Chapitre 6 : Benson

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Je fermais brutalement la porte de mon appartement, au-dessus du QG, après avoir perdu la notion du temps au lac. Il faisait nuit noire dehors. J'avais tenté de comprendre pourquoi je me sentais autant perturber par la réapparition de Lea. Elle avait été un passage plutôt plaisant de ma vie mais rien de plus. Cela ne devrait pas m'atteindre plus que cela. Je n'étais plus l'enfant d'autrefois. Il me fallait lâcher prise.

Je me déshabillais et fonçais sous la douche avant de laisser tomber sur mon lit, nu.

Pourquoi portait-elle une cape ?

Je me mis une claque mentale à ce questionnement. Il fallait que je cesse d'y penser.

Pourquoi réapparaître vingt ans plus tard ?

Je soufflais fortement et fermais les yeux afin de m'oublier au sommeil.

Comment cela se faisait-il qu'elle n'est pas vieillie ?

Je me tournais sur le ventre et passais mes bras sous l'oreiller en jurant.

Comment avait-elle fait pour disparaître dans cette impasse crasseuse sans que je ne le remarque ?

Je m'asseyais en balançant rageusement mon coussin au sol, grognant de colère. Je n'avais vraiment pas besoin de cela. Mon oncle, Marlon, venait de décéder lors d'une prise en traitre sur l'autoroute alors qu'il rentrait de voyage. Je devais être à cent pour cent concentré sur les coupables de l'assassinat de notre chef. Au lieu de cela, ma tête partait en vrille pour une meuf qui avait bercé mon enfance avant de disparaître comme un putain de fantôme.

De mes paumes, je me frappais le crâne pour me remettre les idées en place. J'avais demandé à tous les frères de faire le plein d'armes, d'en appeler à nos hommes du Texas, du Mississippi et de l'Arkansas afin qu'ils contrôlent leurs frontières. J'avais envoyé nos routeurs sur les routes. Ils devaient nos contacter aux moindres soupçons sur un groupe rival. Ils devaient, également, surveiller certains gangs qui nous posaient problème depuis quelques années et une nouvelle mafia qui tentait de s'implanter sur notre territoire. Nous n'avions pas affaire à des enfants de chœurs mais ils n'étaient rien comparer à nous.

Je me passais une main sur le visage et me levais du lit. Inutile de continuer à essayer de dormir. Je n'y parviendrais pas. Aussi, je quittais ma chambre pour me diriger vers mon bureau et m'installais à celui-ci. J'allumais mon ordinateur et consultais mes mails, une bonne demi-heure, avant d'abandonner. Je me carrais dans mon fauteuil, les mains derrière le crâne, réfléchissant au potentiel suspect de cette foutue offense.

Ils avaient crevé notre Boss. Ils devaient payer. Je ne pouvais trouver le repos tant qu'ils ne seraient pas entre quatre planches.

Il y avait les Ground. Un club de bikers qui cherchaient à grossir ses rangs auprès des nôtres mais ceux-ci n'étaient en rien dangereux pour nous. De simples guignols cherchant à jouer aux plus forts. Ils ne possédaient pas les couilles nécessaires pour s'attaquer frontalement à nous. Cela représenterait leur fin.

Il y avait Paxton et sa clique, qui nous faisait concurrence sur le marché des drogues, en ville. Ils étaient une dizaine mais tous bousiller par la méthadone. Ils étaient capables de chercher la merde. Cependant, ils seraient très vite maitrisés. Ils n'étaient pas un danger pour mes hommes non plus.

Quant à Foster, c'étaient autre chose. La mafia avait des sbires surentraînés. Ils ne s'attaquaient pas à n'importent qui sans être sûr d'y gagner gros. Seul l'argent comptait pour ces gars. Son grand patron venait de la Sicile. Un gros tas près de ses sous. Il convoitait le marché de la Louisiane, de toute évidence. Foster, qui était un homme de main d'Alejandro Costa, était apparu dans le décor, six mois plus tôt. Il avait fractionné les districts pour y apposer les hommes de confiance au parrain. Lui, diriger celui qui bordait mon territoire. Ces gars étaient à prendre au sérieux. Nous étions tous autant d'hommes prêts à se battre mais cela nous voudrait beaucoup de perte dans les rangs.

Foster n'avait pas encore engagé de poursuite contre nous. Il n'avait jamais convoité notre territoire mais il suffisait qu'une étincelle s'allume dans son cerveau de dégénéré et la guerre se produirait. Nous ne nous laisserions pas faire sans combattre. Les rues deviendraient notre terrain de jeux et le sang allaient couler, s'il s'avérait qu'il était derrière cette affaire.

Personne ne s'en prenait au Fiery Cursed sans en payer le prix. Force et honneur étaient notre devise.

Ceux qui avaient tué notre leader avaient bafoué notre honneur. La rage montait dans nos rangs. Mes hommes avaient soif de sang et de vengeance. Ils voulaient venger Curse. Je voulais la tête de celui qui avait appuyé sur la gâchette. Il était à moi.

Marlon avait toujours été un deuxième père pour moi. Il m'avait tout enseigné. Il m'avait pris sous son aile. Il n'avait jamais eu d'enfant, ayant perdu sa régulière avant ma naissance. L'amour qu'il lui avait porter, tout au long de sa vie, l'avait contraint à une triste solitude. Aussi, il avait projeté son envie d'héritier auprès de moi. J'espérais, même après une vie de violence et de mort, il avait pu la retrouver. Ma mère m'avait expliqué toute l'histoire, y ayant assisté. J'en avais été peiné pour lui mais choisir une mourante n'avait pas été malin. Il aurait dû prendre immédiatement ses distances lorsqu'il avait su qu'elle était condamnée. Dans un même temps, je ne connaissais rien à l'amour alors je ne m'étais jamais permis de porter un quelconque jugement.

À mes yeux, elles étaient toutes interchangeables, excepté ma mère et mes deux petites sœurs, Kasia, en l'honneur de la régulière de Curse, et Krista.

Il fut un temps, Lea avait le même statut que ces dernières mais cela n'était plus le cas, à présent. Savoir qu'elle était toujours là, qu'elle m'avait lâchée, faisait d'elle une suspecte. Il était trop étrange qu'elle réapparaisse quelques jours après la mort de Marlon. Cela ne pouvait pas être une coïncidence. C'était trop gros. Je ne savais rien d'elle, après tout. J'avais passé mon enfance auprès d'une inconnue. Personne ne l'avait jamais vu avant la veille. Mes souvenirs m'étaient revenus, pourtant. Elle était bien présente lorsqu'il y avait du monde. Comment ne pouvaient-ils pas la remarquer ? Comment faisait-elle pour être invisible aux yeux de tous ?

Plus j'y pensais, plus j'en faisais une suspecte. Il me fallait être méfiant sur toute personne qui s'approchait de près ou de loin de nous, tant que cette affaire n'était pas réglée. Il était hors de question de creuser une nouvelle tombe sans riposte. S'il s'avérait qu'elle était réellement une traîtresse, elle ne vaudrait pas plus que l'enfoiré qui avait tiré sur mon oncle et elle finirait exactement pareille que ce connard, même si, intérieurement, cela m'emmerdait.

Le soleil se levait doucement à l'horizon et j'avais encore passé une nuit blanche à ronger mon frein dans l'attente d'un signe de nos équipes à l'extérieur, pimenter par une nouvelle apparition des plus perturbantes.

J'entrais dans l'arène de la façon la plus brutale et frénétique qui soit. Cela était la meilleure façon de prouver mes aptitudes à mes frères.

Marlon avait été un excellent professeur. Il ne me restait plus qu'à le leur prouver. J'étais prêt à tout. Même à sacrifier, au nom de notre honneur, la seule femme qui avait pu compter pour moi, en dehors des femmes de ma famille.

Deviation of the ritualOù les histoires vivent. Découvrez maintenant