Chapitre 38

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Chifuyu

-Salut, 'fuyu !

-Chifuyu.

Le ton sec avec lequel j'avais accueilli Maï-Linh sembla désarçonner celle-ci pendant quelques secondes. Mais elle se reprit bien vite. Trop vite.
En tous cas, pas assez lentement pour que je puisse l'esquiver : elle me suivait comme ma propre ombre.

-Dis... reprit-elle d'une voix hésitante, à propos de Keisuke...

"Non... J'ai pas envie d'en parler. Pas avec toi."

Derrière moi, les pas de Maï-Linh s'arrêtèrent d'un coup. Je me retournai, histoire de voir ce qu'elle fabriquait.
Son visage était étonnament fermé, empreint d'une tristesse que je ne lui avait jamais vue.

-Je suis vraiment désolée. Sincèrement. Je ne sais pas depuis combien de temps vous vous connaissiez, mais je sais que c'était un ami très cher pour toi. Du coup...

Elle s'inclina :

-Toutes mes condoléances, Chifuyu.

Le pire, ou le mieux, je ne sais pas, c'est qu'elle était sincère.

-Merci, Maï-Linh.

Elle se redressa, visiblement rassurée que je ne l'aie pas repoussée comme tout à l'heure.

-Appelle moi, Linh, proposa-t-elle en retrouvant son colgate smile.

Je poursuivis mon chemin avec elle sur les talons :

-C'est gentil. Mais je n'aime pas trop donner des surnoms au gens, mentis-je,je vais me contenter de "Maï-Linh".

Je lui sourit faiblement, espérant que cela suffise à atténuer mes propos. Le coin de sa mâchoire légèrement crispé me donna la réponse. Bah, tant pis.
Moi qui espérait commencer la journée tranquillement, c'était sans compter sur la nature bavarde de la jeune fille :

-Tu vas aux casiers ? Je t'accompagne !

Elle ne me laissait vraiment aucun choix. J'haussai les épaules, et elle poursuivit comme si de rien n'était :

-Pourquoi tu n'aimes pas donner de surnoms au gens ? C'est mignon, et parfois ça fait moins sévère que le prénom initial, pourtant !

Elle amorça un geste pour poser sa main sur mon bras que j'esquivai.

"C'est parti pour s'enfoncer encore plus dans le mensonge !"

Sauf que j'étais à court d'idées.

-Disons que... balbutiai-je, c'est un tic que je n'ai jamais eu. Ça pourrai déranger certaines personnes, si je leur donnais un surnom.

Dans la catégorie des gros mythos, je suis le pire.
Maï-Linh éclata d'un rire doucereux, qui aurait probablement fait bander les premiers boloss du coin qui passaient par là :

-Ne t'inquiète pas 'fu... Chifuyu ! (elle se rattrapa au dernier moment) Ça ne me dérange absolument pas, au contraire !

-Mmmh... marmonnai-je, cool.

Pas cool.
Elle continua à papoter joyeusement tandis que j'attrapai mes cahiers de mon casier et les jetai pêle-mêle dans mon sac. Le peu d'intérêt que je lui manifestait, je l'exprimai par de vagues onomatopées.

-Tu attends quelqu'un ?demanda-t-elle en me voyant m'appuyer contre les casiers

J'acquiesçai: malheureusement, elle semblait vraiment manifester de l'intérêt aux moindres faits et gestes que je faisais.

Will u be my bad boy ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant