Chapitre 7 - Nostalgie

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Chicago Lakeshore Hospital, 9H00 du matin.

" Chère Annie,

Je tiens à vous exprimer toute ma gratitude. Recevoir des mots chaleureux dans ce lieu sombre où je réside est une rare lueur de réconfort.

Je ne sais même plus si je suis capable d'éprouver des émotions normales ou non, parce que cela fait longtemps que je n'ai pas pleuré. On les étouffes depuis tant d'années, et puis après on les perd et on ne sait plus.*

J'ai ressenti ce vide grandissant en moi, une absence totale d'émotions qui m'a conduit à des actes dont je ne suis pas fier. Ce manque d'émotion transforme un être humain en un gouffre béant, un néant difficile à combler.

A travers les barreaux de ma cellule, je ressens un vide, un manque profond d'amour et de connexion humaine. C'est une douleur lancinante qui me hante au quotidien.

Je suis profondément désolé d'être né ainsi, dépourvu de cette capacité à ressentir l'amour et la chaleur humaine comme les autres. J'envie ceux qui ont la chance de connaître ces sentiments, même dans leurs moments les plus sombres.

Mon parcours a été marqué par des actes impardonnables, des choix que je regrette chaque jour. Mais parmi tous ces remords, le plus grand est de savoir que je suis incapable de ressentir cet amour qui aurait pu me guider sur un chemin différent.

Votre compassion et votre compréhension sont rares, mais précieuses. J'aurais tellement aimé être comme ça...

Merci encore pour votre lettre et vos mots de soutien Annie

Ils sont une bouffée d'air frais dans ma réalité morose et solitaire. 

Avec gratitude, Jeff Dahmer."

Mes émotions vacillaient entre la compassion et l'horreur. Je sentais une boule se former dans ma gorge, menaçant de libérer un flot d'émotions incontrôlables. Mais je me forçais à respirer profondément, à garder un visage neutre, refusant de laisser mes sentiment d'empathie prendre le dessus.

C'était difficile de ne pas ressentir de la tristesse pour cet homme, même s'il avait commis des actes impardonnables. Je savais que je devais rester neutre, mais une part de moi voulait offrir un peu de réconfort à travers mes mots. Je repliais soigneusement la lettre, déterminée à répondre avec empathie tout en maintenant une distance nécessaire. C'était un équilibre délicat, mais j'étais déterminée à le maintenir.

« Toc, toc, toc ! »

Le bruit soudain du tapotement sur la porte me tirait violement de ma rêverie. Mes yeux s'ouvraient grands, surpris par cette interruption inattendue. Je me levais lentement, mes émotions en désordre, en me dirigeant vers l'entrée de mon cabinet.

    - Tout va bien Docteur ? Demandait Yann inquiet.

    - Oui, ça va, vas-y rentre et assieds toi.

Peu convaincu par mon jeu d'acteur, le jeune garçon me dévisageait d'un air interrogateur.

    - Je vois bien que ça va pas Doc, si vous voulez pas en parler ok mais ne me mentez pas.

    - C'est vrai, excuse moi Yann. J'ai reçut la réponse de Dahmer.

    - Non ! Sans déconner ? C'est plutôt une bonne nouvelle non ?

    - Pas vraiment non.

    - Pourquoi cela ? Je pensais que ça ce passait plutôt comme prévu pourtant ?

J'hésitais à répondre, indécise sur la façon d'amener le sujet sans trop l'explorer.

    - Il m'a confié des choses assez fortes sur lui et sur ce qu'il ressent. Je ne m'attendais pas à tant de sincérité et de révélations de sa part. Je t'avoue que ça me met dans une drôle de position dans laquelle je ne pensai pas être.

Cher DahmerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant