Chapitre 36

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Zeik fixa le vieux panier de basket. Il avait un ballon qu'il ne cessait de faire passer d'une main à l'autre, sans pour autant le lancer. Il n'y parvenait pas. Marquer n'avait jamais été sa spécialité. Ce n'était pas nouveau. Pour autant, il savait parfaitement lancer un ballon dans un panier. Il avait conscience que ses capacités physiques n'étaient pas le problème. Tout résidait dans sa tête.

Oui, il vivait un véritable blocage.

Le basket avait toujours été son jardin secret, son petit coin de paradis, sa porte de sortie lorsqu'il n'allait pas bien. Cette fois, il ne suffisait plus.

Il venait de vivre l'enterrement de son père, sans même qu'il n'ait pu lui dire réellement au revoir. Ekel refusait de lui parler et il comprenait pourquoi. Il ne pouvait même pas lui envoyer le moindre message, il l'avait bloqué. Ne pas pouvoir s'excuser le torturait et en même temps il ignorait comment le faire. Si Ekel se trouvait là, devant lui, que lui dirait-il ? Quel mot utiliserait-il ? Arriverait-il à se racheter ? À ne pas commettre de nouvelle erreur ? Il l'ignorait.

Il avait la sensation d'avoir été propulsé dans un pays inconnu, sans aucune carte pour se guider.

D'un geste lent, mécanique, mille fois répété, il fit rebondir le ballon au sol. D'un point de vue extérieur, une personne aurait eu la sensation de voir en boucle et au ralenti, la même scène d'un film. Lui essayait simplement de se frayer un chemin au milieu de ses pensées.

Ekel.

Ash.

Son père.

Sa mère.

Cette dernière avait décidé de mettre en vente la maison et de venir s'installer ici, plus près de son fils. Comme si le départ du père et mari avait été un nouveau déclencheur pour véritablement renouer avec le fils. Oui elle était restée en contact, elle s'était inquiétée, mais il s'était si rarement vu. La elle déménageait. Elle lui avait même demandé s'il pouvait l'héberger dans un premier temps. Il n'avait pu refuser la demande. Avoir sa mère auprès de lui... Trois ans qu'il attendait de vivre de nouveau cela. Sur l'heure il avait juste la sensation que c'était un fait venant s'ajouter au reste. Un nouveau point à gérer.

Le chemin devant lui bifurquer dans trop de directions différentes.

- Tu sais, on ne va pas pouvoir éternellement dire que tu es malade à la fac.

Zeik cessa de faire rebondir son ballon. Il le garda en main et se retourna lentement. Pourquoi, durant un court instant, il avait eu l'espoir que ce soit Ekel ? Alors que, à la voix, à la phrase, il savait parfaitement que ce n'était pas lui.

- Je sais Ash.

- Tu manques à l'équipe.

- Je vais revenir. Ma mère arrive demain à l'appartement. Je l'aide à s'installer, après je reviens à la fac.

Ash esquissa un petit sourire, sa manière à lui d'accepter l'information. Il prit le ballon des mains de son camarade et le lança droit dans le panier. Il ne manqua pas sa cible et l'objet sphérique retomba au sol.

- Comment tu te sens ? Finit-il par demander en récupérant la balle.

Zeik se contenta de hausser les épaules.

- Comme quelqu'un qui a enterré un père avec qui il n'avait plus de lien depuis près de trois ans et qui a perdu son petit ami en prime, ajouta-t-il finalement.

La colère, la tristesse, la confusion : tous se mélangeaient dans sa voix. Il était impossible de passer à côté.

- Ma question était bête, excuse-moi.

Un Jour Ils Comprendront - Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant