VERRECROCE - Il revient quand?

12- Le dossier

         La porte s'ouvrit violemment et Benjamin sursauta, pointant le révolver vers l'entrée dans un réflexe angoissé. Mais ce n'était que Rémi, une carte étrange à la main. Benjamin remarqua immédiatement son regard perdu, et le sang qui coulait depuis son sourcil. Il l'appela, lui demandant comment il allait, comment ça c'était passé mais n'obtint aucune réponse. Rémi ne répondit pas, fixant le mur en face de lui avec une respiration encore très rapide. Benjamin s'approcha et posa sa main sur son épaule, le faisant sursauter.

"Rémi. Qu'est-ce qui se passe?

- Il s'est bien débattu," constata amèrement Rémi en le regardant enfin.

         Et c'est en voyant vraiment son coéquipier qu'il réussit à rassembler ses pensées, s'ancrant de nouveau à la réalité.

"Il m'a frappé la tête contre le mur, faut que je m'en remette mais ça va t'inquiète pas. Par contre il faut qu'on agisse vite maintenant Théo!"

         Rémi s'approcha du mur, et posa le badge contre. Benjamin fut surpris, il pensa tout d'abord que son camarade devait encore avoir la tête retournée pour faire ça alors que le mur blanc ne présentait aucune particularité, mais il entendit bien vite un discret bruit électronique. Il regarda, perplexe, une partie du mur en face s'effacer, presque comme reculant en arrière, et laissant alors une ouverture vers une seconde pièce. Rémi eut un sourire satisfait, et s'engouffra à l'intérieur. Benjamin regarda une dernière fois derrière lui, avant de s'engager à sa suite, le revolver toujours dans sa main, à l'affût. La pièce dans laquelle il arriva était encore immaculée de blanc, et s'il n'y avait pas eu un peu de mobilier ça aurait eu don de rendre fou Benjamin qui venait déjà de passer de longs instants seul dans l'autre pièce.

"Je ne connais pas bien les archives par contre, et je sais pas ce que tu veux donc ça va être à toi de gérer là, j'vais guetter la porte," l'informa Rémi en repassant le badge sur le mur qui se referma derrière eux.

         Benjamin observa devant lui. Il y avait six étagères très hautes, il avait l'impression qu'elles touchaient le plafond, et remplies de papier. Aucun ne dépassait, toutes les feuilles ou dossiers semblaient impeccablement rangés, au millimètre près. Il s'avança dans une rangée, essayant de comprendre comment c'était rangé. Sauf qu'évidemment, rien n'était écrit sur les différents dossiers et Benjamin sentit le désespoir commencer à arriver. Il se retourna, et vit Rémi contre le mur, s'essuyant son sang sur le visage. Il refusait de se laisser abattre par de la vulgaire paperasse, alors qu'il avait enfin réussi à être ici, grâce à Rémi, alors que ça faisait plus qu'un an qu'il avait quitté les siens pour ce moment précis où il pourrait les protéger en faisant disparaître les traces de l'existence de sa famille parisienne. Il réalisa alors qu'il n'avait même pas pensé à eux depuis qu'ils étaient infiltrés, et cela lui redonna l'énergie nécessaire pour s'enfoncer dans les archives. Les rangées paraissaient infinies maintenant qu'il était dedans, et il regardait autour de lui comme cherchant un indice. Benjamin s'arrêta, il ne voyait même plus Rémi au loin derrière lui. Il était entouré de milliers de dossiers, il fallait qu'il trouve une solution, et rapidement d'après son coéquipier. Il examina le dossier en face de ses yeux, et le prit délicatement, veillant à ne pas toucher aux dossiers voisins, ni à déplacer la poussière qui s'était posée tout autour et qui pourrait lui permettre de le replacer au même endroit. Son revolver posé à ses pieds pour être libre de mouvements, il ouvrit délicatement le dossier en plein milieu. Il ne mit pas plus d'une seconde pour comprendre que c'était le dossier d'une affaire, aucun intérêt. Il le reposa à sa place en retenant son souffle, tentant d'éviter que le moindre indice ne leur dévoile par la suite qu'il était passé par là. Il avança de deux pas et prit un autre dossier, voulant s'assurer que toute la rangée était dans le même thème. Sauf que le dossier qu'il ouvrit était vierge, que des feuilles, blanches toujours. Il le contempla, perplexe, essayant de comprendre la mécanique, avant d'entendre un bruit à l'autre bout de la pièce, vers l'entrée. Il reposa le dossier le plus rapidement et délicatement possible, avant de se mettre à marcher vite mais en restant un maximum silencieux vers le fond de la pièce. Sauf qu'il se rappela de son arme, abandonnée par terre, et fit rapidement demi-tour pour la récupérer. Il ne voulait toujours pas s'en servir, mais il ne pouvait se résoudre d'abandonner ici un indice aussi évident d'une intrusion dans les archives. Il repartit dans l'autre sens. Son coeur battait dans ses oreilles, si ce n'était pas Rémi, si c'était quelqu'un d'autre, il n'aurait aucun mal à le voir dans cette rangée toute droite entre deux lignes d'étagères. Il continua de marcher vite, silencieusement mais tentant également de paraître nonchalant, le revolver caché dans sa veste, comme si le quelqu'un pourrait se dire au loin que c'était totalement normal que lui soit là. Il atteignit enfin l'extrémité de la pièce et se cacha derrière une ligne d'étagères, les sens en alerte. Il angoissait et se détestait en même temps, il avait peut-être perdu sa seule chance de trouver ces fichus informations qu'il devait à tout prix détruire pour protéger sa famille. Il tendit l'oreille, et entendit un chuchotement non loin de lui :