre à qui il avait à faire. Je me levais du lit et lui indiquait que c'était à son arrogance afficher de jouer pour la convaincre...

Trials of the heartOù les histoires vivent. Découvrez maintenant