23- Traumatisme

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Pierre arrêta rapidement son réveil, ne voulant pas qu'il arrache aussi du sommeil la masse qu'il sentait sur son torse. Il ferma quelques instants les yeux, pour ressentir pleinement la présence à ses côtés, il n'avait pas rêvé. Il caressa doucement ses cheveux bruns, avant de le décaler avec toute la douceur qu'il pouvait avoir. Benjamin grogna dans son sommeil, ses mains s'accrochant faiblement à son t-shirt. Pierre le regarda, attendri, lui non plus ne voulait pas se séparer de lui mais il devait s'occuper de Milo. Il réussit à échanger sa place avec son oreiller, que Benjamin serra contre lui par réflexe, faisant encore sourire Pierre. Il l'embrassa sur le front, lui assurant qu'il revenait au plus vite, et quitta la chambre pour aller s'occuper de Milo et l'emmener à l'école. Ce fut dur d'agir comme si rien n'avait changé, mais il préférait ne pas en parler immédiatement à leur fils, il voulait d'abord discuter avec Benjamin. Et ce fut encore plus difficile de quitter l'appartement en sachant qu'il laissait Benjamin seul dans leur lit. Il ne put s'empêcher de se dépêcher, Milo lui demandant même s'ils étaient en retard vu son empressement. Puis sur le retour, il envoya un message à Guillaume lui indiquant qu'il ne viendrait pas travailler aujourd'hui, s'arrêta à une boulangerie et appela un médecin à domicile. Il réussit à obtenir une visite chez eux dans l'après-midi, d'un médecin qu'il connaissait, du type qui ne posait pas plus de questions qu'il ne le fallait et qui avait bonne réputation. Il connaissait son brun, et il doutait fortement que celui-ci accepte que le blond le traîne à l'hôpital aujourd'hui. Mais quitte à y aller que le lendemain, Pierre préférait s'assurer d'une visite médicale le jour même au vu de l'état de son amant.

Arrivé à leur adresse, il monta les marches quatre à quatre, et entra rapidement. Aucun bruit, personne ne semblait avoir bougé. Il posa ses viennoiseries dans la cuisine et retourna dans la chambre, y retrouvant avec soulagement son amant. En s'approchant davantage de lui, il remarqua son front perlé de sueur, ses sourcils froncés et ses mains crispées sur l'oreiller. Voulant le libérer de son cauchemar, il l'appela en secouant doucement son épaule. Ce n'est malheureusement pas l'effet qu'il espérait qui se produisit. Benjamin le repoussa violemment, criant à travers la pièce "Lâchez-moi, ne me touchez pas!" d'une voix cassée. Tout d'abord décontenancé d'être ainsi rejeté par son amant, il vit ses yeux encore fermés et tenta de nouveau de l'appeler, lui assurant qu'il ne craignait rien, que ce n'était que lui, que Pierre. Il voulut de nouveau le toucher, mais dès qu'il ressentit le contact, Benjamin recula rapidement en arrière, se frappant violemment le dos contre la tête de lit, la douleur forçant alors son réveil. Il ouvrit des yeux paniqués, regardant autour de lui sans comprendre. Quand enfin il se souvint du lieu où il était, que ce n'était qu'un cauchemar, et que c'était Pierre qu'il avait repoussé ainsi, ses yeux se remplirent de larmes et tout son corps tressauta au rythme de ses sanglots.

"Pieeerre"

Sa voix sonna comme une plainte, ne semblant même pas être destiné à l'intéressé, comme s'il n'était pas là, et la souffrance qui ressortait de cette lamentation toucha Pierre en plein cœur. Cette fois-ci, il se rapprocha de lui, et l'entoura de ses bras protecteurs, lui-même se mettant à pleurer.

"On est là Ben, on est ensemble" chuchota Pierre entre deux sanglots, autant pour rassurer son brun que pour se rassurer lui-même.

Ils se séparèrent, Pierre glissant sa main sur la joue de son amant pour essuyer ses larmes, et il reçu le même traitement en miroir.

"Est-ce que tu veux m'en parler?

- Je peux pas Pierre, je vais pas y arriver."

Benjamin se redressa sur le lit, et planta son regard dans le sien avant de continuer.

"Ce qui compte le plus, c'est que vous ne craignez plus rien, c'est bon on a réussi, ils ne pourront sûrement plus continuer leurs activités, et le dossier nous concernant, je l'ai déchiré.

- Merci Ben, t'es incroyable merci... lâcha Pierre, soulagé de savoir que c'était vraiment fini et que Benjamin n'allait pas lui annoncer qu'il devait repartir.

- Mais j'ai vécu des choses Pierre, j'ai l'impression que c'était un cauchemar tellement c'était, c'est inhumain, essaya-t-il d'expliquer en cherchant ses mots, je crois que mon cerveau en a supprimé des parties, et je revis ces moments depuis que je suis sur le chemin du retour, j'en peux plus je sais pas si je vais m'en sortir, je-

- Tu vas t'en sortir, le coupa Pierre avec certitude.

- Ils m'ont changé Pierre, j'ai l'impression de ne plus être moi-même, j'ai l'impression de ne plus mériter ton amour, que tu n'aimeras plus la personne que je suis devenue...

- Ben, regarde moi, ça n'arrivera pas. Si tu es prêt un jour tu me raconteras ce que tu as vécu, mais quoi qu'il se soit passé, tu vas réussir à te reconstruire, j'ai confiance en toi mon coeur. Et je serais là pour t'aider, je serais toujours là, parce que je t'aime quoi que tu sois devenu comme tu dis, parce que Pierre sans Benjamin c'est pas Pierre, parce que j'ai vécu plus d'un an loin de toi et que jamais plus je ne pourrai supporter ça. On va retrouver notre vie, ensemble, toi et moi, et avec Milo, tu prendras tout le temps qu'il te faudra, mais je serais là pour t'aider à chasser les traumatismes et t'offrir la vie que tu mérites."

Les larmes de Benjamin se remirent à couler alors qu'il glissait sa main dans les cheveux blonds de son copain pour les caresser, ému, rassuré, amoureux. Pierre se pencha alors vers lui, fermant les yeux, et ses lèvres vinrent retrouver celles tant aimées de son brun. C'était si bon, d'enfin se retrouver, d'enfin pouvoir s'embrasser comme avant. Dans ce baiser passa tout d'abord toute la tristesse et le manque qu'avait procuré dans leurs cœurs l'absence de l'être aimé. Puis ce ne fut que de l'amour, l'amour pour l'autre, et l'espoir de retrouver une vie heureuse, réunis.

VERRECROCE - Il revient quand?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant