Chapitre 17 : L'encapuchonné

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     Cette nuit noire cachait dans son obscurité des choses bien sombres ce soir-là au village. Le bruit grouillant de la corruption environnante résonnait jusque chez les habitants, leur rappelant même dans leurs rêves les plus profonds qu'ils devraient bientôt fuir sous peine d'être submergés par la malice. Un ciel nuageux venait contrer le clair de lune, ce qui plongeait Hyrule dans une atmosphère lugubre propice aux multiples dangers. Il était trois heures du matin, l'heure à laquelle le passage à l'action avait sonné. Pendant que tous les habitants vagabondaient dans leur sommeil profond, un inconnu profitait du moment pour paraître d'autant plus inaperçu et exécuter son plan. Rôdant dans les rues vides de Labulat, cet homme lent et silencieux sous une large capuche lui recouvrant le visage semblait venir d'un monde ténébreux. Son corps entier se voyait recouvert d'une longue tunique noire traînant presque sur le sol. Il ne faisait qu'un avec l'obscurité, si bien qu'aucun monstre de la nuit ne pouvait le repérer. Lui-même ressemblait à un défunt revenu de l'au-delà, seul dans ce village fantôme. Il marchait sur la place du marché, en direction de la faible lumière traversant la fenêtre d'une maison, non loin de là.

     À l'intérieur de celle-ci, les quatre murs qui la constituaient étaient devenus sa prison dans laquelle il s'enfermait par lui-même. L'endroit de sa vie et certainement de sa mort. Sortir de cette maison contribuait à mettre en danger le monde extérieur, il était donc condamné à rester là, autour de cette table à la lueur de quelques bougies, sans ne plus rien faire de sa vie jusqu'au jour où la corruption finirait par prendre à nouveau possession de son corps et de son esprit, si ceux-ci pouvaient encore supporter cette présence démoniaque... À quoi bon persévérer et se relever lorsqu'on avait tout détruit soi-même, tout perdu pour de bon ? Quand même le sommeil ne voulait pas de lui, s'adonner au désespoir et à de sombres pensées furent sa seule alternative, telle une coquille vide d'émotions inerte et sans couleurs. Et le temps passait, encore et encore, les heures se transformaient en jours qui se transformeraient en semaines, jusqu'au jour où l'homme supplierait la déesse de l'achever.

     Dans la pièce régnait une odeur forte d'alcool qui venait de la cinquième fiole que l'oncle venait de boire cul-sec. Voilà à quoi sa vie se résumait depuis trois longs jours. Boire, manger, se lamenter, boire de nouveau, ainsi de suite. Alan se trouvait affalé sur sa chaise et suait, la chaleur restait cloitrée dans la maison et devenait insupportable à vivre car l'homme était plongé dans l'obscurité jour et nuit, rideaux fermés. En effet, personne n'était obligé de voir jusqu'où le chef de Labulat était tombé. Le regard vide, une énième fiole vide à la main, la raison ne lui servait plus à rien et alimentait même ses douleurs chaque seconde. La perdre un temps par le biais de cette boisson enivrante ne lui ferait qu'oublier le temps de quelques heures les regrets qu'il portait difficilement.

     Alan posa les yeux sur une potion perdue dans toutes les autres dispersée sur la table, elle était remplie d'un liquide différent de ce qu'il buvait jusque-là et se démarquait de ses semblables notamment en raison du message de prévention inscrit dessus. Son état ne lui permettait pas de lire correctement le nom de cette potion, mais ses connaissances dans le domaine lui firent comprendre de quoi il s'agissait. Du poison. Ce genre de substance mortelle ne s'utilisait jamais en alchimie, seul un meurtrier en userait... et pourtant, il en possédait bien un échantillon. L'oncle s'empara de la fiole et l'observa de longues secondes durant lesquelles il réfléchissait à une sombre question. S'il en ingurgitait, la corruption en lui serait-elle capable de lutter et empêcher la substance de le tuer ? Qu'avait-il à perdre à essayer ? La solution se trouvait peut-être entre ses mains... Il déboucha le récipient et reconnut immédiatement une odeur nauséabonde typique des potions dites « noires », autrement dit, celles dont aucune personne n'était en droit de posséder autrefois et qui n'apportaient que le malheur autour d'elles. Sa curiosité morbide l'incitait à boire mais une partie de lui hésitait encore. Il était évident qu'Alan n'avait pas les idées claires, mais il ne craignait plus la mort et commençait à vouloir apprendre à la connaître. Il approcha la fiole de ses lèvres lorsque quelque chose en lui semblait réticent à cette idée. Tout à coup, on frappa à sa porte trois fois avec force, ce qui le stoppa dans son élan suicidaire.

La Marque du PasséOù les histoires vivent. Découvrez maintenant