Depuis une heure, Sylvain planchait sur son sujet d'examen, il avait déjà rédigé la première question, quand deux hommes d'une quarantaine d'années pénétrèrent dans la salle, le crâne rasé, une masse de muscles serrée dans un costume noir de mauvaise qualité, ils avaient tout des agents desécurité. Troublés par leur arrivée fracassante, les étudiants relevèrent la tête de leur copie et posèrent leur stylo. Le surveillant ne tenta pas de retenir les intrus, au contraire, il tendit un doigt accusateur en direction du troisième rang de tables. Un vent de panique s'abattit sur Sylvain qui occupait un siège sur la troisième rangée.
- Monsieur Olsen, veuillez vous lever!
Sylvain leur lança un regard bleu ciel chargé d'innocence.
- Moi?
- Suivez-nous!
Les agents de sécurité, deux brutes menaçantes, n'entendaient pas perdre leur temps. Avant qu'ils ne posent leurs grosses mains velues sur lui, Sylvain, tremblant, se leva et abandonna sa copie d'examen. Tous les étudiants le regardaient avec sévérité, il lui était impossible de se débarrasser du téléphone qui lui brûlait la peau, il venait d'être pris en flagrant délit de tricherie. Le garçon devinait que sa brillante carrière à l'Institut des Hautes Études Économiques venait de prendre fin.
Alerté par le surveillant, le directeur de l'école venait d'arriver dans la salle, une grande animation régnait, les étudiants apeurés chuchotaient entre eux. Pour rien au monde, ils n'auraient échangé leur place avec leur camarade.
Veuillez relever les manches de votre chemise, Monsieur Olsen!
L'injonction du directeur glaça le jeune homme qui aurait voulu disparaître sous terre pour échapper à l'humiliation publique qui l'attendait.
Dépêchez-vous!
Incapable de se rebeller, Sylvain tendit le bras gauche, son poignet se dégagea de la chemise, laissant apparaître le minuscule téléphone qui lui permettait de stocker ses connaissances. Le directeur arracha l'objet sans ménagement, totalement insensible au cri de douleur du garçon.
Votre conduite est inqualifiable, Monsieur Olsen, vous me décevez beaucoup.
Incapable d'ouvrir la bouche pour défendre sa cause, Sylvain luttait pour refréner les sanglots qui lui nouaient la gorge; il ne fallait surtout pas qu'il pleure, ce qui aurait ajouté le ridicule à l'humiliation. Il venait enfin de prendre conscience de la gravité de sa faute, il devinait que les suites en seraient désastreuses.
Honteux, tête basse, il suivit le directeur de l'Institut dans son bureau, encadré par les deux agents de sécurité. Il subit son sermon sans oser affronter son regard, en pensant bien tardivement à l'immense déception que ses parents ressentiraient en apprenant la mauvaise nouvelle. Il était leur fils unique sur qui ils avaient basé tant d'espoir. Ils avaient fini par croire eux aussi à ses rêves de réussite et de gloire.
- Que diront vos parents lorsqu'ils apprendront que vous êtes un tricheur, Monsieur Olsen? insistait le directeur d'un ton féroce. Vous avez déshonoré votre famille en déshonorant l'Institut!
- C'était la première fois, lança le jeune homme d'une voix timide.
- Ne rajoutez pas le mensonge à la tricherie! hurla le directeur dans un accès de colère. Vous avez été dénoncé par un de vos camarades qui vous a vu tricher aux examens de la session dernière. A l'époque, j'avais pensé à une mesquinerie due à un accès de jalousie d'un élève moins bien noté, je croyais en vous Sylvain, je vous ai donné une chance de me prouver qu'il ne s'agissait que d'une dénonciation calomnieuse, malheureusement, il n'en est rien. Vous trichez et vous mentez, monsieur Olsen, c'est lamentable. Vous êtes dons exclu de notre établissement, avec interdiction formelle d'y revenir, même pour y rencontrer d'anciens camarades.
Sylvain sentait que les larmes longtemps contenues lui échappaient pour rouler sur ses joues. Il s'essuya le visage d'un revers de main en reniflant.
- Trop tard pour pleurer, Monsieur Olsen, il fallait y penser plus tôt, ajouta le directeur d'un ton sec. Veuillez quitter immédiatement cet établissement, mais n'oubliez pas que cette affaire remontera en haut lieu et que vous devez vous attendre à de lourdes sanctions.
Le jeune homme récupéra son sac qu'un agent de sécurité avait posé sur une chaise, puis se dirigea lentement vers la sortie, submergé par une terrible vague d'angoisse. Qu'allait-il devenir maintenant qu'on le chassait du campus? Ses parents allaient-ils accepter de le recueillir en attendant la sanction qui allait très certainement lui tomber dessus? Allait-il se retrouver en camp de rééducation? Et pour combien de temps? Cette lugubre perspective le fit frissonner. Sylvain venait de réaliser qu'il venait de foutre sa vie en l'air et que désormais rien ne serait plus comme avant.
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Le passé est-il parfait ?
AventuraDans un monde futuriste, le gouvernement instaure une nouvelle peine pour les jeune délinquants, les renvoyer dans le passé, en 1788, peu avant la Révolution Française.