Chapitre 20

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Je suis rentré à la meute vers dix-neuf heures, sachant pertinemment que Andrew ne serait pas content du tout que je sois parti sans le prévenir. Bon, j'ai relativisé en me disant que c'était vraiment urgent et que si je n'étais pas arrivé à temps, papy ne serait plus en vie en ce moment. Encore une fois, s'il n'en est pas content, c'est son affaire.

Lorsque je passe le portail, je passe devant deux loups que je ne connais pas. Je ralentis pour leur dire bonjour et ils me répondent que l'alpha m'attends, d'un ton alerté, comme pour me prévenir. Je ne rétorque rien et accélère sur le petit chemin, commençant doucement à m'inquiéter.

Au moment où j'arrive devant la villa et que je descends du véhicule, une rafale me serre dans ses bras. Dans cette étreinte puissante, j'entre-aperçoit Amy qui arbore une mine inquiète. Jacie se tient derrière et ne dit rien, le visage alarmé. La première me dit d'un ton affolé en me palpant le visage à la manière d'une grand-mère :

- Ça va ? Tu es blessé ? Oh mon Dieu, tu as du sang sur ton haut ! S'exclame-t-elle en remarquant les restes du sang de papy.

Je soupire, assailli par toutes ces questions. Pour la calmer, je réponds à toutes ses interrogations :

- Hey, calme-toi, mon grand-père va bien, je vais bien, et tout le monde va bien, dis-je en insistant sur le dernier mot.

Elle se met à rigoler nerveusement, apparemment soulagée. Petit détail, il y a quelque chose qui semble la chiffonner, alors je l'interroge :

- Ça ne va pas ? Et en même temps que je dis ça, un petit froncement de sourcil vient plisser mon visage.

Le rire de Amy devient de plus en plus en insistant, et Jacie semble se tortiller sur elle-même, comme si quelque chose la gênait ou même qu'elle avait peur.

C'est Logan qui met fin au malaise et qui me dit :

- Tu devrais aller le voir.

Je sais au ton de sa voix que ça ne rigole pas et que c'est fois, c'est sérieux. Très sérieux. Et qu'il parle d'Andrew.

Au moment où je me rends vers son bureau, endroit où j'avais supposé qu'il serait, James me redirige à la plage, en m'arrêtant avec seulement quelques mots. Je sens qu'il y a de la tension dans sa voix :

- Pas par là, il est près de la mer, il avait besoin de se calmer.

Lorsque je descends la petite pente qui mène à la plage privatisée, je le vois de loin, transformé en un loup massif, mais qui me semble magnifique. Je m'approche doucement, et je sais qu'il m'a entendu, parce que ses oreilles ont légèrement bougées. Il tourne légèrement la tête vers moi, et j'aperçois deux yeux pareils à des rubis. Il est en colère.

Il est allongé et sa gueule repose doucement sur ses pattes avant. Alors que je m'assoie, j'entends un léger couinement, qui m'attriste énormément car ça le fait souffrir. Je fixe ses yeux et ce que j'y vois me fait monter une émotion inconnue, comme une... chaleur dans le ventre. Mais ce qui suit est bien moins plaisant parce c'est un une sorte de douleur sourde du plus profond de mes tripes qui grandit de plus en plus en moi, comme un gros chagrin exagéré.

Les larmes me montent aux yeux et je ne sais pas pourquoi, mais j'ai tout a coup envie de tout casser, comme si j'étais en colère, alors que je n'ai aucunes raisons de l'être. Aucunes raisons apparentes, tout du moins.

Je ramène mes jambes et mets ma tête dessus, comme pour me protéger de tout, de la vie et de tout ce qu'il en ressort. Bordel...

C'est comme si... Comme si, je commençais à tomber amoureux de lui alors que je m'étais déjà, une sensation merveilleuse mais qui me donne une affreuse anxiété. Je lui fais peur, avec mes comportements à la con, je suis impulsif et lui si patient. Je ne le mérite pas, je le sais et ça me procure une immense affliction.

Et papy qui a failli mourir, je me suis vu sa mort imminente aujourd'hui. Quelque chose de terrible qui m'aurait tué à mon tour. J'ai peur de... De l'abandon, je crois. Et si tout le monde partait ? Qu'ils se rendaient compte que je ne suis qu'un minable ? Quelque chose d'insignifiant ?

Les sanglots assaillent mon cœur ainsi que ma cœur, mes poumons et tout mon corps, et j'ai du mal à respirer, j'inhale difficilement et j'ai l'impression de mourir, étouffé par ma propre respiration. À l'aide...

- Alex !

La voix de Andy' me parait si loin maintenant... Faites qu'il me vienne en aide, je l'aime tellement, je ne veux pas qu'il s'en aille...

***

Andrew :

- Alors comment va-t-il ? Me demande Amy, inquiète.

- Il dort, je réponds, la mine fermée.

Après sa crise d'angoisse, il s'est endormi dans mes bras. Il se grattait partout, mais surtout sur ses bras, comme s'il voulait arracher sa propre peau. J'ai bien vu ses cicatrices, je ne suis pas aveugle. J'ai vu aussi que c'était ce qui le dérangeait sur le moment et j'avais l'impression qu'il voulait sortir de son propre corps, comme si sa peau n'était qu'un costume qu'il pouvait enlever à sa guise.

J'ai eu vraiment peur, parce que j'avais l'impression qu'il s'étouffait. Quand j'ai senti son profond désespoir, je me suis vite transformé en homme pour essayer de le rassurer.

Il faut qu'il voit un psy, je ne pourrait pas l'aider si ça continue comme ça. Je pense qu'il ne s'est pas totalement rétabli de toutes les épreuves qu'il a traversé. J'ai beau essayer d'être conciliant, j'ai une meute et un cabinet d'avocats à gérer. Je ne peux pas me mettre dans tous mes états à chaque fois qu'il fait n'importe quoi. J'ai besoin d'être rassuré. De me dire que « ok, tout va bien ». Je lui en parlerait dans quelques jours, quand il se sera remis de ses émotions.

Après cet épisode de détresse puissante, je l'ai couché dans ma chambre, sous les regards inquiets de la meute. Ils ont tous entendus ses pleurs et ont senti son chagrin.

Je sais qu'il faut qu'il reste en sécurité ici, car le danger plane parmi nous, je ne me suis pas fait seulement des amis en devenant alpha et les meutes aux alentours pourraient frapper à tout moment. Je crains le moment où il ne sera plus en sécurité ici plus que personne.

La Lune RousseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant