Chapitre 14

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Plongé dans mes souvenirs, je n'écoute qu'à demi-mot ce que me dit Andrew :

- Et bien après ça, je suis devenu morose et je m'en voulait de ne pas pouvoir être là pour toi lorsque ça s'est passé. Je pensais à toi tout le temps et j'en suis presque devenu fou de chagrin. Je devenais incontrôlable et même mon père n'arrivait plus à me calmer. C'est suite à ça que j'ai pris mon indépendance. Être loin de toi me pesait alors j'ai décidé de faire mes propres recherches sur toi. Si je ne pouvais pas être là auprès de toi, pourquoi ne pas l'être lorsque je suis loin. Alors même sur un autre continent, j'ai continué de suivre ta vie avec minutie et j'ai envoyé l'un de gars, Anton, chercher des infos sur toi. Je sais que ça fait flipper, vu comme ça, mais j'en avais vraiment besoin pour te laisser vivre ta vie tranquillement, plus ou moins heureux, termine-t-il avec une pointe de tristesse dans la voix.

- Pourquoi n'être pas venu en France directement ? Lui demandé-je abasourdi qu'il est si mal vécu un truc qui m'est arrivé à moi.

- C'était impossible, j'étais en fac de droit et mon père menaçait de me retirer les vivres si j'allais te voir. Ce n'est qu'un plus tard que j'ai réussi à réunir les fonds nécessaires pour fonder une meute. Et arriver un an après ton agression, je me suis dit que ce serait trop tard donc j'ai continué ma vie et j'ai fait en sorte d'aller bien.

- Ça n'est jamais trop tard ! Tu aurais dû te battre pour me voir, si tu m'aimais vraiment ! Commencé-je à m'énerver.

- Je sais, mais me dire que tu allais me voire sans me reconnaître, je me suis dit que ce ne serait pas sain. Et... Bordel, Alex, tu avais quatorze ans et moi vingt ! Comment aurais-je pu, venir, et t'embrasser comme si de rien n'était ?

- Je sais, je suis désolé que ça se soit passé comme ça et que ça t'ai fait souffrir, murmuré-je.

Un silence s'installe et je ne sais pas comment réagir à ça. Est-ce qu'il m'en veut ?

Pour combler le malaise qui semble s'être installé, je lui propose de faire à manger, parce que j'ai la dalle. Il accepte et pendant que je cuisine, l'ambiance semble se détendre. Nous discutons de tout et de rien, de la pluie et du beau temps, comme de vieux amis et j'ai l'impression d'avoir vécu ce moments mille fois avec lui, tellement c'est naturel. Je décide de faire un risotto à la crevette.

Nous nous régalons et malgré tout, quelque chose me chiffonne. Tout à coup, ce petit détails qui me dérangeait me frappe.

- Tu devrais pas être au boulot ? Lui demandé-je en le coupant dans sa phrase et en fronçant les sourcils.

- Quoi ? Je te dérange tant que ça ? Me dit-il avec un sourire taquin.

- Non, ce n'est pas ça, m'expliqué-je, désarçonné par sa réponse. C'est juste que j'ai beaucoup dormi et que je ne sais pas quel jours nous sommes.

- Ne t'inquiète pas, aujourd'hui nous sommes dimanche et je n'ai pas beaucoup de travail, j'ai fini une grosse affaire il y a deux jours. Et je rigolais, alors, encore une fois, ne t'inquiète pas, me dit-il cette fois avec un sourire apaisant.

- Ah ! Mais c'est pour ça que tu avais l'air fatigué quand tu est venu me voir, l'autre jour ! M'exclamé-je en réalisant.

Il rigole doucement et je hausse un sourcil face à cette réaction étrange de sa part. Bah ? Pourquoi il rigole comme ça ? J'ai dit quelque chose de drôle ?

- Qu'est-ce qu'il y a ? J'ai dit quelque chose qu'il ne fallait pas ?

- Non, ce n'est pas ça, rigole-t-il de plus belle. La façon dont tu l'as dit m'a fait rire. J'ai l'impression, des fois, que tu es si naïf, m'explique-t-il avec nostalgie.

Je me lève, sans rien dire, et débarrasse la table. Je sens qu'il est contrarié par ma réaction, ou plutôt par ma "non-réaction". Je ne sais pas quoi répondre, c'est tout.

- Hey, Alex, pourquoi tu ne dis rien ? Me demande-t-il d'une voix toute douce.

Je hausse les épaules et lui dit juste :

- Bah, parce que je ne sais pas quoi dire.

- OK, et je sens le soulagement dans voix.

Lorsque je pose les assiettes sur le plan de travail, je sens deux bras chauds et puissants entourer mes épaules. Sa tête s'appuie sur mon épaule, et au moment où je sens son souffle sur mon omoplate, j'ai l'impression qu'une nuée de papillons s'envolent dans mon estomac. Il pose doucement sa bouche sur mon épaule, plus précisément sur l'une de mes cicatrices, et je sens la chaleur monter. Bizarrement, ça ne me dégoûte pas qu'il les touche de cette manière, par dessus mon t-shirt, au contraire, j'aimerais qu'il continu. Malheureusement, ce n'est pas le cas.

Toujours dos à lui, il commence à me faire des papouilles dans les cheveux. Il me les caresse doucement et je me sens apaisé. Puis, il commence à me masser doucement les épaules, une main sur chacune de mes omoplates, et me fait la remarque :

- T'es tout tendu, là et là, dit-en appuyant sur des points sensibles à la base de mon cou.

Je ne sais pas comment il fait ça, mais c'est pile l'endroit où j'ai mal lorsque je me tiens trop longtemps debout, courbé, ou que je suis stressé.

- Ça te dit un massage ? Me demande-t-il, ce que j'accepte avec joie.

Il me guide vers le lit et, avant que je m'y allonge, il refait les couvertures, pour que ce soit plus agréable, j'imagine. J'enlève mes chaussures, me couche sur la couette, à plat ventre, et il me demande où est-ce qu'il peut trouver de l'huile de massage. Je lui indique la position de la bouteille, qui se trouve dans ma salle de bain.

Il revient, et se met à califourchon sur mon bassin. Je sens une rougeur me monter aux joues, mais je ne dis rien, attendant la suite. Doucement, il glisse les mains sous mon t-shirt et le remonte délicatement jusqu'au milieu de mon dos. Il m'observe, moi, mes cicatrices ainsi que ma peau abîmée sans rien dire et je me tends. Les questions fusent dans ma tête ; "Et si je le dégoûtais ?". Celle-là me revient particulièrement en tête.

Comme pour m'affirmer le contraire, il me fait un bisous sur mon omoplate gauche, ce qui me rassure, irrémédiablement. Il me demande, la voix inquiète, mais toujours d'un ton doux, qui se veut rassurant :

- Hey, trésor, est-ce que ça va ?

Ce surnom me donne des frissons, alors, embarrassé, je hoche simplement la tête.

- OK, alors si tout va bien, je peux continuer ? Pour toute réponse, je hoche la tête une deuxième fois, fébrile. Tu me dis tu ne le sens pas ou que ça ne va pas, OK ?

Dans un murmure inaudible, je lâche un petit "oui", que je suis sûr qu'il a entendu.

Il m'enlève mon t-shirt, totalement. Il se penche vers moi, doucement, et ses mains remontent, lentement, vers mes épaules. Je sens son souffle sur ma peau, ce qui me donne des frissons incontrôlables. J'ai toujours été extrêmement chatouilleux, même dans les moments les plus délicats. Je lâche un petit rire et ça le fait rigoler, lui aussi. Il se moque légèrement de moi, là, ou je rêve ?

- Alors, comme ça, tu crains les chatouilles ?

J'enfouis ma tête dans l'un des oreillers et ne cherche pas à nier. De toutes manières, ça ne servirait à rien de le contredire, je suis sûr qu'il l'aurait découvert un jour ou l'autre.

Reprenant son sérieux, il se redresse, et commence à masser mes omoplates ainsi que la base de mon cou avec l'huile de massage sur les mains. Ça fait du bien...

Au bout d'un moment qui me paraît être une éternité, je me sens sombrer vers un demi-sommeil, puis sans que je ne m'en aperçoive, je tombe dans les bras de Morphée.

La Lune RousseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant