Eago avait perdu l'indépendance qui lui tenait à cœur lorsque ses crocs avaient effleuré la carotide de son calice qui lisait la République de Platon sur ce banc... Non. Pas son indépendance. C'est sa solitude qu'il avait perdue. Il l'avait laissée sous ce lampadaire qui avait été le seul spectateur de leur destin. La solitude n'est pas une idée. C'est une réalité.Dans sa vision Platon commençait par poser l'existence d'un absolu des idées. Ce qui est déconcertant pour nous c'est que quand on parle de la réalité, il s'agit de la réalité empirique. Platon plaçait la réalité au niveau des idées. Cette pensée fut appelée réalisme des idées. Pour Platon, le maximum de la réalité, c'est-à-dire la perfection, était situé dans les idées, les essences. Eago faisait face à un réalisme des idées transcendant même son état individuel. La réalité du lien entre son calice et lui formait l'essence de leur lien. L'idée même que le lien ne soit pas était déjà hors de la réalité de par l'essence qu'était ce qui les liait, aussi abstrait et métaphysique que cela puisse être. Eago est Eago et Dorian est Dorian, par l'essence même de ce qu'ils sont. Le réalisme des idées c'est considérer que parfait est l'être car pris en considération au niveau de son essence, de l'idée même de ce qui fait de lui l'être qu'il est. Dorian est le calice d'Eago, comme il est l'idée même d'être un être de chair de sens et de pensée.
Il se tenait debout devant ce bâtiment à l'allure si banale que c'était insultant. Sur sa façade, caressée par les larmes du ciel , un symbole. Une trace de sang, suintant de violence transmise et de blasphème posé. Le sang d'un calice, blessé, traîné là, malmené par le désordre. Considérer que l'interprétation du sens ne relève que de la vision d'un individu, c'est plonger dans le primat des représentations des idées, c'est considérer qu'entre le symbole et l'attitude individuelle, il existe des médiations, des liens, des transcendances qui ne font sens que par lien. Considérer que le sang sur cette façade est une médiation entre l'incompréhension de la société vampirique et la mort de Gorinng, c'est ... le réalisme des idées. Puisque l'idée même de violenter un calice, ce calice-là, après ces mois de confusion qui avait ébranlé la société vampirique... Jacin était debout là, face à cette porte qu'il se savait dans l'obligation d'ouvrir s'il ne souhaitait pas être considéré comme spectateur de la violence subie par le Prince.
Alors sa main gantée se tendit vers la clinche rouillée pour ouvrir.
Face à lui, une enchère.
Sur scène, alignés comme du vulgaire bétail, domestiqué et mâté pour lui faire courber l'échine, des individus. Grelottants. Blessés. Exhibés dans leur intimité et dans leur précaire corporalité malmenée. Parmi les figures agenouillées de force, deux gardaient le menton dressé, le regard incendiaire, malgré les tremblements incontrôlés et incontrôlables de leur chair...
- Cher amis, nous passons au bien suivant, mis en concurrence pour la modique somme de 1K, et qui n'est autre que le calice de notre célèbre héritier de la grande famille Blavatnik. Oui oui, dans la fortune dépassant la royauté britannique, il y a eut quelques vampires liés, et le dernier ne va pas faire long feu étant donné qu'ici est mis en vente son calice !
Ce dernier était la deuxième figure qui, avec Dorian, fixait la salle de vente avec mépris et colère.
- Lorsque vous serez retrouvés, votre éternité ne sera qu'une parenthèse dans la continuité du monde Vampirique : vous ne serez que poussière, pourrissant à côté de votre or, cracha le calice en question, peu ravi d'être mis en vente si bassement par ces misérables.
- Tais toi, misérable rebut incapable d'assurer ta propre garde, ordonna avec exaspération le maître de la cérémonie.
- Le silence est un luxe que seule la mort peut m'imposer, sourit sombrement le calice.
Un coups le heurta au niveau du nez, l'outrage envoyant dans un craquement sonore sa tête en arrière. Un des membres de l'assemblée ne semblait que peu ravi face à la verve du calice enchaîné et insolent. Le corps tomba dans un bruit sourd, les perles carmin s'écoulant de son crâne enfoncé de façon distordue, faisant hurler d'horreur les autres prisonniers et prisonnières. Dorian le fixait, là, au sol, à sa gauche, ses pupilles écarquillées, son corps pris de tremblements erratiques, alors que le bruit de la rencontre entre les joyaux vermeil et le sol se mêlait au bruit sourd de la pluie battant contre les vitres du hangar qui accueillait cette vente aux enchères clandestine.
Jacin cligna des yeux, et ce fut le chaos. Le maître de cérémonie ayant plongé sur le vampire ayant tué un de ses biens qui lui aurait apporté une somme conséquente, et les autres vampire profitant de ce tumulte pour tenter d'empoigner les autres prises afin de les ravir dans l'imbroglio qui avait pris place. Dans un grognement, Jacin bondit sur scène, écartant les mains avides du seul individu qu'il prendrait la peine de sauver : la calice pétrifié d'horreur du Prince qui gardait son regard solidement ancré au corps agonisant du calice au crâne rompu...
- Caches tes yeux, calice, tu en as assez vu, souffla Jacin en le détachant d'un geste avant de la caler dans ses bras pour tenter de s'éloigner du chaos qu'était cette rixe entre vampire avides, s'arrachant les corps frêles et bientôt mutilés des prisonniers du maître de cérémonie. Dans la brouhaha de membres extirpés, de sanglots expirés, et de hurlements de douleurs écorchés de déchirements de corps, une porte se ferma dans un claquement sec.
Un silence s'imposa alors qu'un aura non méconnue plana sur le hangar, accompagnée d'une voix condamnatrice qui glissa :
- C'est l'histoire d'une brochette affamée qui a posé sur mon calice un regard impie...
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Ok...
Depuis mars 2022Bonjour? Je suis en fin de master d'anthropologie, et comme vous vous en doutez au vu de mon looong silence, j'ai eut un master mouvementé : le covid, une tumeur, les études, le job étudiant... ça a été deux ans de pure galère haha, mais deux ans sans écriture surtout. Deux ans où tout ce que j'ai écrit était orienté vers mes cours...
Donc me revoilà.
Je vais essayer de ne pas trop écarter mes nouveaux chapitres, afin de rester dans une continuité de ma plume et de mon récit.
Je vous remercie, tous et toutes, de continuer à me lire alors que je suis absente depuis si longtemps... Les votes continus et les retours enflammés sur Si c'est un Don ont été la raison de mon plongeon dans la suite du tome 3. Alors merci.
Je vous embrasse,
Sofia.
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Si c'est un don... TOME 3
VampireAinsi le regard blafard de l'Histoire ne se pose pas sur chaque combat, chaque survie, chaque balafre avec la même intensité. Alors que tant pleurent le futile, ils dénient , dans un reniflement dédaigneux, le plus sombre des chapitres, la plus maca...