Chapitre 19

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"En essayant de régler les problèmes qui m'entourent, j'ai fini par être le problème."



Jules : Non !

Je me redresse, suant et haletant. J'observe en premier lieu mes mains tremblantes, couvertes de métal à certains endroits, puis je balaye du regard la pièce dans laquelle je suis.

Jules : C'est bien chez moi...

La chambre est baignée de lumière, malgré le fait que les volets soient fermés. J'entends un léger bruit de draps qui attire mon attention. Trish, allongée à mes côtés, se tourne vers moi et ouvre les yeux, croisant ainsi mon regard.

Trish : Ça va aller ?

Jules : Oui... Tout va bien, c'est juste un mauvais rêve.

L'inquiétude et la fatigue se lisent clairement sur son visage.

Jules : A quelle heure es-tu rentré hier soir ?

Je lui pose la question car je me souviens être rentré après cette... Mission... et de m'être endormis sans qu'elle soit là.

Trish : Hum... Je sais pas...

Elle bouge à nouveau et finit par me tourner le dos.

Trish : Mais après toi, c'est sûr.

Elle baille une dernière fois pendant que je me lève du lit puis m'habille.

Jules : Je vais me laver et aller chercher Marie, ça te va ?

Trish : Hum... Je vais aussi venir mais ne m'attends pas...

Elle reste affalée sur le lit de manière grossière ce qui me fait sourire.

Jules : Ne prends pas trop de temps, d'accord ?

Trish : Oui...



"Mon corps ne semble plus tenir le choc, j'ai des moments d'angoisse, de peur, de profonde tristesse, d'appréhension... Tout ça alors que tout va bien."



Au milieu de la journée, j'approche enfin de la maison de Bûth. Les chaumières de la ville sont de moins en moins serrées les unes aux autres et le bois où réside la famille de l'orc commence petit à petit à se dessiner au bout des ruelles que j'emprunte. Je croise quelques humains dans ces rues mais elles restent clairement moins prisées que le centre de la capitale.

Jules : C'est calme...

Je me sens reposé, bercé par le chant des quelques oiseaux, posé sur le toit des maisons ou sur les branches des quelques arbres qui n'ont pas été coupés lors de l'expansion de la ville, mais aussi par les rares discussions que l'on peut entendre au coin des rues. Seulement, ce calme aurait pu perdurer plus longtemps si ces humains ne me regardaient pas de travers en me voyant passer. Je ne sais pas pourquoi ils réagissent comme ça, c'est peut être à cause de ces plaques de métal qui sont de plus en plus nombreuses, grosses et visibles sur mon corps ?

Jules : Il faut que je règle ça...

J'observe mes mains où certaines de ces plaques ont remplacé ma peau. Je n'ai aucune idée de leurs origines ou même comment les retirer.

Jules : Mais bon...

J'arrive finalement à l'entrée du bois et y pénètre. Il n'y a plus aucun humain aux alentours et plus je m'y enfonce, moins je ressens leur présence. Les feuillages des arbres forment alors un toit au-dessus de ma tête et le chemin en terre qui me dirigeait à bien rétrécit car étant maintenant écrasé des deux côtés par diverses plantes ou racines sortant du sol. Je finis par apercevoir la chaumière de Bûth après quelques minutes de marche. Il n'y a personne à l'extérieur ce qui ne me choque pas mais j'ai aussi l'impression que l'intérieur est vide de toute vie.

Jules : Bizarre...

Je me rapproche de la maison, toque à la porte d'entrée et attends mais... Rien.

Jules : Ils sont peut-être aller au centre-ville ?

Par réflexe, j'essaye d'ouvrir la porte d'entrée et je m'aperçois que celle-ci n'est pas verrouillée. Je l'ouvre en grand et parcours, lentement, le salon pour me diriger vers un couloir donnant sur plusieurs autres pièces. Une odeur des plus effrayante me prend alors par les tripes, une odeur que je ne voulais en aucun cas sentir à cet endroit. Pris par la panique, je me précipite en direction de la pièce la plus proche de moi et m'arrête à l'entrée de celle-ci, terrifié.

Jules : N... Non...

Du sang, partout, sur les murs, le sol, les meubles... Du sang frais, datant de quelques heures, et deux corps déchiquetés, presque méconnaissables. Je reste sans voix, observant la scène qui s'offre à moi.

Jules : B... Bû...

Que... Qu'est ce qu'il... S'est passé ici ?! mes mains tremblent, je n'ose pas bouger, je n'ose pas détourner les yeux... C'est... C'est la vision la plus cauchemardesque que j'ai pu voir depuis des années. Je n'arrive pas à trouver les mots... Et...

Jules : Marie !

Je détourne enfin les yeux de cette horreur et vérifie alors chacune des autres pièces mais aucune trace de Marie. Je tombe alors à nouveau sur une chambre couverte de sang, celle du fils de Bûth et Heavina. Le corps du jeune orc est lui aussi détruit, en charpie. Une profonde envie de vomir vient alors m'attraper par surprise sans que je ne puisse rien faire, me forçant à vider une partie de mon estomac sur le sol.

Trish : Jules ?

Elle est déjà là ?! Sa voix est assez loin donc je me dépêche de la rejoindre, sortant ainsi de cette chambre en trombe.

Trish : Ju–

Jules : Trish, sors je t'en supplie !

Je m'arrête d'un coup en la voyant tétanisé, se tenant à l'entrée de la première chambre, observant ce spectacle que j'ai vu moi aussi. Je m'avance vers elle, lentement.

Jules : Aller...

Je pose mes mains sur ses épaules et l'oblige, tranquillement, à se diriger vers la sortie.

Jules : Ne restons pas là, Marie n'est pas ici...

Trish : Et... Et Bûth ? Et Heavina ?

Je ne lui réponds pas.

Trish : Ils...

Jules : Oui...

Une fois sortie dehors, je finis par la lâcher.

Jules : Marie n'est plus ici...

Elle m'observe droit dans les yeux avec crainte.

Jules : Il n'y a aucune trace d'elle, comme si elle s'était volatilisé dans la nature.

J'y repense encore et encore. La personne qui a commis cet acte...

Trish : Elle a... Disparu ?

Elle baisse la tête en silence. Je l'observe sans dire un mot, en repensant à la scène. Pourquoi eux ? Non... Pourquoi juste eux ? Le corps de Marie n'est pas ici alors le meurtrier en avait après eux, après ces orcs... Des nettoyeurs ? Même si Bûth n'a plus été mêlé aux chasseurs depuis longtemps, il est possible qu'il ait commis des actes dans le passé ayant refait surface récemment... Mais non, ça ne peut pas être eux car ils s'en sont aussi pris au reste de sa famille qui n'a absolument rien à voir... Pourquoi Marie et pas les autres. Elle ne s'est pas échappée, c'est sûr, mais pourquoi elle ? Le tueur la cherchait ? Il les aurait alors tué car ils étaient sur son chemin. A ce moment-là, l'image d'un humain me vient en tête, l'image d'un homme que j'ai déjà confronté et qui connaît Marie, qui l'a côtoyé un moment au point d'avoir créer un lien qui me dérange énormément...

Trish : Jules, ce fumier...

Elle attire d'un coup mon attention. Je l'observe serrer les poing en tentant de contrôler sa haine. Je croise alors son regard, un regard me glaçant le sang, n'ayant pour seul origine la haine et la violence.

Trish : On doit le retrouver, il doit payer pour ce qu'il a fait...

Jules : Je... Je crois savoir qui a fait ça et où le trouver.

Onigard : SolitudeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant