Chapitre 42

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Quand Malik El'Chah a revu Neige, celui-ci semblait changé.

— Je sais que vous partez, a dit le vieux. Je viens avec vous.

Malik a ri de bon cœur :

— Ah bon ? Et qui vous y autorise ?

L'autre s'est gratté la barbe et un demi-sourire a percé derrière sa face grise :

— Vous.

— Pourquoi vous emmènerais-je ?

— Parce que je peux vous parler de ce dont vous rêvez.

Le vieux Neige, bizarrement, se montrait particulièrement réticent à quitter Caffoue. L'idée ne gênait pas tant Malik, que Jazir suppliait presque de fuir, mais l'évidence du mystère le rendait soucieux. Pour autant de méfiance de la part de Malik, Neige en déployait le double à convaincre. Désormais, le vieillard ne craignait plus les promesses qui s'accumulaient dans l'oubli. Car Malik El'Chah considérait tout ça avec suspicion.

— Combien de partisans ? demandait Neige.

— Une vingtaine.

— Inutile de me mentir.

— Une trentaine, tout au plus.

— Malik, je suis votre allié. Aidez-moi à vous aider.

— Écoutez, vieillard, vous débarquez et me menacez d'abord...

— Combien ?

— Quarante.

— Une cinquantaine, donc.

Malik a soufflé :

— Oui, à peu près.

— Ce n'est pas suffisant...pas suffisant du tout.

— Écoute vieillard, cinquante hommes, voilà une jolie troupe. Assez pour dompter le désert s'il le faut, est intervenu Jazir.

Si le Chah était méfiant à l'égard de Neige, c'était peu dire de Jazir qui le craignait.

— Le désert, oui. Le désert...

— Qu'est-ce que tu nous chantes, vieillard ? Malik ! Nous n'avons pas besoin de lui.

Malik El'Chah s'est touché la tempe en inclinant la tête, les yeux dans le vague :

— Je crois que si Jazir, je crois que nous pourrions avoir besoin de lui...

— Mais que t'a-t-il chanté pour te faire ainsi tourner la tête ?

Jazir a foudroyé Neige et a dit :

— Allons-nous en, Malik ! Quittons Caffoue, vite ! avant que ce soit trop tard. Laissons ce vieil escroc, et s'il y tient qu'il vienne ; mais qu'il garde sa langue serpentine dans sa gueule écailleuse.

Mais aussi mirobolantes furent les promesses de Neige, Malik El'Chah ne pouvait s'empêcher de les considérer. Neige savait pour la bibliothèque, et lui avait parlé des livres et de leur contenu mieux qu'on ne l'avait fait jusqu'alors. Les images paraissaient si vraies qu'il tenait séance à Neige des heures, seulement pour l'écouter parler de ce lieu magique. Et tant que Neige lui donnait ça, Malik El'Chah, malgré lui, se laissait convaincre.

— Si vous avez déjà cinquante têtes, nous en trouverons encore le double. Et plus encore lorsque nous partirons.

— Si tu le dis, Neige. Si tu le dis. Mais parle-moi encore des arbres et des forêts, des fruits qu'on cueille sur le pas de sa porte...s'il te plaît.

Shanalah [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant