Chapitre 17 - Happy Halloween

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31 Octobre 1992

Sous le porche de la maison, je me trouvais confortablement installée sur la balancelle artisanale fabriquée par Chad. Doucement, je me laissais bercer d'avant en arrière, enveloppée dans une légère couverture à carreaux rouges, profitant de la fraîcheur de l'après-midi pour me détendre.

Octobre était un mois que j'appréciais tout particulièrement. L'automne, ma saison de prédilection, apportait avec lui son lot d'odeurs et d'ambiances uniques : le parfum des feuilles mortes, le pétrichor, cette brume dense qui caressait les cimes des arbres au petit matin. Cette période avait sur moi un effet apaisant. Je me laissais emporter par le rythme de la nature qui doucement s'endormait pour accueillir l'hiver, plus rigoureux.

Mes pensées vagabondaient lorsque la voix grave de Chad, se tenant dans l'embrasure de la porte, m'arracha à mes divagations.

- Amanda demande si 21h00 nous conviennent ?, annonça-t-il.
- Oui, oui, parfaitement, répondis-je en me redressant pour lui faire face, mes mains trouvant naturellement leur place autour de sa taille avant de lui offrir un doux baiser sur les lèvres.
- Tu es sûre que ça va, Annie ?, s'inquiéta-t-il.
- Oui, ne t'en fais pas, je suis juste un peu fatiguée.
- Si tu veux, on peut rester ici, proposa-t-il. Je peux nous préparer une soirée films d'horreur et sucreries. J'ai vraiment envie de regarder L'Exorciste 3* !
- C'est adorable, mais nous avons dit que nous irions à la fête, répondis-je en embrassant Chad. Même si je dois avouer qu'une soirée blottie sous la couette est très tentante. Et puis, nous avons déjà nos costumes. Ce serait dommage de ne pas les porter !

Nous étions invités à une fête d'Halloween chez Amanda. J'adorais les fêtes costumées et je m'investissais toujours pleinement dans le jeu. Évidemment, avec mon amie qui était une experte en organisation de soirées, il y avait un thème imposé : les couples.

Chad n'avait pas vraiment eu son mot à dire concernant nos déguisements, mais cela ne le dérangeait pas. Si je l'avais écouté, nous aurions été déguisés en Cruella et Dalmatiens. Finalement, c'est en Danny Zuko et Sandy Olsen, version vestes et pantalons de cuir, que nous allions débarquer, bras dessus, bras dessous.

***

J'ajustais la perruque blonde et bouclée sur ma tête, me trouvant inhabituelle dans ce look, bien que je doive admettre que j'étais  plutôt canon comme ça. Jetant un dernier coup d'œil dans le miroir pour vérifier que tout était en place, je constatais que ma tenue était impeccablement ajustée, épousant mes courbes comme un emballage sous vide.
Après avoir rassemblé mon rouge à lèvres, mes clés et un petit poudrier dans mon sac, j'enfilai ma veste en cuir et dévalai les escaliers pour attendre Chad, sorti acheter quelques bouteilles pour la soirée.

En me dirigeant vers ma chambre pour prendre quelques cassettes pour le trajet en voiture, et peut-être quelques vinyles de ma petite collection pour m'improviser DJ, je me mis à chercher mes cassettes de Michael Jackson.

- Bon sang, où sont passées mes cassettes de Michael Jackson ! J'étais pourtant sûre de les avoir rangées ici, maugréai-je en fouillant la pièce, tentant vainement de retrouver dans tout ce désordre le précieux trésor, sans doute éparpillé un peu partout.
- La vache ! On devrait inventer un appareil qui stocke toutes nos musiques, ça éviterait de jouer les cambrioleurs pour retrouver ces satanées boîtes en plastique.

En fouillant sous le lit, mes mains rencontrèrent une grosse boîte en bois poussiéreuse. Je me figeai sur place, hésitante à ressortir cette petite capsule temporelle si longtemps négligée. Puis, caressant le couvercle du coffret, j'actionnai le petit verrou, laissant émerger mes souvenirs enfouis.
Les yeux embués, je saisis la cassette de Neil Sedaka et la photo soigneusement rangée. Mon regard s'attarda sur le large sourire quelque peu hébété du visage juvénile de Jeffrey Dahmer. Je contemplai sa posture, sa carrure déjà imposante à l'époque du lycée. Il était le genre de garçon sur lequel je me serais sûrement retournée si j'avais eu la chance de le croiser dans les couloirs.

Cher DahmerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant