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"Deux semaines. Oui.

Felicity me regarde, en silence.

-Je t'avais dis que tu pouvais suivre ton cœur.
-Deux semaines, ce n'est rien.
-C'est beaucoup pour toi. Réjouis toi un peu, non?
-Ouhouh! Ça fait deux semaines que je me tape le comptable! Ça se fête!

Je lève les yeux au ciel en mangeant une bouchée de mes raviolis aux épinards.

-Qu'est-ce que tu peux être rabat-joie, soupire Felicity.
-Je ne suis pas rabat-joie!
-Si.
-Non.
-Si.
-Non! Je ne suis tout simplement pas expressive. Ce n'est pas un drame. Tu peux parler. Tu ne fais confiance à aucun homme et tu rejette toutes interactions possible avec un être du sexe opposé dès que tu commence à lui plaire.
-Ce n'est pas pareil.
-Si.
-Si tu le dis alors. En attendant, on parle de toi, ici.
-On peut très bien parler de toi.

Je lève un sourcil en souriant, telle une gamine. Mais elle sait que j'ai raison. Elle sourpire, boit une gorgée d'eau et pose son regard océan sur ma personne.

-Tu pourrais faire quand même un effort. Invite le à sortir, peut-être un cinéma ou je ne sais quoi. Il faut le féliciter le petit! Il a du courage de rester avec toi.

Je souris. Le féliciter, oui. Ça me fait encore plus sourire. Sans le savoir, elle me donne de petites idées pour des jeux intimes, que j'ai hâte de tester avec Nicoleau.
Felicity est légèrement au courant de mes pratiques sexuelles. Mais ni elle, ni moi, n'avons souhaité approfondir ce sujet. En revanche, elle connaît mes pires secrets, mes pires peurs, et mes pires hontes.

-Je lui en toucherais deux mots.
-À la bonne heure! Tu feras un heureux, c'est certain.
-Si tu le dis. Peut-on changer de sujet et passer à quelque chose de plus professionnel?
-C'est un déjeuner d'affaire ou un déjeuner entre amies?

Je fais mine de réfléchir, ce qui fait rire Felicity. Son rire aiguë et cristallin nous attire quelques regards accusateurs ou rieurs. Je lui fais tout de même signe de se taire.

-C'est un déjeuner entre deux amies qui travaille ensemble. Un mélange des deux, quoi.
-Parfois je me dis que je te verrais plus à la place de P.-D.G. que moi.
-Parfois. Je serais une affreuse patronne. Tortionnaire et perfectionniste. Tout le monde me fuierait dans les couloirs ou démissionnerait.
-Sauf moi. Et Nicoleau.
-Peut-on être sérieuses quelques minutes, je t'en prie.

Je mange ma dernière raviolis, que je fais passer avec deux gorgés d'eau. Felicity termine ses pâtes en me fixant.

-On doit trouver un nouveau mannequin.
-Pour la collection spéciale du mois prochain?
-Oui. Je l'imagine blond, un peu séducteur et avec une grande confiance en lui.
-Un mâle alpha quoi.
-On ne va jamais dans le côté séducteur, impétueux et dominateur.
-Je t'arrêtes de suite. Si tu comptes contaminer mon entreprise avec ta vision de l'amour, ça ne sera pas possible.
-Rien à voir! Je te parle d'un séducteur, pas d'un dominant ou je ne sais quoi qui puisse te passer dans la tête. Juste un bel homme, qui a confiance en lui et qui cherche à jouer de ses charmes. Pour une fois. Il faut un peu de tout.
-Bon d'accord. Ça me va. Je parie que tu sais déjà où le dénicher.
-Nicoleau a pas mal de contacts, ça devrait le faire.
-Je veux être là le jour du shooting pour le rencontrer. Fais ça un jour où je suis libre un après-midi.
-C'est toi la patronne!"

Nous nous levons simultanément, et rejoignons l'accueil pour régler la note. Mon esprit est déjà loin. J'ai hâte de rejoindre Nicoleau dans son bureau d'ici une vingtaine de minutes pour lui parler affaire.

🥀🥀🥀

L'ascenseur me dépose au deuxième étage. J'embrasse Felicity qui regagne le quatorzième étage. Puis je me dirige vers mon bureau. Je salue tout le monde dans l'open-space.
Mais je m'arrête en remarquant quelques choses qui me chiffonne. Où est Amy? Ces derniers temps, elle passe peu de temps à son bureau. Elle semble... étrange. De plus, ses regards sont de plus en plus insistants. Même Nathan l'a remarqué. C'est pour dire.

"Où est encore passée Amy Smith?

Emma, John et Nathan se regardent, regardent le bureau vide, puis me regardent.

-Elle est partie pour le déjeuner, il y a...
-Je sais, elle est partie avec moi. Seulement, deux heures pour manger, c'est assez. Tu ne penses pas, Emma?
-Si, bien sûr.
-Quand elle reviendra, si elle daigne revenir, dites lui de venir dans mon bureau directement.
-Oui, Sunny, me répond Nathan."

Je laisse mes collègues et rejoins finalement mon bureau. Je dépose mes affaires, prends le dossier concernant la collection spéciale homme du mois prochain, et ressors.
Je me dirige jusqu'à l'antre du comptable. La porte est entrouverte, comme toujours -puisqu'il s'agit de ma petite demande personnelle pour pouvoir l'observer en secret.
Il est seul, assit sur sa chaise à roulettes, le regard perdu à travers la fenêtre. Je l'observe un peu. Ses cheveux bruns ont poussé, sa barbe est taillée à la perfection, ses yeux marrons sont pétillants.
Je finis par entrer, attirant ainsi son attention. Je lui fais signe de se taire. Je pose le dossier sur d'autres papiers et contourne le bureau. Je passe derrière lui, pose une main sur son torse et me penche par-dessus son épaule. Je lui embrasse sensuellement le cou.

"J'ai entendu dire que vous étiez seul, monsieur. Et je me suis dis qu'un peu de compagnie ne ferait pas de mal.
-Vous avez raison, madame. Je pensais d'ailleurs à vous.
-Vraiment? Dites-moi.
-Je vous imaginez m'attacher les mains... Puis les pieds...
-Mais encore?

Je descends ma main jusqu'à son membre, que je me mets à taquiner par-dessus ses vêtements. Il laisse sa tête tomber en arrière avec un soupire.

-Je vous imaginez disposer de mon corps à votre guise, madame.
-Dis-moi ce que je te faisais.
-Tu me touchais comme en ce moment...

Je cesse tous mouvements et me redresse.

-Je suis venue pour le travail, tu me déconcentre Nick'. J'aurais besoin d'un mannequin. Blond. Séduisant. Viril. Bref, le total cliché du bel acteur ou je ne sais quoi qui y ressemble.
-Un blond?
-Quoi? C'est si dur à trouver?

Il lève la tête pour me contempler.

-Je n'en connais pas.
-Je comptais sur toi, dommage. J'irais voir chez nos amis du service recrutement.
-En fait, j'ai peut-être quelqu'un.
-Bien. Essaies de me l'avoir pour le 28 prochain.
-Promis.
-Maintenant, parlons prévision.

Je m'assoie à moitié sur son bureau, faisant glisser mon doigt sur le contour de sa mâchoire. Je glisse mon pied vêtu d'un escarpin entre ses jambes. Il se met à caresser ma peau.

-Tu veux déjà un bilan comptable?
-Je ne vous parle pas du travail, monsieur. Mais de nos projets pour ce soir. Deux semaines, il paraît que ça se fête...

Je me penche pour embrasser le coin de ses lèvres.

-Je suis tout à vous, madame.

Je me redresse, sourire en coin. L'idée des pseudonyme monsieur et madame lors de nos jeux m'émoustille plus que je ne l'aurais cru au départ.

-On pourrait aller au restaurant, puis au ciné...
-Je rêve! C'est quoi ça?

Je me retourne, surprise, et dévisage avec colère, dédain et stupéfaction Amy nous dévisager.

-Mademoiselle Smith! Les pauses déjeuners ne sont pas illimitées! Où étais-tu bon sang?
-Pas en train de faire des avances à la patronne en tout cas! Quel salop! Nicoleau, tu devrais avoir honte!"

Je dévisage la jeune fille en furie qui se trouve face à moi. S'en prendre à moi est une chose, s'en prendre aux personnes que j'apprécie en est une autre.
Je me lève rapidement pour contourner le bureau et me mettre face à elle, croisant les bras sous ma poitrine. Nicoleau s'est lui levé, en silence. Je crois qu'il ne sait pas comment réagir. Mais moi, si.

L'inconnu de la chambre 214Où les histoires vivent. Découvrez maintenant