Chapitre 39 : Marlon (Version réaliste)

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Je descendais de moto, au moment où Maylis et Sonny me rejoignaient.

Il y avait beaucoup de monde se pressant aux portes de l'église. J'aperçus, au loin, Olivia dans les bras d'Ismaël. Ils étaient entourés de plusieurs personnes de tout âge. Maylis posa sa main sur mon épaule avec un regard encourageant. Je la laissais me mener vers les parents de Kasia. Ismaël me vit arriver et écarta la foule pour venir à nous, entraînant sa femme avec lui.

- Je suis content que tu sois là, mon garçon.

- Ce n'était pas prévu, avouais-je sincèrement. Remerciez ma sœur pour ma présence. Une vraie teigne.

- Bonjour, Olivia. Je suis désolée du retard, s'avança Maylis pour prendre la mère de Kasia dans ses bras. Il n'a pas été facile à convaincre.

- Mais je vois que tu as réussi à l'emmener.

Je les observais, surpris de cette mise en scène.

- Ma femme est pleine de ressources, embrassa-t-il la concernée.

Le silence retomba dans notre petit groupe jusqu'à ce qu'un vrombissement fasse presque trembler la terre. Je me tournais vers Sonny, cherchant explication. Celui-ci leva un sourcil, un petit sourire en coin.

- Nous sommes tous unis, Boss.

Une cinquantaine de moto apparurent en file. Ils se garèrent tous sur une place centrale mais restèrent sur leurs motos.

- Eh ben... souffla Ismaël.

- Ils voulaient être là pour honorer votre fille, expliqua Sonny.

- Pourquoi ?

- Elle a été, en quelque sorte, la première femme de notre président. Elle mérite les honneurs dus à ce statut.

J'en étais surpris. Comment avaient-ils pu connaître l'histoire de Kasia ? Un coup d'œil sur Sonny m'apprit que celui-ci n'avait pas su tenir sa langue. Un nouveau convoi arriva coupant court à l'admiration de tous. Kasia arrivait et je n'avais qu'une envie. Partir. Je n'avais aucunement envie d'assister à cela. Je reculais de deux pas avant d'être rattrapé par le bras. Elle ne me laisserait pas fuir. Ce n'était pourtant pas dans mes habitudes de fuir les problèmes. Cependant, là, cela me touchait à un endroit qui n'avait pas pour habitude de fonctionner avec autant d'énergie.

Le cortège s'arrêta aux portes de l'église et les motos se remirent à vrombir. Le prêtre, prêt à officier, sursauta, aux côtés du couple endeuillé. Les transporteurs étudièrent l'homme d'Église afin de savoir s'ils devaient se mettre en action. Celui-ci hocha la tête. Ils ouvrirent l'arrière du véhicule où reposait le cercueil. La compression dans ma poitrine était loin d'être agréable à cette vue.

Je n'avais pas l'intention d'entrer dans cette bâtisse où les démons, tels que moi, n'avaient sa place. Mes frères et moi attendront, ensemble, en dehors de l'église qu'ils ressortent tous pour la mener au cimetière. Cela me permettrait de souffler.

La foule commença à se disperser pour entrer, succédant aux parents endeuillés. Terrence vint à moi, une bière à la main. Je m'empressais à l'attraper et en boire une lampée.

- Pourquoi tu ne m'as pas parler de cette nana ?

- Je ne pensais pas... j'ai payé Anton pour qu'il me trouve un cœur pour elle. Elle aurait dû vous rencontrer en personne.

- C'était peu probable d'après ce que nous en a dit Sonny et Maylis, Marlon.

- Elle n'allait déjà pas trop bien lorsque je l'ai vu chez toi, intervint ma sœur.

- Elle venait de subir une opération. C'était normal qu'elle soit faible.

- Ce n'était pas seulement ça. Tu ne voulais simplement pas le voir.

- Je le voyais mais comment lui refuser ce qu'elle désirait dans ces circonstances ?

- C'est pour ça que je t'ai poussé à la laisser décider pour elle-même, au téléphone. Elle y avait droit. Elle avait le droit à une dernière aventure.

- Inutile de refaire le passé de toute manière. Elle se trouve dans cette putain de boite en bois et je ne peux rien n'y faire, m'énervai-je en m'éloignant d'eux.

Mes mains tremblaient. Ma tête était trop pleine de souvenir. La savoir dans ce cercueil me mettait à l'épreuve. Je ressentais le besoin de prendre la route. J'avais envie d'évasion, de ne plus penser.

Cette nouvelle décision prise, je comptais quitter de nouveau la ville après la mise en terre de Kasia. Je ne savais pas où cela me mènerait mais cela était nécessaire. Je ne pourrais rien entreprendre en ayant l'esprit tant accaparer.

Je fis signe à Oren de s'approcher. Il s'exécuta rapidement.

- Boss, se campa-t-il sur ses deux pieds devant moi.

- Tu t'en ais bien sorti avec le club durant mon absence.

- Et j'assurerais le temps qu'il faudra, Curse, comprit-il de mon retour à la maison n'était pas pour tout de suite.

Je tapotais son épaule en hochant la tête.

- Si tu n'étais pas aussi vieux, et méritant la retraite, j'aurais fait de toi mon second, Oren.

- Surtout pas, ricana-t-il. Il est temps pour moi de ne penser qu'au plaisir. Terrence sera un très bon second. Il m'aide beaucoup depuis ton départ.

Je déviais le regard sur mon meilleur ami.

- Je n'en doute pas mais ne lui en dit rien pour le moment.

- Entendu. Alors, c'était vrai ? Cette petite aurait été ta femme ?

Je déglutissais bruyamment.

- Sans aucun doute.

- Ça va passer, petit. Elle sera un très beau souvenir un jour. La douleur laissera la place à la nostalgie avec le temps. Ton père est passé par là lorsque ta mère est partie.

- Il n'a plus jamais pu refaire confiance à une femme.

- Il y a une différence entre lui et toi. La petite ne t'a pas quitté. Elle est morte. Tu n'as pas à subir les mêmes tourments que ton père. Cette fille t'a ouvert la voie sur l'amour.

- Comment peux-tu penser qu'une autre pourrait la remplacer ? m'énervais-je.

- Tu n'y pense pas pour le moment mais cela ne sera pas toujours le cas. Tu rencontreras, peut-être, une femme qui te la rappellera et cela te touchera suffisamment pour que tu t'ouvres à nouveau à une femme.

Impossible ! hurlais-je intérieurement.

Il retourna en présence des anciens après ces paroles prophétiques. Je restais à l'écart jusqu'à ce que Kasia sortit de l'église. C'était dans un soupir que je me dirigeais vers ma moto, prêt à les suivre. La cérémonie terminée, je quitterais la ville, dans le vain espoir de me vider l'esprit.

Trials of the heartOù les histoires vivent. Découvrez maintenant