Chapitre 2 : Les inséparables

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     La première lettre de son prénom était gravée près de la rouelle de sa lance. C'était son arme favorite, celle avec laquelle Lysia ne supportait jamais d'échouer. Cela faisait plusieurs années que son oncle la formait à devenir une lancière hors-pair, prête à défendre son village en toute circonstance. L'idée s'avérait plutôt plaisante à ses yeux, se battre pour les siens était une belle raison de vivre, et l'Hylienne se sentirait utile et reconnue. Mais lorsqu'elle avait appris à Alan qu'elle avait la volonté de privilégier la lance à l'épée, au sabre, ou à l'arc, l'homme fut un peu perplexe. En effet, Lysia devait faire un mètre soixante-dix tout au plus, c'était une taille relativement moyenne et peu efficace pour une arme qui devait faire exactement la même hauteur qu'elle. Il n'était pas rare que durant des mouvements amples, la pointe de la lance ou son talon raclait le sol, stoppant brutalement ses gestes et la déstabilisant dans son combat. C'était un risque que Lysia avait accepté, et à présent, la blonde se faisait de moins en moins avoir.

     Derrière la taverne de Labulat, elle s'entraînait ardemment avec son oncle, qui lui était muni d'une épée de soldat. C'était un endroit entièrement consacré au combat et au maniement des armes. Une petite cour cependant assez grande pour avoir la possibilité d'engager des duels corsés. Le bruit du croisement des fers résonnait chaque jour, les gardes du village avaient un entraînement quotidien minutieux à suivre, mis en place par Alan lui-même, bien qu'il ne pût plus se permettre d'assurer les entraînements tous les jours. Lysia rêvait d'intégrer cette troupe prête à tout pour leur communauté, c'était la raison pour laquelle, depuis quatre ans, elle venait ici trois fois par semaine afin de progresser toujours davantage. Ainsi, son oncle, quand il en avait le temps, faisait en sorte de se libérer pour se battre avec elle, et admirer ses progrès.

     La jeune femme, en tenue de combat, tenta une offensive sur sa droite, afin d'atteindre le flanc gauche de son adversaire, mais dès l'instant où la pointe de sa lance s'approcha de lui, la lame de son épée la repoussa dans un son métallique. Lysia fit pivoter son arme de sorte que les deux extrémités fussent inversées, afin d'asséner un second coup à son oncle à l'aide du talon pointu que comportait sa lance. Alan esquiva cette attaque et prit le dessus ; de son épée menaçante, il porta un premier coup horizontal au niveau des hanches de sa nièce qui bloqua perpendiculairement ce dernier. L'homme se retira un instant. Il fit pivoter son poignet pour changer la direction de sa lame et tenta à nouveau ce coup, vers le flanc opposé cette fois-ci. La lancière bloqua une seconde fois l'offensive, exactement de la même manière. De son autre main, elle attrapa le manche de sa lance et balaya l'air de haut en bas pour forcer le bras armé de l'épéiste à se diriger vers le sol, ce qui fit basculer Alan en avant.

     Le combat était rapide, les coups portés fusaient à une vitesse remarquable. Dans son élan, l'homme faillit trébucher mais se rattrapa. Il éleva de nouveau son épée dans le but de l'abattre à la verticale sur Lysia. Mais celle-ci avait toujours ses deux mains sur sa lance, et elle s'en servit comme bouclier pour stopper son coup puissant avec un léger gémissement de lutte. La lame d'Alan s'incrusta de quelques centimètres dans la poignée de bois de la blonde qui gardait, bras en l'air, son arme dans sa longueur. Tous les deux optèrent pour une démonstration de force en gardant leur matériel de guerre croisé, en contact, afin de voir qui cèderait le premier. Leurs muscles étaient mis à rude épreuve, leurs bras commençaient à trembler tant l'un ne voulait pas l'autre le surpasse de pure force physique dans les bras. L'Hylienne n'avait pas peur pour la solidité de sa pique qu'elle savait plus qu'élevée, mais elle appréhendait sa position de soumission qui pouvait avoir raison d'elle. Alan était plus grand qu'elle et avait plus d'endurance, elle ne pourrait pas tenir plus longtemps que lui ainsi. Lorsque leur regard se croisa, ils purent constater la détermination de l'autre, et celle de la nièce dépassait les attentes de l'oncle.

La Marque du PasséOù les histoires vivent. Découvrez maintenant