Chapitre 5 : Contrôle de marchandise

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Alioth se délesta de sa veste et s'approcha de Seren. Il ne réagit pas, le regard perdu dans le vague. Avec l'air conditionné réglé au maximum, vêtu d'un boxer et d'une simple brassière de sport, il grelottait.

— Tu peux te lever ?

Seren parut hésiter, comme s'il avait du mal à saisir le sens de ses propos. Quel psychotrope avaient-ils bien pu lui injecter pour qu'il se retrouve dans une telle léthargie ?

— Oui, articula-t-il dans un pénible effort de réponse.

Alioth lui tendit la main. Il la saisit et se releva en chancelant. Alioth plaça sa veste sur ses épaules. La différence de taille était si impressionnante qu'elle lui arrivait juste au-dessus des genoux. Le garçon s'enveloppa dedans comme dans un cocon.

Alioth se tourna vers Rhys et déclara d'un ton monocorde : « Prends ses affaires. On s'en va. »

Rhys fronça les sourcils. A quel moment était-il passé de quantité négligeable à vulgaire larbin ?

— Alth, un « S'il te plaît, Rhys » ou un simple « Merci » n'aurait pas été de trop ! s'emporta-t-il, froissé par son attitude.

Alioth sembla le remarquer. Contrairement à ses habitudes, il corrigea sa formulation.

—S'il te plaît, Rhys, pourrais-tu rassembler ses affaires afin que nous quittions cet endroit au plus vite ?

Rhys acquiesça et rassembla rapidement les paquets.

— Il va tout de même falloir que toi et moi ayons une discussion sur la manière dont tu traites le petit personnel. Non, en fait, ce sera un monologue. Je parlerai et pour une fois, tu écouteras !


Le nez plongé dans le liquide ambré aux effluves d'écorce et d'agrume, Rhys tentait d'analyser le récent comportement d'Alioth. Ne voulait-il pas une vengeance impitoyable ? Dans ce cas, pourquoi se montrait-il aussi prévenant envers Seren ?

Il savoura le whisky vieux de dix ans d'âge, un plaisir bien mérité, après leur dangereuse incursion dans l'univers du commerce illicite et du crime organisé. L'eau-de-vie, légèrement onctueuse, le réchauffa agréablement.

En y réfléchissant, le gamin avait l'air docile et était plutôt mignon. Il était facile de se laisser attendrir. Toutefois, Alioth n'oublierait pas si aisément une rancœur vieille de plusieurs millions d'années. La suite promettait d'être intéressante.

— Es-tu satisfait de ta nouvelle acquisition ?

Alioth, qui étudiait le contenu de son verre depuis près d'une demi-heure, haussa à peine un sourcil lorsque Rhys l'interrogea.

Ils s'étaient installés dans la bibliothèque, une salle imposante qui recelait une multitude d'ouvrages, pour certains, de véritables pépites. Elle tenait également lieu de bureau. C'était le refuge préféré du maître de maison.

— Que vas-tu faire de lui ? L'assassiner et l'enterrer au fond du jardin ? Vu l'étendue de tes terres, si tu creuses assez profond, il y a de fortes probabilités qu'on ne retrouve jamais son cadavre.

Rhys était appuyé contre le mur, à côté de la seule fenêtre de la pièce. Elle était bordée lourds rideaux de brocard, inspirés du style victorien, d'une couleur claire qui contrastait avec le bois sombre du mobilier et apportait un peu de lumière aux murs couverts de boiseries. Située au deuxième étage du manoir, elle offrait une vue imprenable sur le parc, la forêt et les montagnes environnantes.

— L'idée est tentante...

— Il y a donc un « mais » ? devina Rhys.

Alioth, confortablement installé dans son fauteuil, renvoya la tête en arrière, absorbé par ses réflexions. Des lignes de codes défilaient à grande vitesse sur l'écran de l'ordinateur qu'ils avaient récupéré lors de la vente aux enchères. Apparemment, elles lui permettraient d'accéder au satellite, sans être détecté par les concepteurs du système de traçage. Au cas où l'envie leur prendrait, ils se trouveraient dans l'incapacité de localiser le manoir ou ses occupants.

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