Highness

Chapitre 12 : Abus de position dominante

— Cela fait déjà deux jours, M. Rhys, s'alarma M. Hugues en récupérant le manteau et l'écharpe de Rhys. Je crains que la santé de M. Hyong ne s'en ressente.

— Il exagère ! tempêta Rhys.

Il grimpa quatre à quatre les marches du grand hall, talonné par M. Hugues. Le premier étage paraissait désert. Pour un jour de semaine, le manoir était étrangement calme. Rhys en fit la remarque au majordome.

— Il y a une fête au village ce soir. Monsieur a accordé des congés aux autres domestiques afin qu'ils aident aux préparatifs, expliqua M. Hugues.

— Excellente initiative, approuva Rhys. Où se trouve Alioth ?

M. Hugues leva les yeux vers l'étage supérieur. Rhys hocha la tête en signe d'entendement et se précipita dans les escaliers.

Dans le couloir, des halètements et des soupirs, entrecoupés de supplications le figèrent sur place. Après trois millions d'années d'abstinence, Rhys se félicitait qu'Alioth développe enfin un intérêt pour ce genre d'activités. Toutefois, un corps humain endurerait difficilement la passion d'une étoile. S'il ne se limitait pas, les dommages pourraient s'avérer irréversibles.

Un gémissement rauque l'arracha à ses réflexions. A quelles activités se livrait donc Alioth si les murs du manoir filtraient à peine la voix de Seren ?

— Alth ! Alth !! Alioth !!! OUVRE !!!! tambourina-t-il, inquiet.

Il martela la porte jusqu'à ce qu'Alioth se décide à lui ouvrir, ce qui dura une bonne dizaine de minutes.

— Que veux -tu ? accueillit Alioth, aussi impassible qu'à l'accoutumée.

Il apparut sur le seuil de la chambre, vêtu d'une chemise blanche et un jean bleu impeccables, frais comme une rose, avec cette allure inaltérable et parfaite qui avait parfois le don de l'agacer.

Rhys le poussa et jeta un coup d'œil inquiet à l'intérieur. Seren était allongé nu sur le lit, les yeux couverts d'un bandeau noir, les poignets liés par un large ruban de soie rouge, le corps couvert de marques plus explicites les unes que les autres.

Éparpillés sur les draps, il reconnut divers objets dédiés au plaisir. Il devina sans peine sur quel site Alioth se les était procuré. Aurait-il dû lui expliquer qu'ils n'avaient pas vocation à tous être utilisés, dans un si court laps de temps, sur l'innocente victime qui ornait son matelas ?

L'ensemble formait un tableau digne d'une représentation dantesque avec un ange d'innocence en son centre. Seren respirait encore. Rhys en éprouva un certain soulagement.

— Nous devons parler, déclara Rhys.

— Nous ? s'étonna Alioth, sans se départir de son calme.

— Je parle et tu écoutes, rectifia-t-il.

Alioth referma la porte derrière lui et le suivi dans le couloir. Rhys s'étonna qu'il se montre si conciliant, fait aussi incongru qu'inhabituel.

— A quoi tu joues exactement ? interrogea Rhys, déconcerté par ce qu'il avait vu dans la chambre.

— Tu veux vraiment un dessin ?

Alioth lui lança un regard sans équivoque. Décontenancé, Rhys s'efforça de masquer son étonnement.

— Tu vas trop loin, avertit-il.

— Dois-je te rappeler ce pourquoi il est là ? répartit Alioth, contrarié.

— Alioth... conjura Rhys dans une tentative d'apaisement.