Les ombres du désert [Terminé]

Chapitre 6

Zaina 

Pendant notre retour, Jawhar ne dit pas un mot. Il semblait perdu dans un monde dominé par le feu et la cendre.

Ses sourcils épais étaient toujours froncés, ses yeux en amande regardaient les choses avec gravité. Son expression était toujours impassible, je ne pouvais imaginer qu'un jour un sourire eut pu étirer ses lèvres pulpeuses.

Cependant, je ne pouvais nier qu'il était d'une beauté inébranlable. Si Allah avait donné la moitié de la beauté de l'humanité au prophète Youssouf, alors Jawhar en possédait le tiers.

Zaina, allais-tu vraiment continuer à contempler cet homme qui t'avait kidnappé et avait de lui sa femme contre ta volonté ?

Je secouai la tête pour enlever toutes ces idées de ma tête, et me ressaisis.

(...)

- Retrouvez-moi dans le salon dans dix minutes pour manger, dit-il en me tendant sa main pour m'aider à descendre du cheval, mais que j'ignorai consciemment.

- Je n'ai pas faim, mentis-je, car je ne voulais pas manger seule avec lui.

- Ce n'est plus un jeûne que vous faites. Cela fait plus de douze heures que vous n'avez rien avalé ! répondit-il mécontent et la voix grave, à croire que cela le dérangeait.

- Je jeûne pour me faire pardonner de toutes les injures que j'ai pu proférer à votre égard.

Son regard noir plonge dans le mien, et pendant quelques secondes, j'oubliai le monde autour de nous. Il dégageait quelque chose de froid mais de chaud en même temps. Par moment, je sentais tout mon corps se refroidir de peur face aux ténèbres qui remplissaient ses yeux, puis une chaleur s'immisçait en moi comme un incendie sur la glace.

- Dans ce cas, je devrais aussi jeûner à cause de votre père, dit-il avec animosité.

Je fronçai les sourcils, l'air confus.

- Pourquoi semblez-vous le détester autant ?

Son regard fixait mes yeux, mais par moments, je le voyais divaguer vers d'autres endroits, surtout mes lèvres, et quand cela se produisait, sa mâchoire se contractait si fort qu'on aurait dit qu'elle était ciselée à la serpe.

- Cela ne vous regarde pas, dit-il sur un ton faussement calme. Je sentais sa colère croître en lui.

- Je vous rappelle que vous m'avez kidnappée, qu'ensuite vous m'avez forcée à me marier avec vous pour Dieu, je ne sais quelle raison. Vous dites que votre vengeance est aussi la mienne, mais je n'ai pas le droit de poser des questions ? éclatai-je, à bout de nerfs.

J'étais accablée par tous ces non-dits et mystères qui m'avaient ramenée jusqu'à lui.

- Vous ne supporteriez pas le poids de la vérité, de plus, vous avez l'air d'avoir du respect pour votre ordure de père...

Sa voix était pleine d'amertume et ses mâchoires étaient crispées. Il semblait contenir toute la rage et la haine que mon père lui infligeait.

D'un geste nerveux et brusque, il passa sa main dans ses cheveux noires et épais. Mais une boucle tombait toujours sur son œil droit, sous lequel il avait un grain de beauté.

Il était agacement beau.

- L'action la plus chère aux yeux d'Allah, après l'accomplissement des prières aux heures prescrites, c'est la bonté envers ses parents. Jamais je ne déshonorerais mon père, dis-je, pleine de confiance et de détermination.

J'aimais mon père et jamais rien ne me ferait lui tourner le dos, mais ce qu'il me dit après cela m'abattit sur place.

- Même s'il avait tué une femme et son enfant ?