Chapitre 11 : Le frère disparu

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     Voilà cinq jours qu'elle s'en était allée. Presque une semaine d'inquiétudes, de peurs et d'angoisses pour l'oncle qui la pensait parfois morte. Ces pensées le hantaient mais il évitait tout de même de songer à un scénario si terrible. L'ignorance n'était jamais une situation confortable dans laquelle se trouver, il ne dormait plus la nuit, la fatigue et la déprime avaient engendré chez lui des instants de fureur incontrôlable. Colère, peur et tristesse le contrôlaient perpétuellement, Alan ne savait plus comment s'en sortir. Lysia devait se trouver si loin à l'heure qu'il était ce jour-là ; si tout s'était bien passé, elle devait avoir atteint le village d'Écaraille, mais qui pourrait lui assurer de sa réussite ?

     De plus, il savait que ses jours étaient comptés s'il continuait à absorber la corruption trop proche du village dans son propre corps. Capacité qu'il cachait à tout le monde depuis toujours et qu'il possédait depuis qu'il avait été corrompu puis immunisé de manière divine. Et peu de gens savaient pour ce fait, il souhaitait le dissimuler le plus possible, pour n'effrayer personne. En effet, depuis cette menace apparue sur la colline depuis quelques semaines, il ralentissait son avancée en secret, en usant de son propre corps. Son village étant bien trop précieux à ses yeux, il avait opté pour cette option qui mettait en péril sa santé depuis quelques jours. C'était également la raison pour laquelle il ne pouvait pas se permettre de quitter Labulat pour aller sur la trace de Lysia. Malheureusement, la corruption gagnait en puissance malgré ses efforts, et cela ne faisait que la ralentir pour une durée déterminée.

     Dans la salle de réunion, le Conseil était de nouveau en pleine réflexion, cherchant à agir au plus vite face à ce problème que plus personne ne pouvait nier. Les rideaux fermés filtraient l'intensité de la luminosité qui rentrait dans cette grande salle commune. Ainsi, ils discutaient dans la pénombre, assis autour de cette même table carrée. Une certaine pression régnait dans l'air, Labulat était dans une situation critique qu'il fallait régler au plus vite, et Suzanne, dans un état de stress, était la plus impliquée. Elle avait pris la place attitrée d'Alan autour de la table, ce dernier étant donc assis à côté d'Adrien. Doni et Ben répondaient également à l'appel, tous deux très silencieux, ils ne semblaient que très peu perturbés par le danger de cette corruption, ce qui avait tendance à agacer Suzanne et l'alarmer davantage. La jambe droite constamment en mouvement de Doni commençait d'ailleurs à faire trembler la table et être insupportable...

- Un enfant a failli se faire toucher par cet amas de substance gluante et hideuse... déclara Suzanne. Je ne sais pas si vous vous rendez compte de l'urgence actuelle de la situation.

     Un blanc remarquable démontrait que toute la table était endormie, personne ne réagissait. Ce jour-là, une pluie battante s'était abattue sur la région et produisait un bruit continu contre les vitres des fenêtres qui arborait les deux murs porteurs du bâtiment. La tante d'Arthur, ne percevait aucune motivation, pas même chez Adrien, son mari qui ne savait lui non plus quoi répondre à cette crise. Il admirait la détermination de sa femme mais avait du mal à la suivre parfois. Il restait donc assez réservé sur la question. Suzanne émit un long et puissant soupir témoignant de sa fatigue et son désespoir.

- Je suis vraiment la seule à me rendre compte de...

- Il faut construire des remparts solides, l'interrompit soudain Alan, presque affalé sur la table dans une position de recroquevillement distincte.

     Le regard dans le vide, il venait de prendre une décision capitale, et savait très bien que cela ferait réagir. Cependant, l'oncle avait un plan minutieux en tête qu'il avait enfin jugé d'appliquer, pour la survie des habitants du village. Suzanne ne fut guère surprise de cette proposition, car cette dernière n'était pas nouvelle, mais Alan la remettait sur la table, avec une réflexion qu'il voyait mieux fondée.

La Marque du PasséOù les histoires vivent. Découvrez maintenant