Le lendemain matin, Hoseok n'avait pas pris la peine d'adresser la parole à Jimin. Ses pensées le tiraillaient et s'étaient entièrement accaparées de son esprit. Il se déchirait intérieurement. Il aurait aimé fuir, mais il craignait Namjoon. Il était capable de prendre les rênes de la situation. Une fois ses buts atteints, il aurait tout fait pour le retrouver. Craindre Namjoon ou craindre de blesser Jimin et perdre toute sa confiance, Hoseok ne parvenait pas à faire de choix. Une chose était certaine, il ne voulait pas voir le sorcier mourir. Il devait le prévenir. Il en avait eu l'intention dès son réveil, mais la peur figeait ses membres. Ses mots étaient comme coincés à l'intérieur de sa gorge. Il appréhendait de tout lui révéler. Il appréhendait aussi le moment où Jimin découvrirait le pot aux roses. Il finirait bien par savoir la vérité. D'une manière ou d'une autre. Hoseok se sentirait dans tous les cas honteux. Le peu qu'il pouvait faire était de le protéger. Il pourrait donner sa vie pour ne pas avoir sa mort sur sa conscience.
Hoseok ne savait plus quoi faire. Il était perdu. Il devait organiser ses pensées qui, pour le moment, fusaient de tout côté. Il n'avait pas mangé ce matin-là. Il avait préféré s'en retourner à cet instrument qu'il considérait presque comme le sien. La musique calmait les nerfs. C'était bien connu. Cela ne serait pas suffisant. Quand bien même, il se sentit peu à peu plus détendu. Il avait bercé les oreilles de Jimin qui travaillait tout en prenant son petit déjeuner. Même si l'urgence l'incitait à travailler sans relâche, entendre la musique de Hoseok rendait la tâche moins difficile. Il se sentait véritablement immergé dans cette culture bientôt oubliée. Jimin remarqua, cela dit, que la mélodie que jouait Hoseok avait un ton bien différent de celles qu'il jouait d'habitude. Le rythme était plus lent. Les notes plus mélancoliques. Hoseok pinçait et pressait les cordes sans même les regarder. Il avait les yeux dans le vide. Un vide qu'il ressentait dans son corps et son esprit. Cette chanson était le chant de son cœur qui pleurait. Il pleurait sans doute sa famille, son peuple, sa maison. Hoseok souffrait du mal du pays.
Inquiet de son état, Jimin cessa d'écrire et laissa son manuscrit de côté un instant. Il s'approcha de Hoseok et se permit de s'asseoir à ses côtés. Hoseok revint à lui suite aux mouvements du sorcier. Ses préoccupations demeuraient toujours. Jimin l'avait vu. Il ne se doutait pas du dilemme dont devait faire face Hoseok. Toutefois, il comptait bien lui changer les idées.
— Est-ce que tu voudrais bien m'apprendre ?
Hoseok fut d'abord étonné de sa demande, puis il l'invita à prendre sa place. Jimin s'avança alors au bord de la paillasse où Hoseok dormait durant la nuit. Une paillasse couverte d'un édredon couleur crème qui était épais et confortable. Hoseok s'assit derrière Jimin. Il lui donna l'instrument. Il se permit ensuite de coller son torse au dos de Jimin. Leurs bras se frôlaient. Leurs visages se trouvaient proches l'un de l'autre. Si proches que Jimin pût sentir le souffle de Hoseok s'abattre sur son épaule.
— La caisse de résonnance doit reposer sur ta cuisse, expliqua Hoseok. Ton bras droit peut s'y appuyer. Cela te sera plus confortable pour pincer les cordes.
Jimin le laissait faire et suivit très attentivement ses conseils. Hoseok se saisit du poignet droit de Jimin.
— Cette main vient agripper le manche, déclara-t-il. Ici. Casse le poignet. Encore. Voilà. Comme ça.
— Ce n'est pas très agréable.
— À force d'entraînement, ton poignet s'assouplira.
Ainsi, Hoseok put apprendre à Jimin les accords les plus simples. Dans un premier temps, il ne se préoccupait que de sa main gauche. Jimin apprenait vite. Il put très vite enchaîner quelques accords. Hoseok se chargeait de pincer les cordes à l'autre bout et émettait alors les sons exercés par la pression donnée par Jimin. Les notes ne sonnaient pas toujours juste. Parfois, Jimin n'appuyait pas suffisamment fort, parfois son poignet n'était pas assez cassé, parfois ses doigts ne se trouvaient pas au bon endroit. Hoseok sut faire preuve de patience et n'hésitait pas à répéter ses explications ou à le reprendre. Leur concentration était telle qu'ils avaient oublié le monde qui les entourait.
Après plus de deux heures à s'essayer sur cet instrument, Jimin commençait à avoir les doigts engourdis. La peau du bout de ses doigts se détachait en de petits lambeaux. Ce fut alors que l'homme et le sorcier prirent conscience de leur proximité. Le visage de Jimin s'était tourné vers celui de Hoseok qui n'était plus qu'à quelques centimètres. Il avait eu pour intention de le remercier pour son implication, mais rien de tout cela ne franchit la barrière de ses lèvres. Hoseok aurait aimé profiter de cet instant de complicité pour tout lui avouer, mais il n'y parvint pas. Quelque chose se passait entre eux. Quelque chose d'inexplicable. Une alchimie. Un pincement au cœur. Un goût d'interdit qui les poussa dans un baiser chaud et étourdissant. Ils n'eurent à peine le temps de se rendre compte de la réalité de cet échange que quelqu'un toqua à la porte et les interrompit. Hoseok prit peur. Namjoon lui avait pourtant donné trois nuits. Jimin, troublé, se détacha de lui.
— Excuse-moi. Je... Je vais voir qui ça peut être.
Hoseok était terrifié. Jimin, quant à lui, devina qu'il ne pouvait s'agir que de Seulgi. Il se leva alors en toute tranquillité. Avant d'ouvrir, il voulut soulager Hoseok.
— Ne t'en fais pas. Il ne va rien t'arriver.
Hoseok restait sur ses gardes. Jimin ouvrit la porte sur une jeune femme que Hoseok entraperçut. Elle était petite, arborait une frange courte et de longues pointes rousses. La jeune femme portait un long manteau noir et des bottes montantes à talons.
— Bonjour Seulgi, la salua-t-il. Qu'est-ce qui t'amène ?
Jimin tenait la porte à peine entrouverte. Il voulait s'assurer de la sécurité de Hoseok. Bien qu'il eût une confiance aveugle en Seulgi, il n'était pas certain que cette dernière réagît très bien en la présence d'un humain dans son atelier.
— J'ai réfléchi, avoua-t-elle. J'aimerais faire la connaissance de cet homme. Du moins, si tu me le permets. Et s'il est d'accord, bien entendu.
— Tu sauras te tenir ?
Seulgi hocha la tête. Cela lui coûtait beaucoup de venir en ces lieux tout en sachant qu'un homme s'y était réfugié. Jimin laissa entrer son amie et assura à Hoseok que Seulgi était son amie et qu'elle ne lui voudra aucun mal. Hoseok s'était mis sur la défensive. Il se tenait prêt à sortir son arme. Mais contre toute attente, Seulgi s'était assise à même le sol avec beaucoup de quiétude. Hoseok avait baissé sa garde et avait retrouvé sa place sur l'édredon. Aucun d'eux n'initia la conversation. Ils s'observaient. Jimin dirait même qu'ils se dévisageaient. Ce dernier était parti préparer du thé et des petits gâteaux tout en les gardant à l'œil.
À son retour, les langues s'étaient déliées. La tension retombait peu à peu. Seulgi fut celle à poser les premières questions. Jimin avait craint que sa curiosité mît Hoseok mal à l'aise. Au contraire, Seulgi fit preuve de beaucoup de bienveillance. Sa présence était motivée par la volonté de s'assurer que Jimin ne risquait rien. Elle n'aurait pu imaginer en se rendant sur les lieux qu'elle rencontrerait un individu tel que Hoseok. Il était mystérieux, mais abordable. Elle apprit à le connaître. Jimin n'intervenait que très rarement. Les intentions de la sorcière et de l'humain ne visaient pas à se nuire l'un et l'autre.
Seulgi repartit de l'atelier grandie. Elle en avait beaucoup appris en si peu de temps. C'était une expérience humaine qu'elle voulait réitérer. En plus d'être soulagée pour son ami, de s'être rendu compte qu'il n'était pas complètement fou, elle commençait à penser qu'elle pourrait être amenée à changer d'avis. Un jour peut-être considérerait-elle l'homme autrement.
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𝐛𝐥𝐚𝐜𝐤 𝐬𝐰𝐚𝐧 ℎ𝑜𝑝𝑒𝑚𝑖𝑛
Fiksi PenggemarFuir. Jimin ressent cette envie irrépressible constamment. Il s'éloigne de la ville de Sungye et longe dangereusement la rivière Han, frontière de l'entre deux mondes. Par-delà les eaux se trouve la forêt interdite. Nulle créature n'est priée de s'y...