Chapitre 8 : Esclave ou employé

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L'air printanier s'engouffra dans la pièce avec un subtil parfum de fleurs. Vu d'en haut, le jardin ressemblait à une aquarelle. Accoudé à la fenêtre, Seren savourait quelques instants de soleil. Les arbres bruissaient doucement sous la brise. Tout semblait si paisible.

L'odeur de poussière s'estompa rapidement. Seren en profita pour décrocher les rideaux et les remplacer par des tentures propres. Le tissu, particulièrement soyeux, lui filait entre les doigts et il dût s'y reprendre à plusieurs reprises avant de parvenir à les accrocher.

Sa tâche accomplie, il jeta un coup d'œil au reste de la bibliothèque. Des montagnes de livres, soigneusement dépoussiérés et aérés, s'entassaient un peu partout. Il poussa un soupir résigné face à l'ampleur du travail qui lui restait à accomplir.

Heureusement, il avait respecté le classement des ouvrages. Chacun des précieux volumes regagnerait rapidement sa place sur les étagères fraichement lustrées.

Seren déposa les rideaux dans le panier à linge qu'il avait laissé dans le couloir, puis retourna à l'intérieur. Il consulta l'horloge.

Plus tôt, il avait été surpris de se voir assigné un travail au deuxième étage par M. Hugues. Le majordome était particulièrement pointilleux sur l'organisation de la maisonnée et faisait rarement des entorses au planning d'entretien.

— Qu'en est-il de mes autres obligations ? s'inquiéta-t-il.

Seren terminait de balayer le grand escalier dans le hall.

— Le rangement de la bibliothèque vous occupera un bon moment. Marjory et moi nous en chargerons. Pour être honnête, vous mettez tant de cœur à l'ouvrage que j'envisage de réorganiser le planning d'entretien.

— Cela ne causera pas de problèmes ?

Seren imaginait à la réaction de Marjory, contrainte de passer l'aspirateur et la serpillère en plus de faire les lits. Il l'entendait déjà se plaindre haut et fort au déjeuner. Elle se vengerait certainement en piochant dans son assiette et en réclamant son dessert.

— Au contraire, cela me sera d'un grand secours. A mon âge, certaines activités deviennent trop pénibles, avoua la majordome. Dorénavant, vous vous en chargerez.

Il lui remit ensuite grande enveloppe blanche en carton.

— Qu'est-ce que c'est ?

— Un contrat d'un an. Renouvelable à échéance.

— Et la période d'essai ?

M. Hugues eut un large sourire.

— Elle a été amplement suffisante. Vous faites de l'excellent travail, Seren.

Il se sentit rougir sous le compliment.

— Étudiez-le soigneusement, ajouta le Majordome. S'il vous convient, il vous suffira de signer en bas de la page. Vous me transmettrez votre réponse lundi.

L'échéance lui donnait un week-end entier pour se décider. Était-il vraiment libre de refuser ?

Comme tous les domestiques, et cela incluait désormais M. Hugues, le considérerait comme un nouvel employé, il supposa qu'ils ignoraient tout de son statut. Si personne ne le traitait comme un esclave, cela ne signifiait pas qu'il était libre d'aller et venir comme bon lui semble.

L'incertitude grandissait en même temps que les questions qui se bousculaient dans sa tête. Il était facile de se perdre en conjectures quand, la seule personne capable de lui donner des réponses, ne se manifestait pas devant lui.

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