Chapitre 7

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Jia

Je déteste les maths. Non, rectifications, je les hais. De toute mon âme.

Malheureusement, on ne peut pas se battre contre des chiffres, et jusqu'ici, ce sont toujours eux qui m'ont mis K-O. Ce cours-ci ne sera pas une exception.

-Eh Jia !

Je relevais la tête, à la fois agacée d'avoir été déconcentrée, mais aussi soulagée d'avoir un prétexte pour relever la tête de mon cahier. Je ne comprenais rien à rien, de toute façon.

-Ouais ? grognais-je à l'intention de Maï-Linh qui me fixait intensément, des étincelles d'excitation dans le regard, qu'est-ce qu'il y a ?

Elle ne sembla pas relever le sous entendu et, après avoir vérifié que la prof ne faisait pas attention à nous, me chuchota :

-Je peux te poser une question ?

-Tu viens de le faire, répliquais-je tout en tentant de griffoner un début de raisonnement sur le papier.

-Blague à part, fit l'autre en agitant sa main comme si ma remarque n'était rien d'autre qu'un vulgaire insecte, tu vois les deux garçons avec qui tu es partie l'autre jour ?

Je continuais d'écrire sur mon cahier ( ou, en tout cas, de faire semblant) en me concentrant le plus possible sur le grattemment de mon stylo sur le papier :

-Mmmh... Eh ben ?

-Tu veux bien me les présenter ? demanda-t-elle précipitamment, comme si elle avait peur de se brûler la langue.

Je gardais mon stylo en suspens, au dessus de ma feuille, puis recommençais aussitôt à écrire :

-Pourquoi ? fis-je tout en gardant les yeux obstinément virés sur mon cahier

-Parce que... disons, que j'aime bien faire dans le sociable.

Autrement dis "je veux me les mettre dans la poche".

 Je laissais tomber mon stylo sur ma table et relevais la tête et fixais la brune bien droit dans les yeux :

-Écoute-moi bien, Maï-Linh...

-J't'ai déjà dit que tu pouvais m'appeler "Linh", me coupa celle-ci.

Elle insistait toujours sur ce point, mais moi aussi je suis têtue : de mon point de vue, lui donner cette satisfaction, c'était lui laisser croire qu'on était potes. C'était la dernière chose que je voulais.

-...si tu veux faire connaissance avec l'un d'eux, tu vas les voir, tu te présentes et tu l'invite à boire un truc, ou j'sais quoi d'autre. Mais me mêle pas à ça, complétais-je sèchement.

-Mais...

-Mesdemoiselles ! tonna la prof de maths depuis l'autre bout de la salle, un peu de concentration s'il vous plaît ! Vous aurez tout le temps de discuter après !

-Oui madame, marmonnais-je entre mes dents

Je revins immédiatement à mon début de raisonnement... avant de me rendre compte que j'avais simplement jeté sur le papier des mots sans queue ni tête. Par dessus la page que j'arrachais, la voix de Maï-Linh se fit de nouveau entendre : 

-S'il te plaît Jia...

Elle me lâchera jamais, celle là.

Je soufflais bruyamment par la bouche, histoire de bien lui faire comprendre que cette histoire de présentation commençais sérieusement à me taper sur les nerfs.

-Je les vois ce soir, t'as qu'à m'accompagner. Mais après, tu me fiche la paix ! ajoutais-je en lui collant mon stylo à 5 cm de son visage

Le regard de Maï-Linh s'illumina et elle poussa un petit cri de joie avant de se retourner, pour de bon j'espère.


Chifuyu

-Derrière vous !

La voix de Jia résonna comme un claquement de fouet. J'opérais un demi-tour en même temps que Baji, et m'apprêtais à lui demander ce qui n'allait pas lorsque je remarquais une forme féminine derrière elle.

La fille en question portait son uniforme parfaitement ajusté à sa taille : elle avait un teint caramélisé, de longs cheveux noirs et bouclés qui lui tombaient jusqu'en dessous des épaules et des yeux de la même couleur. On aurait dit qu'elle sortait tout droit d'un magazine people.

-C'est qui ? demanda Baji 

Il avait enlevé ses lunettes et il fixait Jia, les sourcils froncés, ce qui voulait dire "c'est pas le moment de nous amener tes potes". La blonde vénitienne lui rendit son regard, l'air de dire "j'y peux rien".

-C'est... commença-t-elle

-Maï-Linh ! compléta son amie

Dans le dos de celle-ci, je vis Jia lui jeter un regard noir. Je me mordit les joues pour ne pas éclater de rire.
Je sentis un regard insistant se poser sur moi, et m'aperçus que c'était Maï-Linh qui me fixait intensément. Elle était très jolie, mais quelque chose me gênait chez elle, voire me dégoûtait : peut être sa façon de me regarder, ou alors le fait qu'elle ne cesse d'entortiller une mèche de ses cheveux aux reflets parfaits autour de son index, ou encore qu'elle gigote dans tous les sens comme si elle voulait se réchauffer les jambes.

-Bon, intervint Baji, c'est pas qu'on s'emmerde, mais on doit y aller !

Il attrapa fermement Jia par le bras et ajouta à l'adresse de Maï-Linh :

-À plus !

***

Baji :

-Qu'est ce qui t'as pris de l'amener ?!

Jia se dégagea souplement et répliqua :

-C'est elle qui a voulut me coller aux basques jusqu'ici !

-Et pourquoi tu lui a pas dit de dégager ?!

Elle croisa les bras sur sa poitrine :

-Je fais que ça depuis le début de l'année ! Elle et sa sœur jumelle arrêtent pas de me coller au cul, et même si je leur gueulais dessus, elle seraient incapables de capter que je veux PAS être leur pote !

Chifuyu eut un air tout aussi surpris que moi :

-Ah, parce que vous êtes pas potes ?

- Regardez moi, bien, tous les deux. J'ai une tête à vouloir être pote avec deux miss parfaite ? 

Non, sûrement pas.

Elle avait plutôt l'air d'être le genre de personne à qui il ne fallait pas adresser la parole le matin sous peine de mort violente.

Nous continuâmes de marcher en silence, jusqu'à ce que je décide de le briser à nouveau :

-T'aimes les nouilles peyoung, Jia ?

Celle ci releva la tête vers moi et, pour la première fois depuis que je la connaissais, une étincelle d'amabilité, si infime soit-elle, passa dans son regard :

-Tu déconnes ? J'adore ça.

-Eh ben on va en acheter ! m'exclamais-je en accélérant le pas, comme ça on pourra parler tranquillement !

Au bout de 3 mètres, je me tournais vers les deux blonds :

-Le dernier arrivé paye pour les autres, alors grouillez-vous !

Will u be my bad boy ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant