31.Merry christmas

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Deux semaines. C'est le temps passé depuis que j'ai parlé pour la dernière fois à Liam.

Nous ne nous sommes pas revu depuis. Aucun de nous n'a essayé de parler à l'autre.

La boule dans mon ventre s'agrandit à l'entente de mon prénom.

-"Livie." Articule ma mère au pas de ma porte. Elle disparaît aussitôt parce qu'il n'y a pas besoin d'en dire plus.

Il est l'heure de manger. Un repas plus élaboré que d'habitude. Un repas de  Noël. Je ne me sens pas prête à passer cette épreuve. Je n'ai pas faim.

Elle a certainement passé son après-midi à cuisiner parce que c'est son seul divertissement. Parfois je me suis demandé si nous aurions pu nous entendre toutes les deux si elle était réceptive.

Mais je ne le saurais jamais parce que ce n'est pas le cas.

Elle est seule et je le vois. Mais elle, ne voit pas ma solitude ou peut-être bien qu'elle fait comme si elle ne la voyait pas.

Je me lève de mon lit défait et m'empresse de traverser cette suite de couloirs et d'escaliers. Une odeur de dinde emplit mes narines une fois que je passe le seuil de la porte de la salle à manger.

Je cache la peur qui pourrait apparaître sur mon visage quand je découvre mon père installé sur son fauteil habituel du bout de la grande table. Son sourcil gauche légèrement remonté me montre qu'il a eu sa dose.

Parce qu'il semble extrêmement calme et ce n'est pas bon du tout. On dit que c'est le calme avant la tempête. Et j'espère que je ne serais pas là au moment où elle apparaitra.

Je m'installe à sa droite en pinçant mes lèvres. Il observe chacun de mes gestes alors que je m'assois doucement sur le coussin rouge en velour. Je ne suis pas dans l'extravagance des paillettes ce soir, une simple jupe noire fait l'affaire. Oui nous fêtons le réveillon de Noël le vingt-trois parce que le vingt-quatre ils partent chez leur famille respective.

Je n'y suis jamais allée car même si certains de ses collègues ou plutôt associés sont au courant pour mon existence, étrangement leur famille non.

Celle qui devrait être aussi la mienne.

Mais je n'en ai pas le droit. Je n'existe pour personne. Parfois j'imagine des hommes et des femmes en parfaite harmonies avec peut-être des cousins ou des cousines. Mais eux ne seraient pas comme mes parents.  C'est un sentiment que j'ai.

Ma mère revient avec des plats qu'elle ramène en plusieurs fois. Personne ne rompt ce silence de mort.

Je ne me sens pas à ma place et ce n'est pas qu'un ressenti. C'est la réalité. La réalité étant que je suis obligée d'assister à chaque repas. Et croyez le où non, mon père est croyant et cette fête lui tiens particulièrement à coeur.

La femme se penche en avant pour attraper mon assiette. Je scrute les portions. Les quantités. Et il est évident qu'elle rempli cette assiette jusqu'à ras du bord.

Parce qu'il faut que je grossisse, c'est ce qu'elle se fatigue à me répéter à chaque fois.

Après s'être attelé à la tâche pour moi, c'est au tour de mon père. Son assiette est aussi copieuse que la mienne. Pourtant la différence est que je n'ai pas sa carrure.

Elle se saisit d'un couteau fin et long pour séparer les cuisses de la dinde. J'ai le droit à la plus grosse...

Le bruit métalique me donne la chair de poule et d'autant plus lorsque je vois qu'elle est sur les nerfs. Qu'elle fait ça avec force et sévérité.

love from a lieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant