Chapitre 38 : Marlon (Version Romancée)

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- On l'a, entra Anton en matière. Seulement, il faut que je le transporte jusqu'à Bâton-Rouge. Il est d'Atlanta.

- Qu'est-ce que tu attends ?

- Il est déjà en route avec deux de mes meilleurs hommes.

- Combien de temps ?

- Quelques heures, tout au plus.

- Bien, raccrochais-je.

Je laissais mon dos heurter le mur, derrière moi, de soulagement. Enfin, une bonne nouvelle. Tout allait être terminé dans peu de temps. Il fallait que je me rende dans le bureau de Thomas. Il devait se tenir prêt. Je supposais qu'il devait réserver une salle d'opération. Je fonçais à travers l'hôpital pour rejoindre ses bureaux et entrais sans prendre en compte les protestations de sa secrétaire. Celui-ci était debout, au milieu de la pièce, serrant Sasha entre ses bras. On en apprenait tous les jours. Le couple sursauta à mon entrée fracassante et s'éloignèrent l'un de l'autre. Thomas bredouilla alors que Sacha lissait sa blouse, mal à l'aise.

- Pourquoi êtes-vous ici ? reprit ses esprits Thomas.

- Préparer un bloc.

- C'est Kasia ? Son état s'est encore dégradé ? se mit-il en action.

Je le retins lorsqu'il tenta de passer la porte.

- Non. Son état est toujours le même. Elle est toujours en vie grâce aux machines.

- Alors pourquoi... ?

- Vous n'allez pas tarder à recevoir un cœur compatible pour Kasia, ne m'attardais-je pas en explication, sans chercher à cacher quoi que ce soit.

- Quoi ?

- Vous avez bien entendu.

- Mais d'où...

- Ne posez pas plus de questions. Cela est mon affaire. Préparer tout ce qu'il lui faudra.

- Je ne peux pas...

- Je ne vous demande pas d'approuver mais de lui sauver la vie. Transplantez-la.

- C'est illégal !

- Ce n'est pas vous qui commettez cette faute. Vous n'avez qu'à réceptionner cet organe, comme un autre, et vous assurer qu'il est bel et bien compatible puis le foutre dans le corps de ma régulière. Alors, bougez-vous !

- Votre régulière ?

- Il arrivera d'ici quelques heures. Je suppose que cela prend du temps de tout préparer et de mettre des équipes sur le coup alors prenez votre putain de téléphone et appelez les gens qui vous aideront. Je ne me répèterais pas.

Je sortis du bureau, en ayant marre de ses questions et de son air offusquer et hésitant. Pourquoi les gens s'encombraient-ils constamment de tergiversions moral ?

De retour dans la chambre de la jeune femme, je me figeais dans l'encadrement de la porte, les yeux rivés sur celle-ci. Une sorte d'espoir nouveau m'offrit une bouffée d'oxygène. Elle allait vivre. J'avais dû renier certains de mes principes mais cela était pour la bonne cause. Un homme qui n'avait plus aucune envie de vivre avait obtenu ce qu'il voulait. Il était mort. Il faisait une bonne action en sauvant la vie de quelqu'un qui voulait, à son contraire, vivre. Kasia n'en saurait jamais rien. Ses parents n'en sauraient jamais rien. Je m'en assurerais. Pour le moment, l'importance était autre. Thomas devait s'assurer qu'Anton n'avait commis aucune erreur dans ses tests et redonner un souffle de vie à la jeune femme.

Je m'étais, peut-être, trop avancer dans le bureau du médecin en cataloguant Kasia de régulière. Elle avait été catégorique concernant d'éventuels sentiments à son égard. Cependant, cela était lorsqu'elle n'avait aucune chance. À présent, tout était différent. Je savais qu'elle ressentait des choses pour moi. J'avais pu le voir dans ses yeux à plusieurs reprises mais je ne savais pas ce que cela signifiait pour elle. Il me revenait de la convaincre alors. Elle devrait subir une longue convalescence et serait suivi à vie après son opération. Il me faudrait être vigilant avec elle. Je secouais la tête, me rendant compte que je faisais des plans sur la comète. J'allais trop vite. Il fallait que je me calme.

Ismaël et Olivia avaient le regard porté sur moi.

- Tout va bien, mon garçon ?

- Ouais.

- Je t'ai ramené un sandwich. Il faut que tu manges aussi.

Il pointa la petite table amovible de Kasia. Il n'avait pas ramené qu'un sandwich. Il avait acheté tout un commerce.

- Je voulais être sûr de ne plus avoir à sortir de cette chambre, s'excusa-t-il, presque.

- C'est une bonne idée.

L'appétit retrouvé, j'attrapais deux sandwichs au bœuf, ainsi qu'une boisson chaude et une bouteille d'eau, puis allait me réinstaller dans mon siège au moment où Sacha pénétrait dans la pièce. Elle me porta un regard inquiet avant de sourire faussement aux parents de Kasia. Elle se dirigea vers la jeune endormie et prit sa tension. Elle lui fit une prise de sang sans un mot. Elle cherchait clairement à contrôler sa nervosité.

- Pourquoi vous effectuer d'autres examens ? questionna Olivia.

Sacha me scrutait à nouveau. Elle ne savait pas quoi dire.

- C'est un simple contrôle, finit-elle par dire, au bout de longues secondes.

Je croquais dans le pain, les yeux ancrés dans les siens. Elle n'avait pas intérêt à fauter.

- Vous voulez quelque chose à manger, Sacha ? Je crois que j'ai un peu exagéré lors de mes achats, plaisanta Ismaël.

- Non... non, je vous remercie.

L'infirmière nous quitta rapidement, laissant les parents de sa patiente perplexe.

- Qu'est-ce qui lui prend ?

- Elle doit être fatiguée. Les heures d'une infirmière sont malléables et je ne me souviens pas avoir vu une autre infirmière au chevet de Kasia depuis son arrivée. Cette pauvre petite doit être épuisée, répondit le père de famille.

- Oui, tu as sûrement raison.

Olivia se reconcentra sur sa fille. Son père sur son journal. Quant à moi, je continuais à dévorer comme un ogre après plusieurs jours à me priver de viande, j'appréciais l'infime sensation du bœuf dans ma bouche. L'appétit m'avait quitté depuis trop longtemps.

La patience était de mise à présent. J'attendais des nouvelles d'Anton, qui était censée m'indiquer chaque étape qui se présentait à lui. Aussi, je recevais, durant les heures suivantes, plusieurs messages du trafiquant d'organes. Il ne lui fallait pas trainer. Il le savait. Ses connaissances me rassuraient sur le bon maintien du cœur de Kasia. Cet ancien médecin Allemand, rayé de l'ordre des médecins dans son pays, avait tout intérêt à savoir ce qu'il faisait en traitant avec des personnes comme moi, de toute manière, et il le savait.

L'attente était interminable. Je craignais que l'état de Kasia s'enfonce et qu'elle soit trop faible pour subir une opération mais mes craintes furent très vite oubliées lorsque Thomas entra, précipitamment, cinq heures plus tard, en pleine nuit, nous réveillant, avec deux infirmières.

Olivia, Ismaël, nousdevons préparer Kasia pour le bloc... Nous avons un cœur compatible...



Trials of the heartOù les histoires vivent. Découvrez maintenant