09 | Bienvenue dans la Guilde des bannis - troisième partie

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Je lui montrai mon assentiment d'un nouveau hochement de tête, et m'engageai derrière lui sur les quelques pas qui nous séparaient de la pièce à la porte entrouverte. De nombreuses voix s'en dégageaient, aussi graves qu'aiguës, aussi râpeuses que douces, et des centaines de sujets d'échangent semblaient fuser à la seconde, comme autant de débats et de réflexions pour refaire le monde quand celui-ci s'écroulait sur lui-même sans que rien ne puisse ralentir sa chute. Aries ouvrit complètement le battant et je me laissai quelques secondes avant de relever les yeux pour en découvrir une quasi-centaine braquée sur moi, la nouvelle arrivante. Je luttai contre la pulsion qui m'indiquai de croiser les bras pour éviter de bouger mes poignets dans tous les sens : j'aurais eu l'air au mieux bête, au pire fermée à toute rencontre, et j'étais persuadée que la première impression donnait le ton pour toute la suite des évènements. Un soupir étouffé me parvint d'un des deux côtés de la pièce et ce fut à ce moment-là que je me décidai à observer le jugement des autres membres de la Guilde : allaient-ils m'accepter ?

Alors je fus surprise de constater un groupe totalement hétéroclite : toutes tailles, âges, morphologies, couleurs de peau, styles vestimentaires et capillaires, mais un but commun à tous ces gens, se battre pour un monde meilleur. Mais comme à chaque fois qu'il y avait trop de gens pour moi, je m'avançai en mode automatique et faisais signe aux gens machinalement. Je conservai mon sourire et répondais aux questions – des plus banales aux plus surprenantes – sans vraiment y réfléchir. Je balayai la salle du regard et n'y vit, pour la première fois de ma vie, aucune forme d'hostilité : au contraire, la bande semblait ravie d'avoir la possibilité d'intégrer un nouveau membre et d'apprendre à le connaître. Élios écourta le moment : d'après lui, il était déjà tard et il était plus que temps de manger, tout le monde aurait le temps de sympathiser avec moi plus tard, pour le moment, j'étais épuisée.

Je ne sais plus ce que je dégustais ce soir-là : comme l'avait annoncé le garçon, la fatigue me tombait dessus comme une enclume au fur et à mesure que les minutes mourraient, et je n'avais plus qu'une seule hâte, qui était de trouver un matelas et un oreiller pour m'abandonner aux abysses colossaux du sommeil que me proposaient les bras de Morphée. Durant le repas, je restai aux côtés de Lou, qui avait décidé de jouer le rôle de lae meilleur·e ami·e et me donnait plusieurs informations personnelles sur les différentes personnes qui se trouvaient dans la pièce : je ne retenus que le plus important et quittai la table en premier pour ne pas avoir à me faire apostropher par des curieux à la fin du banquet.

Sur le chemin, je me perdis en tournant et retournant dans les couloirs – cet immeuble était-il donc un ancien hôpital sans panneau d'indication ? –, mais j'arrivai finalement à retrouver mon dortoir, tout était bien qui finissait bien, pas vrai ? Je m'approchai du seul lit fait et farfouillai dans mon sac à dos pour avoir la confirmation visuelle qu'aucune de mes affaires ne manquait à l'appel : c'était le cas, et ceci m'enleva un énorme poids dans la poitrine. Je respirais mieux, désormais. J'aurais pu m'allonger aussitôt et me reposer d'ici le lendemain, dormir d'un sommeil lourd et profond, mais j'étais crasseuse et les habits que je portais avaient besoin d'être lavés et nettoyés autant que ma peau recouverte de sueur, de croûtes et de poussière. J'attrapai des sous-vêtements, un long t-shirt et mes savons pour me diriger vers la salle d'eau : les deux allers-retours jusqu'à la première salle de bain furent épuisant après toutes les péripéties vécues durant les dernières heures, mais j'appréciais ma douche autant que si elle avait été la première prise depuis de longues années.

Je passai mes paumes et mes longs doigts sur mes écorchures, mes bleus, et enlevai progressivement la saleté qui collait à ma peau en la voyant disparaître dans le trou du réservoir à eaux usées qui longeait les trois salles de bain. Je respirai enfin et, bercée par le ronron du fracas du mince filet d'eau sur le carrelage de la douche, je fermai les paupières et classai méthodiquement toutes les informations dont on m'avait abreuvée aujourd'hui. Après même que les deux jerricanes furent vidés, je restai debout, dans la même position, adossée contre le mur carrelé dans l'espoir de trouver une source de fraîcheur. C'est alors que je pris conscience que j'étais percluse de courbatures de la tête aux pieds : dormir me ferait du bien, il fallait que je puisse maintenant me détendre durant quelques heures avant de commencer mon intégration dans la Guilde avec le fracas qui me caractérisait : je ne me tairais plus jamais, je m'en faisais la solennelle promesse. J'avais hâte de faire la connaissance de toutes ces nouvelles têtes. Terriblement hâte. En vérité, j'étais si fébrile que j'en oubliai même la peur infinie qui me nouait le ventre.

La course des étoilesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant