Chapitre 8 : Le Banquet

62 2 32
                                    

     La Déesse Hylia la regardait avec bienveillance, et ce depuis des années. Posée sur la commode de sa chambre, elle avait toujours été là pour veiller sur elle. Peut-être qu'en vérité, ce n'était qu'un bout de bois sculpté que son ami lui avait donné lorsqu'elle avait perdu le sien, mais une pureté singulière s'en dégageait. Cet objet était comme un porte-bonheur, un talisman protecteur avec lequel rien ne pourrait lui arriver. Il était ce qu'elle avait de plus précieux, notamment grâce à toute la symbolique qu'il portait avec lui. C'était cette statuette qui avait forgé sa relation avec Arthur, et elle connaissait tous ses détails, chacune de ses entailles dans le bois, et sa forme imparfaite qui faisait qu'elle la reconnaîtrait entre mille. Lysia savait qu'elle ne pouvait s'en aller sans l'emporter avec elle, cet objet saurait lui porter chance lorsque le danger se mettrait au travers de sa route.

     Elle serra la petite déesse contre elle, comme lorsqu'elle le faisait dans sa cellule, prisonnière des Yigas. Puis, elle la rangea dans son sac. Ses affaires étaient prêtes, ses cartes remplissaient déjà le tiers de ce dernier à elles seules, tandis que ses provisions et potions complétaient le reste, sans oublier les bandages et vêtements de rechange. Lysia était assise sur le bord de son lit et observait attentivement le contenu de son sac qu'elle allait refermer et boucler pour de bon. Elle partirait le soir même, dans la nuit durant les festivités, en ne prévenant uniquement que Nell et Arthur de son départ. Elle estimait que personne d'autre n'étaient en droit d'en être au courant, pas même son oncle qui l'avait profondément déçue. La blonde ne l'avait pas recroisé depuis la veille et ne souhaitait pas le revoir avant son départ, elle devait garder l'esprit tranquille et Alan ne ferait que l'irriter, encore une fois.

     À l'extérieur, la fête se préparait à grands pas. Nombreux étaient les habitants qui s'investissaient pour la soirée à venir. Chacun ramenait une part de quelque chose, tous les voisins se réunissaient et préparaient un repas digne de leur communauté. Des bruits de petits explosifs festifs retentissaient, tout comme les cris et les rires des Hyliens satisfaits de l'effet produit. Depuis sa petite fenêtre, Lysia pouvait les observer en toute discrétion. Arthur, sa tante et son oncle étaient parmi eux. Même si elle voulait le rejoindre et leur porter de l'aide pour installer les dernières tables, elle redoutait de croiser Alan. Contrariée à cause des agissements de ce dernier, la jeune femme ne voulait plus lui adresser la parole pour un temps. Même s'il avait échoué, son oncle avait tenté de l'empêcher d'entamer son voyage et cela suffisait à la mettre en colère contre lui. Elle se demandait même si elle ne partirait pas en avance, avant les festivités, pour ne plus entendre parler de lui un temps. La blonde se résigna néanmoins à prendre de l'avance car Nell, elle, était au courant de son voyage, lui faisait confiance, et avait prévu son départ pour tard ce soir-là. Elle ne pouvait pas modifier ses plans à la dernière minute.

     Arthur, au milieu de la place du village, ne tarda pas à jeter un œil à la fenêtre de Lysia à travers laquelle il l'aperçut sans surprise. Navré pour elle qu'Alan l'eût « trahie », il comprenait qu'elle ne souhaitait pas sortir. Leur regard mit du temps à se détacher de celui de l'autre ; le brun, depuis l'extérieur, finit par lui faire un signe particulier de la main consistant à relever l'auriculaire et le faire bouger de gauche à droite. Un geste qu'elle seule reconnaissait car il s'agissait d'un mime qu'ils s'étaient créés et qui lui disait qu'il la soutenait. Lysia lui fit le même geste en retour en souriant niaisement, alors que des pas lourds se faisaient entendre dans les escaliers en bois qui menaient à sa chambre, où elle se trouvait. Mais, absorbée par ce petit contact à distance avec son ami, la blonde n'y fit point attention.

- Il n'est pas là, affirma Nell qui venait de pénétrer dans la pièce.

     Lysia se retourna de façon brusque vers l'Hylienne qui n'avait guère l'habitude de rentrer dans l'intimité des personnes ainsi. Surprise de la voir ici, la nièce se demanda pourquoi elle ne se trouvait pas avec les autres, en train de découvrir le lieu et les décorations de la fête imminente. De son côté, la lancière avait besoin de s'isoler un peu pour digérer ce que le chef du village avait fait et également pour se préparer à son départ, peut-être que Nell s'inquiétait pour elle.

La Marque du PasséOù les histoires vivent. Découvrez maintenant