Chapitre 9

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Elle était là, à quelques mètres de moi. Elle semblait gaie, ce qui me réconforta un peu. Lorsque je me rapprochai d'elle, je me rendis compte qu'elle n'était pas seule. Railey s'occupait d'elle. Elle lui faisait des blagues, qui eurent pour effet de lui décrocher un sourire. Je me cachai discrètement de manière à ce qu'aucune d'elles ne puisse m'apercevoir. Je ne voulais pas les déranger et rompre ce moment qu'elles partageaient, au cours duquel Iris s'amusait. Alors que je l'observais, je ressentis un sentiment de culpabilité et de tristesse. Je n'avais pas été là lorsque ma sœur avait eu besoin de moi. Je m'étais contentée de me morfondre sur mon sort alors qu'elle était tout pour moi. Puisque je n'avais pas été à la hauteur de mon devoir, une autre le faisait. Une autre réconfortait ma petite sœur et la câlinait. J'aurais tout donné pour être à sa place et la serrer dans mes bras. Mais je n'avais pas su le faire.

Je voulais pleurer. C'était trop dur. Comment être une bonne grande sœur si je n'arrivais pas à m'aider moi-même ?

Je me reprochai sévèrement de ne pas avoir été là pour Iris, de ne pas avoir été présente pour accomplir mon rôle de grande sœur. Iris méritait mieux que moi. Et alors que je pensais de Railey qu'elle n'était qu'une peste qui ne m'arrivait pas à la cheville, elle était là en train d'entreprendre ce que j'aurais dû et n'avais pas su faire. Après réflexion, je décidai de m'approcher d'elles. En me voyant arriver, Railey me salua et Iris ne chercha pas à croiser mon regard.

- Salut Agathe, commença Railey.

- Salut... répondis-je hésitante. Alors... vous faites quoi ?

- Oh euh, on joue, je suppose ?

- OK, cool. Je peux me joindre à vous ?

Railey chercha furtivement le regard de ma sœur qui n'avait pas encore parlé avant d'acquiescer. Je n'avais pas besoin d'être très perspicace pour comprendre que ma venue ici n'était pas désirée par tout le monde. Je m'assis entre ma sœur et Railey et les laissèrent m'expliquer les règles du jeu : Action, vérité, ou blague. Railey commença en choisissant « action ». Ma sœur lui donna le gage de faire l'équilibre sans tomber. Railey se positionna et s'élança. A mon grand étonnement, elle réussit. Ce fut donc mon tour. Je choisis « vérité » puisque je n'étais pas d'humeur à blaguer ni à me risquer à faire la roue ou autre.

- Dis honnêtement ce que tu pensais de moi la première fois qu'on s'est vu, lâcha Railey.

Ce n'était pas la peine de mentir, elle savait très bien que je ne m'étais pas fait une remarque sur sa particulière gentillesse.

- J'ai tout de suite pensé que t'étais une pétasse qui ne valait rien et qui allait me voler mon petit-ami, répondis-je sans trop réfléchir.

Ce ne fut qu'après ce silence assourdissant que je me rendis compte que j'avais été trop dure. Railey se mordait la lèvre et Iris me lança un regard assassin. Il ne fallait pas abuser non plus, Railey avait bel et bien tenté de me piquer Maxime.

- Mais ça a changé, dis-je pour me rattraper.

Railey haussa un sourcil inquisiteur et m'engagea à poursuivre le jeu. Iris choisit « vérité » et je lui imposai ma décision.

- Penses-tu pouvoir me pardonner ?

Elle s'agita nerveusement et replaça sa mèche rebelle derrière son oreille.

- Oui, bien sûr. Mais ça n'empêchera pas le fait que j'ai été déçue et blessée. Pardonner ne veut pas dire oublier.

J'étais mi-soulagée, mi-dévastée. J'avais merdé. Je le savais. J'aurais beau tout faire pour me rattraper, elle serait toujours blessée par une de mes erreurs du passé. Je m'excusais et m'enfuis loin de ce jeu. J'avais envie de vomir. Vomir ma douleur et mon déjeuner.
Je m'agrippai à la coque du bateau juste à temps. Je me rinçai la bouche et la gorge avec l'eau de mer. Je bus de l'eau, écoeurée par cet arrière goût pénible qui me restait en bouche. Je restai assise à l'air libre pour profiter des caresses glaciales du vent sur ma peau. Je fermai les yeux en essayant de ne penser à rien. Peine perdue. Mes démons me rattrapaient toujours. Je sentis une présence se poser à mes côtés. Une présence que je ne voulais pas revoir autant qu'elle me manquait.

CondamnésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant