Chapitre 20

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Ils s'en tiraient bien, selon Nalah. Ils ont trouvé de l'eau dans les gourdes des deux hommes. L'un d'eux vivait encore et il a fallu l'achever. Nalah s'y est collé, non sans plaisir. Kimini geignait mais finalement, il n'avait perdu qu'un doigt. Shanalah ne parlait plus. Elle avait été franchement ébranlée par les évènements. Elle ne cessait de demander à voix haute : « pourquoi » ; sans que nul ne sache précisément de quoi elle causait.

Personne ne lui répondait.

Ils ont marché toute la nuit. Ils entendaient des loups mais ceux-ci ne se sont jamais approchés. Shanalah regrettait presque la présence les bêtes. Le calme du désert l'angoissait de plus en plus et il lui semblait que chaque humain rencontré jusqu'alors avait souhaité leur nuire. Même Nalah l'effrayait. À mesure qu'ils s'éloignaient de leur terre natale, la Nalah sa mère devenait un monstre plus impitoyable que le désert. Une facette jusqu'à là insoupçonnée qui leur avait certes sauvé la mise, mais qui poussait Shanalah à regarder derrière elle. Pour fuir ? Mais fuir où ? Où pouvaient se trouver Farouk et Abdé ? Les avaient-ils réellement abandonnés comme le clamait Nalah ?

Je ne veux pas aller là-haut, pensait Shanalah. Je ne veux plus, pour ce que ça coûte.

Elle suivait difficilement Nalah qui brassait de grandes enjambées sans vérifier qu'ils la suivent. Des ampoules gonflaient les pieds de Shanalah et chaque pas lui arrachait un soupir. Elle n'avait jamais marché aussi longtemps, à une telle allure.

Elle regardait Kimini.

Il ne se plaignait plus, se murait dans le silence en gardant sa main gauche dans un bout de tissu mais un rictus lui tordait constamment le visage tant il serrait les dents, qui donnait à sa figure une allure méchante. Il a surpris le regard de Shanalah et a tenté un vain sourire qui n'a pas pris.

Où étaient Farouk et Abdé ?

Ils ont marché des heures et le soleil a percé. Ç'a été presque une joie pour Shanalah de le voir illuminer les grandes dunes ocre. Ça n'a pas poussé Nalah à ralentir, au contraire. Ils ne savaient pas où ils allaient ni pourquoi ; ils suivaient Nalah qui les guidait au nord, vers là-haut. Shanalah s'est effondrée pour souffler, et Nalah l'a regardée d'abord agressive, puis s'est calmée.

— On va faire une pause, a-t-elle dit.

Kimini s'est assis lentement, en prenant soin de ne pas s'appuyer sur sa main gauche.

— Ça va, ta main ?

— Ça fait mal, a grogné Kimini.

Nalah a tiré une des gourdes dérobées et a bu une gorgée. Elle l'a envoyé à Shanalah. Il restait quelques gouttes seulement. Shanalah a bu et l'a passée à Kimini.

— On va bien finir par la trouver, cette foutue oasis, a dit Nalah.

— Peut-être qu'elle n'existe même pas, a répondu Kimini.

— Si elle n'existe pas, il y en aura bien d'autres de toute façon. C'est le désert. On trouve toujours ce qu'on cherche, quand on sait chercher.

— Mouai.

Nalah a levé les yeux au ciel et a soupiré :

— Il va faire une sale chaleur, ce midi.

Nalah s'est épongé le front et a froncé les sourcils en voyant Shanalah qui regardait ses pieds et les malaxait. Shanalah essayait de les masser mais ça lui semblait inutile. Elle a décidé d'arrêter d'y penser.

Évidemment ça n'a pas marché. Lorsqu'ils ont repris la route, ses pieds pensaient pour le reste de son corps. Quand ils se sont arrêtés pour s'abriter du soleil, elle s'est effondrée pour ne plus bouger. Elle s'est endormie aussitôt.

Shanalah [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant