Chapitre 34

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Sakura

Le claquement de la porte de la chambre de Jia fit trembler les murs de l'appartement.

-Qu'est ce qui lui arrive ? demanda Akio qui avait tout suivit depuis la cuisine, elle a le regard vitreux.

-Je ne sais pas... m'inquiétai-je, tu crois qu'elle est malade ou quelque chose comme ç... ?

Soudain, avant même que j'aie pu terminer ma phrase, un cri douloureusement plaintif déchira l'atmosphère : c'était ce genre de cri qui résonnait plusieurs fois dans vos oreilles, ceux d'un animal blessé qui crierait à l'aide de toutes ses forces. Prise par surprise, je laissais tomber l'assiette que je tenais entre mes mains, qui se brisa en mille morceaux en tombant sur le sol. Sans même prendre la peine de nettoyer le tout, je me précipitai sur le talons de mon mari qui se dirigeait déjà en direction de la porte de notre aînée.

Il ouvrit d'un coup le battant, sans même prendre la peine de frapper, pour y découvrir le spectacle le plus désolant que nous ayons jamais vu : à genoux sur le sol, se tenait Jia, recroquevillée vers l'avant, se tenant les épaules alors qu'elle tremblait de tous ses membres. Malgré son épaisse chevelure qui cachait son visage, on voyait clairement de grosses larmes qui venaient s'écraser sur le parquet alors qu'elle reniflait entre deux gémissements lancinants.

Il n'y a rien de plus douloureux pour un parent que de voir son enfant pleurer : avec celui-ci, c'est une partie de son âme qui se plaint. On veut absolument le rassurer, lui dire que tout va bien se passer, mais quand l'enfant se renferme sur lui même en se persuadant du contraire, les mots restent coincés dans notre gorge en formant une boule qui s'agrandit au fur et à mesure, nous empêchant de respirer. A ce moment là, notre cœur se compresse dans notre poitrine, on a l'impression de suffoquer. On ne peut rien faire d'autre que de tenir l'enfant dans nos bras, comme s'ils étaient une barrière suffisamment puissante pour le protéger de sa douleur. On tente désespérément de trouver une solution pour arrêter son chagrin, et on culpabilise quand on n'y arrive pas.

Et puis, soudainement, les pleurs s'arrêtent. C'est le calme après la tempête. On tend timidement un mouchoir à notre progéniture adorée, qui se mouche dedans, essuie ses larmes, et la vie reprend.

Parfois, quand ils sont plus grands, on leur dit d'arrêter tout de suite leurs gamineries, que ce n'est pas comme ça que leurs problèmes allaient s'arranger. Erreur. Au fond de nous, on s'en veut d'avoir dit ça, mais c'est trop tard : les mots sont sortis de notre bouche, et quand on a pris conscience qu'on ne venait que d'ajouter un poids sur la conscience de notre bambin, soit ion s'en veut, soit on nie la réalité. De toutes façon, on sera pas toujours là pour lui tenir la main, alors qu'il s'endurcisse un peu tout seul, ça l'aidera bien à se préparer pour plus tard ! Erreur, erreur, erreur. Au plus profond de leur être, et quelque soit leur âge, ils veulent être consolés. Ils en ont besoin, malgré le fait qu'ils nous répètent encore, et encore qu'ils sont assez grands pour se gérer tous seuls. Après tout, ce n'est pas pour rien que se sont encore des enfants.

Mais avec Jia, je savais pertinemment qu'aucune des deux solutions ne fonctionnerait vraiment parfaitement. Sa couverture de glace et de marbre qui tombait dès qu'elle franchisait le pas de la porte de l'appartement venait encore une fois de la trahir pour révéler la petite fille qu'elle a toujours été : enjouée, attentionnée et surtout, sensible. Amoureuse, aussi.

Et, à présent, terriblement brisée.

Nous nous approchâmes d'elle à pas feutrés. Pendant tout ce temps, elle n'avait cessé de déverser toute se tristesse sur le sol de sa chambre. Je la serrais alors dans mes bras, tandis qu'Akio venait nous envelopper toutes les deux, à son tour. Au lieu de nous repousser, comme je m'attendais à ce qu'elle fasse, Jia enfonça sa tête dans mon cou, toujours agitée de soubresauts :

Will u be my bad boy ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant