Je me garais dans la ruelle, à peine éclairer par un lampadaire, qui jouxtait l'immeuble où vivait Anton. Dossier en main, je montais les étages pour arriver devant la porte de son appartement. Voilà trois jours que j'avais pris cette décision. Trois jours où je m'échignais à obtenir tout le nécessaire dont aurait besoin cet enfoiré de Ant. J'entrais sans m'annoncer et le retrouver sur le canapé, bécotant une petite rousse aux formes généreuses. Ceux-ci se relevèrent, avec surprise, et me fixèrent alors que je m'approchais, martelant le sol de mes pas. Je laissais tomber le dossier médical de Kasia sur la table, les yeux fixés sur l'homme. Les siens tombèrent sur le dossier.
- Il y a tout ce qu'il te faut là-dedans.
- D'après ce que j'ai compris, c'est urgent.
Je ne répondis pas. Mon silence était pour lui une évidence.
- C'est une personne importante ? Une personne du club ?
Je n'ouvrais toujours pas la bouche. Premièrement parce qu'il n'avait pas à avoir connaissance de cette information pour faire son job. Deuxièmement parce que je ne savais pas pourquoi j'allais à l'encontre de mes préjugés, de mes valeurs, pour elle. Pourquoi cela était si important pour moi. Je ne me posais pas non plus la question. Je voulais tenter de la sauver. Point barre. À croire que je n'étais pas aussi pourri de l'intérieur que je le pensais.
- J'ai deux trois contacts qui pourrait valoir le coup, m'informa-t-il. Je te tiens au courant si ça pourrait le faire.
Je n'avais besoin d'entendre que cela. Aussi, je me retournais et reparti comme j'étais venu. Je ne pris même pas la peine de refermer la porte derrière moi. J'avais besoin d'un verre pour faire passer le dégout de ce que mon geste m'inspirait.
Je montais alors, de nouveau, à moto et me rendis rapidement au bar du club. J'avais prévu de me rendre à l'hôpital cette nuit mais l'idée n'était pas bonne. Je n'étais pas d'humeur à faire causette.
Je n'étais plus allé rendre visite à mon père, ou Kasia, depuis trois jours. D'après Maylis, mon père allait de plus en plus mal et n'allait pas tarder à nous quitter. Elle me reprochait d'être un connard d'égoïste pour l'abandonner de la sorte. Elle avait certainement raison sur la forme. Kasia m'avait conseillé de prendre du temps pour moi, pas de lâcher toutes mes responsabilités. Pourtant, c'était ce que je faisais depuis trois foutus jours. Je passais mes journées à dormir et mes nuits à boire, lorsque je ne montais pas un plan pour dépouiller un homme de ses organes pour sauver une inconnue. Dans la possibilité qu'Anton assure la commande, il ne fallait surtout pas qu'elle ait connaissance de la provenance de ce cœur. Je m'en étais vivement assurer. Les circonstances de « l'accident » de cet homme resteraient floues. Gentille comme elle était, elle serait capable de refuser la greffe.
Lorsque je pénétrais dans le bar, l'alcool coulait déjà à flot. La plupart des gars était déjà bourré. Les filles à moitié à poil et nos prospects complètement déborder.
Je me dirigeais vers le fond de la salle, pour plus de tranquillité, après avoir récupéré une bouteille de Rhum.
Dans un bruit mat, mes fesses heurtèrent la banquette et je débouchais la bouteille puis bus au goulot. Cette première lampée me brûla la gorge mais cela était agréable. Le rhum serait mon ami pour les prochaines heures. Il m'aiderait à encaisser le fait que je déroge à une règle primordiale de club et de nos valeurs. Ne jamais traiter avec cette pourriture d'Anton. Ma visite allait vite se savoir et j'allais devoir faire face aux interrogations des frères. Je m'en foutais. La petite malade semblait être ma priorité en cette matière.
Je portais le goulot à la bouche et bus l'alcool comme si c'était de l'eau. Cela me fit du bien. Je savais que d'ici quelques minutes, et une nouvelle bouteille, je ne serais plus en mesure de réfléchir. C'était ce que je cherchais. J'en avais besoin pour pouvoir me supporter à cet instant précis. Ce qui me soulageait, était mes exigences. Pas de femmes. Pas d'enfants. Pas d'innocents, tout simplement. Il devait me trouver ce que je demandais auprès d'une pourriture, tel que lui.
Je ne savais pas combien de temps je restais là, à enfiler alcool sur alcool mais lorsque j'ouvris les yeux, le lendemain, le cerveau en compote, le soleil était déjà haut dans le ciel. Je n'avais pas fermé les rideaux et je me mangeais une bonne migraine. Le soleil rayonnant n'arrangeait rien. Je grognais en levant le bras pour le mettre sur mes yeux et ce fut à ce moment que je sentis une main posée sur mon torse. Je me figeais, cherchant dans ma mémoire comment s'était terminer la soirée mais rien ne me vint. C'était le trou noir complet.
Au prix d'un effort surhumain, je retirais mon bras de devant mes yeux pour satisfaire ma curiosité. Val se trouvait coller à moi, nue et endormie. De toute évidence, je ne mettais pas seulement contenter de boire, cette nuit. Je soulevais doucement les draps pour tomber sur ma queue rigide d'une érection matinale.
Malgré une migraine venue de l'enfer, je me levais discrètement, pour ne pas réveiller la brune, et me dirigeais vers la salle de bain. Dans un premier temps, j'avalais deux aspirines puis sautais dans la douche. J'allais trop loin. Ma sœur avait raison, même si je ne le l'avouerais jamais. Il fallait que je me reprenne. Mon père n'allait pas tarder à clamser et mon honneur me dictait d'être auprès de lui, à ce moment-là. De plus, des affaires, mis en suspens, m'attendaient. Le Boss ne serait sûrement pas ravi d'apprendre que son successeur passait son temps à picoler plutôt que bosser.
J'avais toutes les cartes en main. La machine était lancée. Je n'avais plus qu'à attendre le rétablissement de Kasia, qui, j'espérais, ne serait plus très long. Une fois la confrontation avec Julia et mon père parti, j'aurais l'esprit plus en paix. Je pourrais me concentrer sur l'essentiel. Les affaires du club. Quant au dossier Kasia, cela serait à double tranchant. Soit elle survit suffisamment longtemps pour que Anton trouve ce que je lui ai demandé, soit elle y passe aussi. Quoi qu'il en serait, j'aurais tout entrepris pour elle.
Fraichement habiller, je sortis de la salle de bain. Val était réveillée et me souriait avec un air mutin.
- Tu t'en vas déjà ? J'avais prévu un tout autre réveil.
- J'ai à faire. Claque la porte quand tu te seras rhabillée.
Sur ce, je partis précipitamment afin de me rendre à l'hôpital et tenir informé mon père de l'évolution des informations que j'avais en ma possession au sujet de Julia. Cela lui ferait sûrement un choc d'apprendre qu'elle ne vivait pas aussi loin qu'il le pensait. Julia avait été, d'après le peu d'informations que j'avais pu récolter toutes ces années, le premier amour de mon père. Il l'avait réellement aimé et elle s'était barrée comme une voleuse, lui laissant un bébé sur les bras.
J'aurais aimé la retrouver bien avant afin qu'il puisse obtenir des explications, lui aussi, mais cela ne s'était jamais fait. Il avait toujours refusé. J'étais persuadé qu'il l'aimait toujours. Peu de temps après son départ, il avait eu le malheur de boire un peu trop et s'était laissé embrigadé par Marcy, une fille du club, qui lui avait sauter dessus, ne se préoccupant aucunement s'ils se protégeaient. Maylis était née de cette nuit alcooliser. Mon père s'était retrouvé avec un deuxième gosse sur les bras. Marcy avait refusé de la garder si Creeper ne faisait pas d'elle une régulière. Il l'avait virée du bar, devant tout le monde, à coup de pied au cul. Dans son esprit, il avait toujours une régulière. Une femme qui ne méritait pas sa dévotion. Une salope qui nous avait pourri la vie, à tous les deux.
Il ne pourrait pas avoir ses explications mais j'allais les obtenir pour nous deux, de gré ou de force.
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Trials of the heart
RomanceJeune femme pleine de vie et équilibrée, bataillant pour ses idées, Kasia a fait de sa vie un combat constant. Entourée de proches bienveillants et aimants, elle apprécie ce que la vie lui offre. Elle n'attend rien de plus que ce qu'elle a déjà obte...