Chapitre 32

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Zeik mentirait s'il disait ne pas savoir comment il s'était retrouvé dans une telle situation. Il en avait parfaitement conscience, il ne pouvait pas mentir. La vérité, c'est qu'il l'avait voulu. Il se sentait si mal, si seul, tellement perdu. Il avait besoin de sentir quelqu'un auprès de lui, il avait besoin du contact physique, il voulait sentir la chaleur humaine. Il n'avait pas trop bu, il n'avait rien pris, ce n'était que le fruit de sa volonté.

Ash et lui étaient sous les couvertures, plongés dans le noir de la chambre. En réalité, ils n'avaient besoin d'aucune couverture pour avoir chaud. Collés l'un à l'autre, ils repoussaient l'un l'autre l'éventuel froid ambiant.

Zeik appréciait chacune des caresses qu'il recevait. Il aimait sentir les lèvres de son partenaire sur chacune parcelle de son corps. Il appréciait son contact, autant que s'il avait été avec son copain. Une petite voix au fond de lui, lui disait, lui répétait encore une fois que c'était mal, terriblement mal de ressentir cela. Il ne devait pas, pas une nouvelle fois. Il avait passé tant de temps à s'en vouloir, à regretter, à chercher comment l'annoncer et s'excuser auprès d'Ekel. Il ne pouvait pas recommencer.

Pourtant, lorsqu'il sentit Ash en lui une nouvelle fois, il ne regretta pas. Il aima même l'instant. Il goûta chaque moment, appréciant ce court répit qu'il lui offrait. Dans les bras du capitaine, caché dans le noir, perdu dans un plaisir coupable, il ne pensa plus au départ de son père. Il ne pensa plus non plus à ce sentiment de culpabilité, cette honte qui s'était emparé de lui, au fait de ne pas avoir pu dire au revoir.

Il avait la sensation de prendre une bouffée d'air frais. Courte, certes, mais bénéfique. Il aurait bien le temps de regretter pour la suite. Sur l'heure il profitait seulement. Il en avait marre de se prendre la tête. Il avait besoin de respirer, juste un instant. Il était conscient de ne pas être avec la bonne personne pour cela. Ash était un bon ami mais Ekel était son copain. C'était avec lui qu'il devait régler ce genre de situation. C'était dans ses bras qu'il aurait dû se trouver.

Ekel n'était pas là et ce contact physique, il en avait terriblement besoin.

- Je suis désolé Zeik... On a encore dérapé toi et moi.

Calmant autant son rythme cardiaque que sa respiration, l'Asiatique resta collé à son camarade, malgré la chaleur ambiante. Un faible sourire s'afficha sur son visage, même si, dans le noir il n'était pas visible.

- Ne t'excuse pas. C'est moi qui l'ai voulu. Je... J'en avais besoin je crois.

- Oui mais tu aurais dû être avec ton copain.

- Il n'est pas là.

Ash bougea, Zeik le sentit. Il s'éloigna un peu de lui, sans quitter pour autant le lit.

- C'est moi qui t'ai demandé de venir aujourd'hui. Moi encore qui t'ai incité à rester, à venir dans la chambre, insista le japonais.

- J'ai l'impression de profiter de la situation... Tu sais quels sentiments j'ai pour toi. Habituellement, j'arrive à les mettre de côté, mais quand je peux, oui j'ai la sensation d'en profiter.

- Et c'est si mal que ça, si c'est moi qui te le demande ?

- Disons que je sais ce que tu traverses, je sais les difficultés que ça engendre, je sais aussi que tu as besoin d'aide, de ne pas être seul. C'est pour ça que je suis là. Mais ce qu'on vient de faire, là, j'aurais dû refuser. Je ne sais pas si ça t'aide vraiment...

Zeik se mit sur le dos et fixa un point invisible dans l'obscurité.

- Ça m'a aidé à ne pas penser à autre chose, même si ce n'est que pour un court instant.

- Pense à après, à ton copain...

- Je passe mon temps à ça. Penser à avant, à après, à ce que peuvent penser les autres. Je suis fatigué de toujours me poser les mêmes questions. Je me dis toujours que chacun de mes choix est le mauvais ! Je suis perdu Ash. Je ne sais plus quoi faire, quoi penser. J'avais juste besoin de souffler un peu.

Il tourna son regard vers Ash assis dans le lit à côté de lui.

- La première fois j'ai aimé mais regretté. Cette fois, je suis même pas sûr de regretter... Est-ce que ça montre à quel point je suis... Déboussolé ? Je trompe mon copain, pour la seconde fois, lorsque rien ne va dans ma vie et je ne suis même pas sûr de le regretter... Au fond est-ce que ce n'est pas moi qui me sers de la situation et qui profite de toi ?

Ash lâcha un soupir qui se voulu plus discret.

- Nous commettons des erreurs tous les deux.

- Je... Je t'apprécie beaucoup Ash.

- Je sais.

- J'ai... Je n'ai pas envie de détruire la relation qu'on a. Je l'ai jamais voulu.

- Je sais aussi. Je ne t'en veux pas tu sais. Ça va peut-être prendre du temps, mais la situation va s'arranger, tu vas surmonter tout ça.

- Je vais essayer du moins... Je vais parler avec Ekel aussi, il a le droit de savoir. Je ne sais pas comment il va le prendre mais il faut que je lui dise.

- Bien sûr.

Comme pour conclure cette conversation qui, au final, venait de faire autant de bien à l'un qu'à l'autre, Zeik reprit Ash dans ses bras. Un simple câlin, plus amical que sensuel. Un nouveau contact rassurant.

Soudain, la lumière s'alluma. Ils sursautèrent en même temps.

- Alors c'est ce que tu fais en mon absence ?

Tel un robot, Zeik tourna la tête vers la porte de la chambre. Il ne s'attendait pas à le voir, lui, ici, son sac encore sur l'épaule.

- Ekel...

- J'ai pris le premier train que je pouvais pour revenir. Tu as perdu ton père, tu ne vas pas bien et je te trouve avec un autre au lit ? Tu vas mieux que je ne le pensais finalement.

Ekel quitta l'encadrement de la porte et s'éloigna. Zeik n'eut même pas un regard pour Ash à côté de lui. Il sauta du lit et couru à la poursuite de son copain.

- Ekel attend !

L'aîné fit un geste, limite trop violent, pour repousser la main que Zeik tendait vers lui.

- Non Zeik, tu fais ce que tu veux. Je ne veux rien savoir !

- Ekel s'il te plaît !

- Laisse-moi Zeik.

Le photographe quitta l'appartement en claquant la porte derrière lui. Il laissa un Zeik sans voix au milieu du salon.

Une larme coula sur sa joue, silencieuse. Elle fut suivie par d'autres. Il ne parvint à en retenir aucune. 

Un Jour Ils Comprendront - Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant