Colonia

Partie 2 - Chapitre 22

L'homme avait démarré le moteur et le véhicule s'était élancé à toute vitesse vers une des routes reculées. Très vite, nous avions quitté la ville pour rouler au milieu des champs de maïs sur une bande de sable sans goudron. 

Je n'avais jamais eu l'occasion d'observer le chemin jusqu'à la colonie et j'étais d'autant plus curieuse de découvrir à quel point la colonie était cachée dans la nature. 

"A combien d'heures de route sommes-nous de la colonie?" demandai-je à l'homme qui fut surpris que je lui adresse la parole. 

"Quatre heures." répondit-il non sans m'avoir jeté un coup d'œil méfiant. 

Sûrement se demandait-il qu'est-ce que je faisais à ses côtés. Vu sa réaction lorsqu'il m'avait reconnu, j'imaginais que César leur avait donné l'ordre de me retrouver. Cet homme était terriblement chanceux. Je m'étais présentée à lui comme une fleur et il en allait tirer tous les mérites. Je hochai la tête après sa réponse et me cala contre le siège plus confortablement. Si j'avais quatre heures à observer le paysage, autant que cela se passe agréablement. 

Au bout d'un certain temps, ce que je voyais à l'extérieur de ma fenêtre commença à changer. Nous avions parcouru des champs durant quelques kilomètres avant de laisser place à une route de forêt encore relativement organisée. Mais désormais, nous étions arrivés en pleine jungle. Il n'y avait plus de route en pierre et les roues de la camionnette crissaient sous le bruit des branches qui cassaient. 

Je savais que nous n'étions plus très loin, du moins nous étions déjà dans la partie plus dangereuse du chemin. J'ignorais comment le conducteur pouvait-il se repérer dans ces bois, surtout vu la vitesse à laquelle nous roulions mais je me disais que cela faisait parti des secrets que César renfermait. 

Au bout de deux heures de route dans la jungle étouffante, je vis l'homme s'affairer et fouiller dans la boîte à gant avant d'en ressortir un talkie-walkie. 

"Diego au checkpoint, je répète, Diego au checkpoint." dit-il après avoir allumé la machine. 

Après un court grésillement, l'homme au bout du fil répondit. 

"Checkpoint à Diego. Passage libre pour ton arrivée. Rien à signaler? Terminé."

L'homme avala difficilement sa salive et risqua à un regard vers moi. 

"Si. J'ai euh... J'ai retrouvé la fille."

Après un court silence qui était sûrement dû à la surprise de son interlocuteur, ce dernier répondit.

"Je vais prévenir César."

Mon conducteur soupira de soulagement et reposa le talkie-walkie sur le côté. Sa mission semblait quasiment terminée. Il ne nous restait plus que quelques kilomètres avant que la responsabilité de me ramener à la colonie ne lui soit déchargée. 

Au bout de plusieurs minutes, le talkie-walkie émit de nouveau un grésillement, signe que l'interlocuteur nous contactait.

"Il demande si elle est attachée ou bien si tu as dû la neutraliser."

Je haussai les sourcils au ciel et cela n'échappa pas au conducteur qui venait de nouveau de me jeter un coup d'œil. Je savais très bien ce que signifiait leurs mots codés, neutraliser signifiait me droguer et profiter de mon inconscience pour m'emmener sans conflit. J'en avais déjà fait suffisamment les frais. 

"Non... Elle est venue me voir d'elle-même."

Il y eut un silence au bout du fil, comme si personne ne semblait y croire. Puis, l'homme au bout du fil répondit le plus calmement qu'il put.