VESS
Irfan était furieux. Mais Vess s'en contrefichait.
Son maître ne l'avait pas envoyé à sa suite, contre une maigre rémunération, pour le servir loyalement. Au contraire, il se trouvait là pour surveiller et prendre les devants. Il devait convaincre les Askaziens de leur confier les dragons, non sans une contrepartie intéressante. L'occasion était trop belle pour que leurs cousins ailés, à l'arrogance démesurée, leur deviennent redevables.
Il restait néanmoins à préparer les arches pour fournir l'énergie nécessaire au retour des enfants d'Aranir. Elles n'étaient pas encore calibrées pour réussir l'exploit de revigorer les ressources écrasantes du tout-puissant Ixen. Et Falotard, la capitale de Joubann, restait loin d'être conçue pour garder confortablement, et surtout dignement, les corps endormis d'invités. Non... elle servait davantage aux expériences et au stockage d'esclaves.
— Pourquoi avez-vous prétendu qu'il vous faudrait des années pour préparer l'aide des dragons ? grogna Irfan, avachi dans le fauteuil de velours qui lui servait de trône temporaire dans sa caverne. Nous aurions pu emmener les dragons à destination si... tôt.
Ses plans contrecarrés, Hatun s'était empressé de fournir moult raisons pour s'isoler dans ses quartiers privés une fois le déjeuner englouti.
— Je n'ai rien « prétendu », siffla Vess. Au vu des circonstances, les arches de Falotard ne sont pas prêtes pour éveiller nos cousins ailés. Le manque d'énergie est bien trop grand.
Irfan serra les dents. Vess savait pertinemment qu'il n'avait nullement l'intention de réveiller les dragons, mais de les enlever sous couvert d'une bonne excuse. Il prétendrait à une attaque des firuls et des lysceurs pour sauver les apparences, en bon profiteur qu'il était. Un plan rondement réfléchi, mais dont la précarité s'engorgeait avec le temps. Et ces informations ne cesseraient de s'ébruiter s'il continuait à contacter à tout va les dirigeants de son ridicule conseil des trois.
— Il n'y a aucune urgence, clama Vess, un discret sourire aux lèvres. Même si cela demandera du temps, le seigneur des cieux ne trouvera pas d'autres solutions s'il souhaite revoir les dragons de son vivant. Personne ne peut lui proposer de meilleures options.
— J'espère que votre confiance ne vous aveugle pas.
Vess opina simplement. Il comptait plus pressant que de se formaliser de la langue de vipère de ce grassouillet. D'une courbette rudimentaire, il le salua et quitta la caravane.
Dehors, l'astre ardent et sa chaleur étouffante rendaient ses écailles brûlantes. Mais il n'avait pas le temps de s'en lamenter. Son mentor attendait des nouvelles et se montrerait fort désagréable s'il perdait du temps pour son confort personnel.
Vess combina néanmoins travail et confort en dénichant un recoin loin des regards, et plus particulièrement des oreilles, au fond d'une cavité rocheuse. Non loin du pic des griffons, elle prenait place à plusieurs mètres d'un chemin secondaire et s'enfonçait assez profondément pour couper tout son indiscret.
Vess jeta un dernier coup d'œil vers la pente rocheuse qui s'étirait à perte de vu sans laisser le jour percer, puis joignis ses mains. Paumes soigneusement plaquées, il les sépara pour ne laisser que les pointes de ses doigts encore liées. Au creux de leur dôme tiède, un feu follet se forma.
Frêle, vacillant sous la fine brise.
Mais tel un survivant, il éclata en une sphère vivace dès lors que Vess écarta les bras. Elle scintillait d'un bleu violacé qui illumina la roche de son panel froid.
— Je commençais à croire que tu avais abandonné, le moqua une voix à travers la boule incandescente.
— Vous savez bien que je préférerais la mort à l'échec, mentor.
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Prince et Dragon - Tome 3 : Nyrsslïa
Fantasy*histoire illustrée* Une guerre silencieuse étend son ombre vers Askaz, tandis que les dragons ne sont plus. Malgré l'absence d'Ixen, dont Ryrn connait à présent les raisons d'une amitié si profonde, le jeune guerrier n'est pas seul. Son père re...