Ainsi le regard blafard de l'Histoire ne se pose pas sur chaque combat, chaque survie, chaque balafre avec la même intensité. Alors que tant pleurent le futile, ils dénient , dans un reniflement dédaigneux, le plus sombre des chapitres, la plus maca...
Les elfes noirs avaient rapidement compris que quelque chose n'allait pas. Ces ombres accrochées à la voiture n'avaient rien d'avenant. Et leurs craintes furent fondées lorsque les pneus furent crevés dans le glapissement d'horreur du calice, le juron de Geoffrey, le rayonnement des lampadaires...
Ce calice ne pouvait faire face à de nouveaux épisodes de son existence sans que quelques imprévus ne viennent écorcher les fils de son récit? Il semblait que non... Et ce constat assombrissait les elfes noirs qui jusque là n'avaient jamais connu de calice à la malchance si évidente. Enfin, personne depuis Albion, qui avait été le meneur de la Guerre des Êtres... Un calice qui avait voulu aller contre sa nature. S'opposer à la survie d'un tiers par sa survie. Animé de pulsions de mort et d'une idéologie qui le poussaient à s'opposer à ce qu'il était. Il était un être qui voulait s'opposer à son être... Une culture qui s'opposait à sa nature. Une culture... Ou une façon d'agir, de faire, de penser qui s'imposait à l'individu avant que sa nature ne prenne le dessus.
Se lancer en quête du calice qu'ils avaient devoir de protéger semblait risible : il était avec son vampire... Les elfes noirs se plantèrent plutôt entre le véhicule accidenté (gisant misérablement sur son toit, ses entrailles et ses pneus exposés au ciel terni de nuages).
- Bougez les elfes, on a rien à foutre avec vous, aboya l'une des créatures pas plus hautes que trois pommes, aux bras ridiculement long et aux griffes repoussantes. Presque autant que leur faciès...
- Nous ne sommes pas des elfes, se contenta de répondre dans un sourire sombre le meneur du groupe.
- Il déraille ce pey, grogna un des gobelins.
- Foutue génération identitaire, cracha un autre en serrant et desserrant le poing, avide de vider de ses entrailles le calice du Prince qui leur avait causé tant de torts.
- Nous sommes des elfes noirs, informa un des protecteurs de Dorian.
- Et si vous voulez que nous nous écartions, il faudra nous écarter par vous même,
Les gobelins, dans un grognement agacé, bondirent sur ces étranges elfes qui étaient un obstacle entre eux et leur vengeance. Les elfes noirs, dans un soupir ennuyé, ne bougèrent pas, prêts à défendre le calice piégé dans la voiture accidentée.
- Quel ennui, soupira Charles, sa voiture arrivant à peine, se garant près de la voiture retournée. Il sortit de son véhicule, avisant la carcasse fumante, demandant :
- Voulez-vous que je retourne la voiture ou parviendrez-vous à sortir ainsi ?
- Nous nous débrouillerons, grogna Eago. Charle eut un sourire amusé. Son camarade semblait agacé. Quoi de plus normal... Les effluves du sang de son calice avaient empli l'Allée entière, si bien que quelques vampires sortaient de leur demeure pour s'informer.
- Fort bien, fort bien...
La portière du côté passager fut éjectée d'un coups de pieds. Le verre vola à travers l'asphalte enflammé du baiser des lampadaires alors que le morceau d'acier s'écrasait entre les elfes noirs et les gobelins. Les deux parties avaient cessé de se battre pour fixer Eago sortir du véhicule, son calice dans ses bras. Ses camarades sortirent sans mal, ne détruisant pas plus le véhicule qu'il ne l'était. Arracher une portière n'était sûrement pas nécessaire... Mais leur camarade ne devait pas être assez calme que pour en prendre amplement conscience.
- Notre pauvre Dorian est encore blessé, soupira, mélodramatique, Charle.
- Une éraflure, mon ami, le rassura Blue , debout près de Eago, époussetant sa tenue.
- Je ne vois pas pourquoi vous dites « encore ». Ce n'est pas comme si je me blessais souvent, grogna Dorian que Eago avait posé à terre, laissant son vampire tâter ses côtes pour s'assurer qu'il n'avait rien de cassé.
- Vous êtes un aimant à problème, mon ami. Et je ne dis pas cela pour vous vexer, sourit Geoffrey.
- Qui ne serait pas vexé par de tels propos, grogna le calice.
- Voyons, je ne disais pas cela pour vous vexer, sourit Geoffrey.
Dorian haussa un sourcil suspicieux en direction du vampire au faux-sourire, concluant en se détournant :
- Je rentre, il fait frais.et j'ai peu envie que tous les vampires du coin rappliquent.
- Ils sont déjà de sortie, notifia Blue.
Dorian posa son regard sur l'Allée Mythos pour constater qu'en effet, plusieurs vampires guettaient, n'osant s'approcher plus que nécessaire. Ils comprenaient plus ou moins ce qu'il se passait devant la demeure du Lord Eago, le Prince surgi des ténèbres.
Face à cette curiosité déplacée ( ils étaient quand même sortis en sentant son sang ! ) Dorian grommela un lot de juron qui fit soupirer d'ennui les elfes noirs. Eux qui tentaient de garder le calice des individus pouvant fleurir son langage... Une perte de temps, visiblement, au vu de son bagage...
- Que de propos offensant, s'amusa Blue. Allez-y avant que ces gentils hommes ne soient pris de quelques inconsciences.
- Oui, laissez nous donc, prendre soin de ces inconscients et raccompagnez Dorian à l'intérieur, lança Eago à l'adresse des elfes noirs. Ceux-ci ne discutèrent pas, laissant le Prince et ses camarades d'éternité se charger des gobelins qui n'avaient pas bougé d'un poil tout le long de l'échange.
Ma plume est lente ces derniers jours, je suis dans une mauvaise période. Je n'ai pas autant pleuré depuis longtemps...
Je vous invite au passage à regarder " Macquia, when the promised flower blooms" , un superbe film d'animation très émouvant.
Force à vous, et bonnes vacances. ( félicitation aux dipolmé.e.s) !
Sofia
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