Chapitre 33

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Mike


Soirée en solo dans Montréal. Ça faisait longtemps. Je ne suis pas d'humeur à faire la tournée des bars pour trouver quelqu'un en manque d'affection. Je descends marcher dans le vieux, voir le pont Jacques-Cartier illuminé, ainsi que la grande roue, puis les décorations de Noël de la place Jacques Cartier, et de l'Hôtel de Ville, avant de remonter me commander quelque chose pour emporter. Un arrêt à la SAQ – la Société des Alcools – me rappelle qu'une bouteille de vin coûte la peau du cul. Tant pis, ce sera des bières pour la soirée.

Mes achats sous le bras, je rentre à l'hôtel.

Je mets quelques bières au frais et en bois deux directement, une parce que j'ai soif, l'autre pour me détendre.

Je mange un peu avant de prendre mon téléphone. J'écris un message à Mia, mais ne cesse de le corriger. J'essaye d'expliquer mon comportement, mais n'y arrive pas, car moi-même je ne me l'explique pas.

Mia, mon petit elfe,

Tu penses sûrement que je suis le roi des cons, et tu as certainement raison, vu c'est comme ça comme je me sens. J'ai essayé de te parler, de t'expliquer, mais tu ne m'as pas facilité la tâche. Tu as un sacré caractère, ce qui ne fait qu'ajouter à ton charme.

J'aurais aimé t'expliquer pourquoi je me suis attaché à la petite, pourquoi je reste autour d'elle, mais n'en ai pas eu l'occasion. J'ai connu Kristina dans une période où elle allait bien. Mais elle a replongé dans la drogue quand je l'ai quitté en apprenant qu'elle était déjà enceinte. Jusqu'à la naissance de Julianna tout allait bien. Je n'avais plus de nouvelle, elle était sortie de ma vie, mais manifestement je n'étais pas sortie de la sienne. Lors de l'accouchement, je devais être probablement la seule personne digne de confiance dans son entourage, voire la seule personne de son entourage. Les médecins m'ont prévenu que l'accouchement se présentait mal et qu'ils feraient tout pour sauver le bébé, mais qu'elle, elle risquait d'y rester. En mon âme et conscience, je ne pouvais pas la laisser mourir seule, alors qu'elle avait demandé mon aide. Contre toute attente, l'accouchement s'est bien passé, le bébé et sa mère ont survécu. Alors oui, j'aurais pu me détourner d'elles immédiatement, mon travail était fait, mais elle est tombée en dépression, rejetant l'enfant. Qui suis-je pour abandonner un enfant ? Qu'allais-je faire, le remettre aux services sociaux ? Je lui ai donné son prénom, le seul qui m'est venu, celui de ma sœur, de mon frère. En lui donnant un prénom, j'en suis devenu responsable.

Kristina était fragile et la drogue son refuge en cas de problème. Je suis toujours resté à l'affût, malgré moi.

Je me sens responsable bien que je ne le devrais pas. Dois-je laisser la petite aux services sociaux, oui je devrais le faire. Mais je trouve ça triste pour elle. Je verrais ce que je ferais, mais je suis tout ce qu'elle a, Kristina n'avait pas de famille selon ce qu'elle m'avait dit.

Mia, je vais être honnête avec toi. J'espère que tu as lu jusqu'ici, sinon ce que j'écris restera à jamais lettre morte. Nous deux, ce fut... intense. Je n'avais jamais ressenti cela. Nous avons été ensemble que pour un court moment, mais je me suis pris à imaginer la suite de notre relation. Ce n'était pas quelque chose de bien compliqué, nous habitons la même ville, il était donc facile que nous poursuivions notre route ensemble. Je t'ai quitté, lâchement c'est vrai, il n'y a que quelques heures, mais tu me manques à un point que je n'ai pas les mots pour décrire la tristesse que je ressens, le vide autour de moi. Ne pas te voir sourire, ce sourire qui illumine ton visage ; entendre le son, le timbre de ta voix, voir la couleur de tes yeux s'éclaircir ou s'approfondir au gré de tes humeurs, sentir la chaleur de ton corps. L'odeur de ton shampoing, de ton gel douche sur toi me manque. Ce tic que tu as de froncer ton nez avant que tu ne t'énerves. Cette petite manie que tu as quand tu t'assieds, de replier une jambe pour t'asseoir dessus pour te donner plus de hauteur. Tu me manques, finis-je en appuyant sur chaque mot, Mia, tu me manques comme personne ne m'avait jamais manqué. Tu as bouleversé ma vie et je suis à la ramasse depuis. Tu n'es pas bien grande, mais pourtant tu prends beaucoup de place dans la vie des gens que tu touches. Tu es quelqu'un d'exceptionnel. Il ne me reste de toi que deux photos, que je détruirais quand il me sera trop difficile de les regarder. Justine m'a poussé à te contacter, j'ai essayé de t'appeler, mais j'avais peur de ne pouvoir te parler, que tu te braques et que je n'arrive pas au bout de ce que je veux exprimer. Alors j'écris, c'est lâche un peu, c'est la solution de facilité, car je ne te vois pas soit froncer les sourcils, t'objecter.

Je te souhaite tout le succès du monde avec ton entreprise, tes projets.

Il est trop tôt, ou trop tard pour le dire, mais j'ai aimé... nous. Toi.

Je ne me relis pas, j'envoie mon message et je jette mon téléphone sur mon lit. Une nouvelle bière dans la main, je me désaltère, l'écriture de ma lettre m'ayant déshydratée.

Je finis la soirée en regardant un match de hockey à la télévision, passant au travers de ma caisse de bière, seul au monde.

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Myka

Même pas en rêve !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant