23. L'arroseur arrosé.

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Cave des Keaton, Miami, 23h52.

Minuit sonnera bientôt et je n'aurai plus que sept heures à tenir sur ce banc du tigre. Je suis chanceuse, il a décidé de me faire subir des tortures "propres", du genre qui ne me laisseront pas de marques. 

Je suis assise en angle droit sur un banc, le dos collé contre le bitume glacial du mur, en sous-vêtement. Mes chevilles sont surélevées pour que les muscles de mes jambes attachées, sois tendus au maximum.

La douleur est difficilement supportable, mais je m'en sors plutôt bien, je dégouline de transpiration. Les larmes ont cessé de couler et mes gémissements sont de moins en moins bruyants. Cela fait trois heures qu'il me fait écouter la même musique en boucle, je n'en peux plus. Je n'ai pas d'autre choix que de subir, parce que même si je le suppliais, il n'arrêterait pas.

Mon cerveau est en bouilli, je ne peux plus réfléchir correctement. Dans ce genre de situation, garder sa lucidité est le plus important, mais j'ai échoué. J'ai bien essayé de me balancer pour faire tomber le meuble sur lequel je suis assise, mais il est fermement fixé au sol, alors ça aussi, j'ai échoué.

La porte s'ouvre, mon père descend les escaliers avec une boîte opaque entre les mains. Il va augmenter la difficulté, je m'attends au pire, mais je suis quand même rassurée de ne pas le voir rentrer armé du tisonnier avec lequel il m'a marqué au fer.

— On dirait que je suis trop gentil avec toi, le monstre, s'amuse-t-il. 

Je tourne la tête vers lui. Mes yeux sont perdus, complètement déconnectés de la réalité. Je n'ai même pas la force de lui répondre.

Andrew approche de moi afin de disperser ce que la boîte renferme. Je n'ai aucune réaction face à son contenu, la souffrance empêche complètement mon cerveau de traiter les informations. Il éparpille les insectes gluants sur mon corps presque nu. Sentir leurs pattes fourmilier sur ma peau est presque réconfortant. Il approche d'une armoire qui n'était pas là il y a quelques années, d'où il sort un jeu de société.

Je ne comprends pas ce qu'il fait, mais mon système nerveux se concentre sur autre chose que sur cette douleur atroce, alors je suis légèrement soulagée. Quand il sort l'objet qui l'intéresse, je comprends immédiatement où il veut en venir. 

Andrew s'approche de moi et insère un écarteur buccale pour que les bêtes puissent rentrer dans ma bouche à leurs guise. Le principe du jeu est de faire deviner des mots sans pouvoir articuler, aujourd'hui il servira à me faire avaler des bestioles. Je réprime un haut le cœur en imaginant leurs corps gigoter jusqu'à mon gosier.

Enfin, il me laisse de nouveau seul avec mes pensées.

Une heure et demi plus tard, j'entends les talons de ma sœur claquer dans l'escalier. Elle entre dans la cave, vêtue d'une robe trop moulante bleue électrique et d'une paire d'escarpin noir. La souffrance physique est rapidement remplacée par la colère, si elle va voir Adan dans cette tenue, je serai capable de lui crever les seins. La simple idée de l'imaginer la reluquer toute la nuit, pendant que je serai là, à souffrir le martyre, me met hors de moi. Chloé m'envoie un sourire provoquant, tandis qu'elle baisse le volume de la musique. Un regain d'énergie me pousse à essayer de me libérer, en vain.

Andrew nous rejoint, satisfait de l'état dans lequel il me retrouve. Au bord du gouffre et de la crise de nerfs.

— Je ferai un bisou à ton chéri de ta part, glousse-t-elle mesquinement.

Je la fusille du regard. Je sais qu'elle parle de Charles, mais je ne peux pas m'empêcher de l'imaginer se frotter à Yard, cette idée me met hors de moi. Je m'agite dans tous les sens, écrasant des insectes au passage.

L'avocat Du Diable.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant