Chapitre 2

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La main de Max sur ma joue me tira de mon sommeil. Pourtant, je n'avais pas le souvenir de m'être endormie. 

Cette fois, la main de mon père attrapa la mienne et me tira de la voiture d'une manière beaucoup moins délicate. Je grimaçai, arrangeant mes cheveux sans rechigner. 

Devant nous s'élevait l'immense bâtiment Redbull Racing. Je retrouvai directement le sourire, heureuse d'être à nouveau plonger dans cet univers que je chérissais au plus profond de mon être. Il faisait un temps splendide, le soleil, haut dans le ciel, donnait le sentiment qu'il ne pleuvait jamais ici. 

Je m'avançai alors que mon père ne voulait pas me lâcher. Nous passâmes la porte d'entrée et Christian Horner apparut au même moment. 

— Super Max ! s'exclama-t-il. 

Il s'avança vers son petit protégé et lui donna une accolade, un sourire calqué sur les lèvres. Christian aimait beaucoup Max, surtout parce qu'il était la raison première de la prospérité de son équipe. Je savais néanmoins que tous les deux s'entendaient très bien. Max avait un caractère extrêmement aiguisé, qu'il ne manifestait pas vraiment avec moi, ce qui donnait du fil à retordre à ses collaborateurs et aux différentes personnes qui le côtoyaient. Mais avec Christian, tout allait bien. 

Après ces retrouvailles, le team principal salua mon père et tourna ensuite son attention vers moi. 

— Amaryllis ! Bienvenue, c'est un plaisir pour nous de t'avoir chez AlphaTauri. De toute façon, tu fais déjà un peu partie de la famille, me confia-t-il. 

— Merci Christian, je suis très heureuse d'être ici avec vous. 

Lorsqu'il me prit à son tour dans ses bras, je sentis enfin l'emprise de mon père se dégager. 

En F2, dès que j'en avais la possibilité, je me faufilais dans l'écurie Redbull pour observer les performances de mon frère. Je détestais manquer une course. Quand Max gagnait, j'avais l'impression de gagner avec lui. Quand un Grand Prix ne se passait pas comme prévu, je ressentais sa colère, sa hargne de recommencer et de tout casser à la fois. Et quand il lui arrivait malheur, j'avais l'impression de mourir de l'intérieur. 

En un sens, lui et moi, nous étions pareils. Si je n'avais pas eu cette aptitude à me projeter à travers lui, j'aurais déjà abandonné le sport automobile depuis longtemps. Il me donnait une force incommensurable. 

Comme il était déjà assez tard, Christian nous proposa d'aller déjeuner avec le reste de l'équipe. 

Au restaurant de l'entreprise, je retrouvai Franz et Graham, que j'avais rencontrés à la précédente saison et avec qui j'avais pu discuter plusieurs fois. A tour de rôle, ils m'accordèrent une étreinte et tout de suite, je me sentis comme à la maison. En réalité, mieux qu'à la maison. 

— Quel bonheur de te revoir Amaryllis ! déclara Franz. Viens, installe-toi avec nous. 

Je me retournai vers mon frère qui avait suivi Christian jusqu'à une autre table. 

— Rejoignez-nous Jos, dit Christian en élevant la voix pour être entendu. 

Je lançai un regard à mon père qui prenait conscience du fait qu'il n'allait pas pouvoir rester avec moi. J'étais majeure maintenant, il n'avait plus le droit légitime d'être à mes trousses. Je lui souris, presque pour le défier, mais je regrettai bien vite.

— On se voit tout à l'heure, mijn kind.

Il posa une main sur mon épaule et la pressa légèrement. La douleur de ma blessure refit brutalement surface, se portant jusqu'à mon cœur. Je ne voulus pas crier, c'est pourquoi je me serrai contre lui, quitte à passer pour une idiote. 

ANATHÈME ; Pierre GaslyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant