L'avocat Du Diable.

52. Le bouffon du roi.

2 SEMAINES PLUS TARD.

Allison Academy, 9h32.

Je suis arrivée en avance au lycée aujourd'hui. Adan se repose à l'hôpital, l'infirmière n'est pas revenue depuis notre petite altercation.

J'avance dans le long couloir qui mène aux salles de classes du rez-de chaussée. J'entends un mouvement d'euphorie. Sur ma gauche, près de la salle de permanence, se trouvent quelques membres de l'équipe de foot, autour d'un mur. Je vois la tête de Conrad dépasser du groupe alors je m'arrête pour le détailler.

— Devinez qui j'ai surpris en train de sortir d'un putain de bar de tarlouze ce matin ?! envoie-t-il à voix haute pour amuser la galerie.

Il est face au placo, je ne comprends pas pourquoi il ne se tourne pas vers les autres pour leur parler, alors je m'approche. Je fulmine déjà rien qu'à l'entente de ses propos. L'un des attardés a l'appareil photo de son téléphone rivé vers mon ex. Il est sûrement en train de filmer ses misérables exploits. C'est sur que pour un débile pareil, faire un discours homophobe est une réelle prouesse. Il faut dire qu'aligner deux mots en est une aussi pour ces quatre-là.

— Notre très cher Nolan ! ajoute-t-il en soulevant le dénommé par le col de son t-shirt contre le mur.

Mon sang ne fait qu'un tour, je laisse tomber mes affaires dans un fracas et accours vers eux. Conrad arme son poing, un sourire satisfait aux lèvres. Mon cœur bat à toute allure, Nolan ne se débat même pas. Il a la tête baissée tellement il se sent honteux. J'enrage. Comment cette injustice ne lui donne pas envie de se battre ?

Je sais. Il n'a plus envie de se battre. Quand on est gay, on se bat du lever au coucher du soleil. Alors parfois, on baisse les bras et on espère que les débiles ne croiseront pas notre route. Malheureusement pour Nolan, il est dans un lycée qui en est rempli, alors ses idées pacifistes vont devoir attendre encore un peu.

Conrad. Mon ex. Cet enfoiré est en train de l'humilier publiquement, je compte bien l'en empêcher et lui faire subir pire encore.

— On va le remettre sur le droit chemin ! Qu'est-ce que vous en dites ? ricane-t-il devant ses camarades qui s'agitent, impatients. 

J'ai envie de gerber. Je me déteste d'avoir osé poser mes lèvres sur cette abomination. Je repousse violemment les 3 débiles agglutinés à eux et atteint enfin mon ancien petit-ami. Je peine à arrêter son poing puissant avant qu'il ne rentre en contact avec le visage du copain de Charles.

— Un problème avec les gays, Fletcher ? lui demandé-je en serrant ses phalanges entre les miennes.

Il tourne sa tête vers moi. Son visage amusé change du tout au tout, il se décompose. Il semble soudain paniqué et presque désolé. Je le détaille avec dégoût de la tête aux pieds. Ses lèvres bougent sans qu'aucun son n'en sorte.

Des chuchotements et des messes-basses bourdonnent dans mes oreilles, je les ignore. Le flash du caméraman éclaire ma joue gauche, son objectif est dirigé sur moi, encore une fois je ne relève pas et continue de fusiller mon ex du regard. Je m'en moque pas mal en fait, c'est lui le harceleur, pas moi. Qu'ils aillent se faire foutre, je n'ai pas honte.

— Lâche-le, ordonné-je sans me soucier des élèves en train de nous regarder.

Ses yeux jonglent entre les miens. Il est tellement surpris que j'ose intervenir et parler en public qu'il est incapable de répondre ou même de bouger.

— Maintenant ! m'écrié-je méchamment, irritée par sa mollesse.

Il pose délicatement Nolan sur le sol, ce dernier s'écroule et se recroqueville contre le pied du mur. J'attrape alors le col de Conrad et l'approche brutalement de mon visage pour l'obliger à me faire face.