Chapitre 19 : La disparition des Ashar'ans

23 4 2
                                    

Violence


Seul, Haneul resta prostré un long moment, figé dans une stupeur hagarde. L'aéronef était plongé dans la pénombre, faiblement éclairée par le sas resté ouvert après le départ de leurs assaillants.

Haneul immobilisa son poignet avec sa ceinture et rejoignit péniblement les cocons vidés de leurs occupants. Une fine poussière noire s'amoncelait devant les coquilles vides. Haneul s'agenouilla et s'inclina plusieurs fois devant chacune d'elle. La voix brisée de larmes, le corps secoué de sanglots, il les suppliait de lui pardonner.

De pâles lueurs s'élevèrent des amas de cendres. La lumière s'accrut et gagna en intensité jusqu'à devenir aveuglante. Pendant quelques seconde, la cabine baigna dans une immense clarté. Haneul plissa les yeux pour s'en protéger.

Quand il les rouvrit, la salle se noyait à nouveau dans l'obscurité. Six cristaux lévitaient au-dessus des monticules de sable noir. Singulièrement, leur couleur correspondait à celle des yeux de chacune des six étoiles.

Il les enveloppa délicatement dans un morceau de soie arraché à son vêtement. Il dissimula sa précieuse cargaison sous sa tunique et se risqua prudemment à l'extérieur du vaisseau.

« Pourvu qu'ils soient loin, souhaita-t-il fébrilement. »

Il récupéra la lame abandonnée à l'entrée et scuta les environs. Aucune trace de leur passage. Ils avaient parlé d'Alioth, mais il était peu probable qu'ils se lancent à sa recherche. Hors de stase, une étoile était invulnérable. Ils ne se risqueraient pas à s'en prendre à lui. Pas directement.

Haneul se hâta vers le pavillon. De splendides de fleurs blanches aux épines acérées couraient le long des colonnes de pierre. Il trouva l'endroit où elles s'enracinaient et s'y accroupit.

De sa cachette, il s'assura que nul ne pouvait l'observer. A l'aide de la lame, il descella une lourde pierre dans le mur contigu. Il creusa la terre avec ses doigts, déposa les cristaux dans la cavité et reboucha l'entrée avec minutie.

Il vérifia qu'il ne restait aucune trace de son passage. Seul un œil averti pourrait se rendre compte du subtil changement dans l'architecture du lieu.

Haneul rinça la lame et ses mains dans le lac. L'eau fraîche apaisa l'inflammation de son poignet. Elle lui renvoya son image, légèrement troublée. Il eut un sourire triste.

Il ne lui manquait plus qu'à corriger un dernier détail. Il honorerait bientôt la promesse faite à Hana.

Quand Haneul se releva, il se trouva face à Alioth. Il dardait sur lui ses merveilleux iris améthyste. Ses traits, si incroyablement parfaits, étaient altérés par la douleur et l'incompréhension.

Le voir si atterré lui infligea une souffrance plus insupportable que si son propre cœur lui avait été arraché.

— Maître, je suis désolé. Je suis tellement désolé, murmura-t-il.

Alioth l'appela plusieurs fois. Il le pressa de questions. Il avait l'air si désemparé. Une insondable tristesse émanait de lui.

— Mes frères... Haneul, qu'as-tu fait ? Pourquoi ?

Haneul essaya d'articuler des excuses, de lui donner des explications, mais les mots moururent sur ses lèvres avant de les franchir.

Rien n'aurait su apaiser l'insoutenable détresse de son maître ou alléger son indéniable culpabilité. Il aurait voulu implorer son pardon mais seules les larmes affluèrent de ses yeux.

Tout ce qui lui restait à faire était d'éliminer la seule chose qui menaçait encore son existence. Avec un pâle sourire, il porta la lame à son cou et se trancha la gorge.

HighnessOù les histoires vivent. Découvrez maintenant